Mon Top 1950

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Difficile de croire que cette comédie délirante soit signée Clouzot, ce qui explique probablement pourquoi elle est considérée comme un objet mineur dans sa filmographie.

Et pourtant quel festival burlesque, quelle précision dans l'art de la réplique qui fait mouche, quel sens du rythme ! J'adore être déstabilisé au cinéma, et là j'en ai eu pour mon argent. Pour mon plus grand plaisir le génie, qui m'avait jusque-là fait souffrir, est parvenu cette fois, équipé d'un trio Bourvil - Danièle Delorme - Louis Jouvet en mode ouragan, à me faire mourir... de rire.

Je pourrais parler des heures de Clouzot (Deux personnes, dont une qui a partagé mes rires avec Miquette et le dîner qui a suivi avec Noël Herpe *, sur ce site peuvent en témoigner, je les embrasse si elles passent par ici) mais je vais m'arrêter là pour aujourd'hui, au prochain épisode je vous dirai 2-3 mots sur une certaine "Manon" et sur une "Prisonnière".

* Biographe de Rohmer ( https://www.senscritique.com/livre/Eric_Rohmer/10735645 ) et commissaire de l'exposition "Le Mystère Clouzot" en 2017 à la Cinémathèque française ( https://www.senscritique.com/livre/Le_mystere_Clouzot_Catalogue_de_l_exposition_a_la_Cinematheq/28570807 )

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Autant en 2018 j'étais une belle petite crapule autant depuis 2 jours je ne suis plus que paix et amour. Ainsi ai-je décidé que dorénavant à tout avis négatif succéderaient torrents de cœurs sur le monde.

Voici donc de quoi rattraper mon « léger » emportement envers "Le Prix du succès" : Revoir "La Ronde" sur grand écran en version restaurée aura été un de mes plus grands bonheurs cinématographiques de 2018. Ce film est un truc qui vous emporte de la première à la dernière seconde par le simple génie d'un homme : Max Ophüls. Sa mise en scène est juste incroyable, chaque plan est renversant, et pourtant le labeur ne se ressent jamais.

Et puis au-delà de la forme magistrale il y a le fond : léger et pourtant révolutionnaire pour l'époque, c'est de libertinage qu'Ophüls nous parle là où les oreilles des années 50 ne pouvaient entendre que morale de l'amour.

Je peux donc maintenant rejoindre ma couche la conscience apaisée...

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Voici de la comédie jubilatoire car certes drôle mais avec cette petite dose de cruauté qui fait la différence. La mise en scène de Robert Hamer n'est pas des plus inventives mais les dialogues et la partition majuscule d'Alec Guinness permettent à ce film culte d'être encore follement moderne.

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On reste chez Simenon pour certainement l'un de mes Gabin préférés. "La Vérité sur Bébé Donge" commence comme une bluette et glisse peu à peu vers le mélodrame psychologique et le thriller horrifique.

Usant de flash-backs, Henri Decoin nous amènera par pastilles successives à comprendre ce qui a mené François Donge à sa perte, et la relative douceur des débuts, la lumière, la beauté solaire d'une Danielle Darrieux s'atténueront peu à peu pour laisser place à une noirceur absolue.

Un film à la cruauté vertigineuse...

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Un film d'une grande élégance, qui plutôt qu'un biopic conventionnel comme le cinéma actuel nous en pond à la pelle, se transforme très rapidement en une œuvre toute entière consacrée à la quête de la note inaccessible. Un bon résumé de la vie de tout passionné en somme…

Laissez-moi vous citer le trio présent dans cette "Femme aux chimères" et vous jugerez s'il est normal que le nombre de notes soit de 171 : Kirk Douglas, Doris Day et Lauren Bacall dont a voix est la preuve de l'existence de Dieu… et du diable.

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Seuls les immenses réalisateurs peuvent à ce point transcender des scénarios qui ne brillent pas par leur originalité, faire de ce qui pourrait être une série B un modèle de film noir. Lang, Clouzot, Hitchcock, mon tiercé gagnant des mecs qui te rendent fou avec un escalier et une ombre.

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Grand film noir au sens classique du terme je ne sais pas mais grand film sombre assurément. Car le titre ne ment pas, on est bien là dans une descente dans les méandres de la folie, de la noirceur de l'âme humaine.

Beau et glaçant...

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Pour l'un de ses tout premiers films (coréalisé avec Steno comme un bon paquet au début de sa carrière) Mario Monicelli respecte l'une des grandes traditions du cinéma italien : se servir du rire pour poser un regard très noir sur la société. Et lui pousse le procédé très loin, dissociant la comédie et le drame de manière frontale, réalisant quasiment deux films qui se répondraient sans pour autant beaucoup se croiser. D'un côté on frôle le boulevard de l'autre la tragédie est à l’œuvre.

Ce "Dans les coulisses" est pour le moins méconnu, et c'est profondément injuste car ce film est saisissant comme certains Pietrangeli.

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William Wyler aux manettes, sous sa caméra Montgomery Clift et surtout Olivia de Havilland dans ce qui restera probablement comme son plus grand rôle.

Romance cruelle, film de vengeance, "L'Héritière" est une œuvre complexe, qui use du changement de ton permanent pour perdre le spectateur. Déstabilisant, moderne, passionnant...

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Je m'aperçois que c'est le sixième western, sans parler des autres genres dans lesquels il m'a souvent régalé, de John Ford dont je dis du bien ici.

Et je ne lui avais jamais déclaré ma flamme ? Faute réparée, passe prendre l'apéro à la maison quand tu veux John, par contre un midi c'est préférable parce que le soir ça devient compliqué chez nous. A moins qu'on se fasse une toile ? Dans ce cas n'oublie pas ton masque, tes pop-corns parce que Roselyne est sympa, elle a dit qu'on pouvait s'en gaver pendant toute la projection si on voulait, mais dernière séance à 18h hein, et choisis pas un film trop long surtout. En même temps très rapidement y'en aura plus à l'affiche, y'aura même plus de films tout court, et bientôt plus de cinoches donc ce sera réglé. T'inquiète j't'expliquerai...

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Incroyable que ce René Clément soit si peu connu, alors qu'on y trouve pourtant en tête d'affiche le duo Michèle Morgan - Jean Marais. C'est de la romance contrariée, parfois retorse mais malgré tout très émouvante, et ce personnage de femme complexe est assez fascinant, surtout si on considère l'année de sortie du film, 1950, et encore davantage celle du roman dont il est l'adaptation, 1935.

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Chaque Ida Lupino est pour moi une révélation, et cette fois je découvre sa faculté à travailler la romance mélodramatique sans fard, en assumant totalement les codes du genre mais sans jamais tomber dans le moindre écueil.

Je m'aperçois aussi au fur et à mesure que si elle n'était pas une immense metteuse en scène, dans le sens où elle ne révolutionnait rien en la matière, elle compensait cela par une maitrise absolue des sujets (compliqués) qu'elle traitait et par une acuité incroyable à se frotter à la complexité de l'âme humaine, à son ambivalence.

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Poétique, puissant, insolent. En 1950 on pouvait donc regarder et montrer frontalement la sexualité, à méditer...

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Bernard Blier, Pierre Brasseur, Suzy Delair, Danièle Delorme, Edwige Feuillère, Yves Montand, François Périer, Gérard Philipe, on croise tout ce beau monde dans ce film à sketches méconnu de Christian-Jaque.

Par définition ce type de film est compliqué à aborder, d'autant plus ici quand un drame puissance 1000 vient semer le trouble au milieu des trois autres petits bonheurs de légèreté. Cette tragédie est d'ailleurs puissante, quant aux comédies romantiques qui ont en commun le thème de l'usurpation et du double, elles sont tout simplement délicieuses et donnent lieu à des numéros d'acteurs jouissifs.

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J'ai déjà été, et de loin, plus impressionné par du John Huston mais cela vient probablement du fait que les films noirs et moi ça fait souvent deux.

Après je ne vais pas mentir, je me suis progressivement bien fait avoir par cette atmosphère, par ce rythme, par cette mécanique fichtrement bien huilée, par l'élégance et la sophistication de l'ensemble.

Et puis voir une Marilyn dans l'un de ses premiers rôles ça ne se refuse pas.

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Probablement en raison de l'absence de grands noms au générique cet Edward Dmytryk reste injustement méconnu, et pourtant c'est un polar fichtrement bien foutu et non dénué d'humour. Un humour très noir, très anglais...

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Incroyable que la plupart des films de Luigi Zampa restent si inconnus et n'aient pas encore trouvé un distributeur de patrimoine pour leur donner enfin une première chance dans les salles françaises.

Car son cinéma est souvent étonnant et ne va pas forcément où on l'attend. Et ce "Cœurs sans frontières" en est une parfaite illustration car si le début nous fait penser qu'on pourrait se trouver chez "Don Camillo" la suite irait plutôt du côté du mélo à la Vittorio De Sica. La présence du petit Bruno du "Voleur de bicyclette" ne peut que renforcer cette impression, d'autant qu'ici non plus l'enfance n'est pas un tapis de roses. Dans un village montré comme le symbole de la folie de la guerre et de ses conséquences.

Et si vous étiez le huitième à noter cette rareté ?

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J'ai un peu le même problème avec la comédie musicale US 40-50's qu'avec le western, j'ai trop souvent l'impression de voir à quelques détails près le même film, au point de les confondre. Mais certaines parviennent, et je ne demande pas plus avec le genre, à me faire sourire, à faire de leur légèreté extatique une force en assumant leur côté naïf. Et c'est ce que j'ai trouvé ici, un film qui semble avoir été créé pour le sondage "Les films qui rendent heureux"...

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Voir un film d'Ida Lupino de nos jours permet de mesurer la place que cette femme, à la fois réalisatrice, actrice, scénariste et productrice, aurait mérité d'occuper dans la mémoire du cinéma américain et mondial.

Même si dans la forme elle n'a rien révolutionné, encore que la scène d'ouverture de cet "Outrage" est d'une grande modernité en terme de mise en scène, elle a abordé des sujets de société totalement tabous à l'époque. Ici c'est le viol qui est traité, en évitant soigneusement de prononcer une seule fois le mot, de manière frontale, non seulement l'acte mais aussi ses conséquences, mettant ainsi en accusation une société toute entière apte à montrer du doigt ou même à "tuer" une seconde fois la victime.

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John Ford signe là un film d'une modestie touchante, dénué de toute ambition spectaculaire. Sorte de relecture biblique de "Trois hommes et un couffin" dans le désert.

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Une romance mélodramatique sur fond d'architecture avec un Gary Cooper qui comme souvent et pour notre plus grand bonheur en fait des caisses, fallait oser, King Vidor l'a fait. Et c'est plutôt réussi, même si par instants le scénario est sévèrement emberlificoté et la musique de Max Steiner briseuse de tympans.

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"La Marie du port" est certes un Marcel Carné mineur, la faute à un scénario trop étroit, mais il prouve à quel point fut une époque où le cinéma était un art subversif sous ses apparences de classicisme, qui abordait de front les tabous dont la société refusait même d'entrevoir l'existence. Et puis il y a Gabin, et rien pour ça...

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Anatole Litvak a eu une drôle de carrière, trimbalant ses valises entre son pays natal, les USA, et la France. C'est chez lui qu'il signa ce "Raccrochez, c'est une erreur !", qu'il y filma Barbara Stanwyck et Burt Lancaster, qu'il offrit comme souvent avec lui un film qui ne fait pas dans la dentelle, poussant pour notre plus grand plaisir les curseurs du suspense à fond. Parfois confus, tordu, forcé mais surtout assez jouissif.