Recueils de nouvelles : les histoires les plus courtes sont les meilleures ?

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Celle du jeu de piste dans le métro, celle de l'autostoppeuse, celle du cou gracile... je pourrais continuer comme ça.

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Cortázar est un maître de ces ambiances placées dans une légère distorsion de la réalité. Ses mots, sa narration sont sensoriels tout en sachant nous laisser dans un léger brouillard qui se dissipe toujours au bon moment. "La nuit face au ciel", où le XXème siècle communique avec un temple aztèque, est ma préférée. Note pour plus tard : choper l'anthologie du monsieur, 1000 je-sais-pas-combien-de-pages qui doivent se bouffer comme un paquet de biscuits.

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Quelle prose ! Toute en méandres, avec un sens du petit détail qui en dit long. Riche jusqu'à l'emphase parfois, mais en restant toujours viscérale. Contraste entre la simplicité des vies évoquées et le tumulte des mots qui jaillit de la plume de Michon pour les raconter. Comme c'est souvent le cas dans les recueils de nouvelles, tout ne se vaut pas. Dans les meilleurs moments, Michon parvient à saisir l'essence d'un être dans ses petits riens et à lui donner par ses mots puissants une sorte d'ampleur universelle. L'ordinaire qui devient noble en quelque sorte. Je sors du livre impressionné, et assez curieux de lire l'auteur narrer des personnages plus "grands" et éventuellement plus à même de soutenir le poids de sa prose (Les Onze ?).

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Un court recueil comme introduction à Cesare Pavese. Joli mélange de sensibilité et de tripes dans la plume, ça m'a plu. Au petit jeu des points communs entre les trois nouvelles, on pourrait parler d'une fièvre contenue, d'hommes tourmentés qui songent à un "ailleurs" géographique ou symbolique, qui repensent avec amertume à de mauvais coups du sort ou de mauvais choix personnels. Assez touchant donc mais dans un genre noir et désanchanté, donc je ne conseillerais pas cette lecture avant d'écouter un solo de Thom Yorke ou après avoir vu un film d'Haneke.

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Je ne réécrirais pas ma critique de la même manière aujourd'hui, même si j'assume certains petits reproches. Quelques nouvelles vont un peu loin dans une préciosité intellectuelle qui ne m'embarque pas, mais par contre les sommets du recueil sont vraiment des sommets, et il y a alors dans ces quelques pages là une ampleur qui résonne dans l'esprit du lecteur des années après. J'aime beaucoup le parfum d'infini présent dans "Les ruines circulaires", "L'approche d'Almotasim" ou "Le jardin aux sentiers qui bifurquent" (quels titres en plus de ça !), tout comme certains récits peut-être moins ambitieux, plus épurés, dans le seconde partie du recueil.

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Peut-être un poil moins savant et érudit que Fictions, mais l'imaginaire fonctionne toujours très bien et ça se relit aussi avec beaucoup de plaisir. De mémoire je retiens en premier le vertige de la nouvelle-titre, celui d'un autre genre dans "Le double", les personnages féminins furtifs qui pourtant marquent à vie les narrateurs dans "Ulrica" et "La nuit des dons", et aussi la nouvelle lovecraftienne que Borges dénigre dans sa préface mais que je trouve brillante d'angoisse avec trois fois rien.

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Une ville est au cœur du récit, c'est le Prague fantasmagorique du 16ème siècle, parsemé de présages et de prophéties. Prague, ses ruelles et ses pavés, son pont de pierre qui relie le château royal et la noblesse à la vieille ville et son quartier juif. Leo Perutz se sert d'une écriture sobre et agréable pour conter ces 14 nouvelles qui communiquent entre elles, petite et grande histoire entremêlées, avant que le puzzle ne soit entièrement reconstitué dans un bel épilogue. Quant au sujet fondamental du recueil, ce dont il nous parle au delà de chaque intrigue qui le compose, ce serait peut-être le caractère éphémère des choses - amours, richesses, royaumes - et l'inéluctable poussière qu'elles redeviendront.

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L'univers de Flannery O'Connor n'est pas foisonnant - toujours la Géorgie rurale, la middle-class et ses employés - mais il se suffit à lui-même. Des gens sans histoire, leurs idées reçues, leur bien-pensance, leur égoïsme... puis quelques spécimens minables mais bien réels eux aussi. C'est une nouvelliste née car son écriture dense et resserrée sait exprimer avec précision la quintessence des choses. De quelques mots, silences ou regards peuvent naître la sensation de menace et de malaise, avant que la situation ne bascule totalement. Et c'est alors souvent cruel, trivial aussi parfois, bien moins pour une morale qui ferait tomber un châtiment sur la tête des victimes que pour témoigner d'une réalité crue et peu reluisante, sans naïveté ni coquetterie.

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Onze courtes nouvelles sans gras superflu, difficiles à décrire mais drôlement attachantes, contées par un marginal du Midwest qui ne sait pas toujours où il se trouve ni où il va, l'alcool et l'héro n'étant pas les GPS les plus précis qui soient. Ce ne sont pas des histoires nettes et précises avec un début, un milieu et une fin, plutôt des vignettes où les souvenirs se mélangent, dans un concentré d'humanité et de détachement à la fois.

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Un recueil ancré dans le Jalisco mexicain des années 20, en pleine guerre civile entre l'Etat nouvellement laïc et les cristeros, rebelles chrétiens opposés au projet. Un mot qui résumerait l'ensemble : âpre. Les terres sont mauvaises, les paysans pauvres, les personnages frôlent la mort ou provoquent celle des autres. L'atmosphère rappelle un peu celle que je connais de l'œuvre de Cormac McCarthy, par sa noirceur désenchantée et ce cadre de terres brûlées par le soleil. Avec une plume plus sobre tout de même, même si celle de Juan Rulfo ne manque pas d'intensité.

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Des nouvelles qui distillent de l'étrange et du fantastique sans effets spectaculaires, mais dans un léger décalage avec la réalité du quotidien. Au point de parfois jouer sur l'ambiguité entre ce qui est véridique et ce qui relève des "fantasmes" des personnages. L'écriture de Mélanie Fazi est sensitive, avec les obsessions et les phobies comme matière première, et lui permet de poser une ambiance forte avec quelques éléments seulement, dans des cadres toujours imaginatifs et variés.

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Nouvelles incisives et psychologiques à la fois, entre un juge devenant gaucho sur le tard, une souris flic qui enquête dans les égoûts, un écrivain et son plagiaire... Difficile d'établir des points communs mais à chaque fois le personnage central est en quête de quelque chose ou de quelqu'un, qu'il devra trouver seul, sans soutien solide. Les histoires se terminent souvent en suspens, sans que Bolaño ne ressente le besoin de bien boucler les boucles. Le monde intérieur de ces personnages est bousculé et on assiste aux premiers soubresauts, la suite importe moins. Deux mini essais en fin de recueil, dont l'évocation par Bolaño de sa propre maladie.

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Ce qui compte ici c'est surtout le ton du narrateur, futé et dilettante, avec des pointes acerbes pour épicer le tout. Le ton d'un jeune americano-dominicain qui croque des épisodes de sa vie dans le désordre, entre enfance caraïbe et grisaille du New Jersey, pièges du monde extérieur et famille pas vraiment cocon protecteur (sauf à considérer que visiter sa maîtresse en emmenant son fiston est un acte paternel conseillé par tous les pédiatres). Un narrateur qui reste un peu insaisissable, mais qui n'a pas besoin de beaucoup de mots pour nous immerger dans ces vignettes.

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"Patriotisme" et son récit d'un seppuku est un sommet de tension, entre le bouillonnement des idéaux et l'esprit inflexible de l'homme calme et résolu. A lire l'estomac bien accroché, c'est le cas de le dire. "Les sept ponts", qui décrit l'angoisse feutrée et grandissante au cours d'un rituel de geishas, est très bien aussi.

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Surtout pour l'excellente "Figures infernales", qui raconte la folie obsessionnelle d'un peintre envers sa nouvelle toile, qui doit devenir son chef d'œuvre absolu.

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Lu il y a bien longtemps, donc la note importe peu. J'en garde un bon souvenir en tout cas, celui d'une ambiance néoréaliste avec de fréquentes touches de poésie.

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Dans ce recueil ci l'atmosphère globale et les points de départ sont plutôt bons, dans une veine littérature de l'imaginaire, mais les récits ont du mal à prendre de l'ampleur. C'est toute la difficulté de la nouvelle j'imagine, arriver en quelques pages à dépasser le simple concept ou l'anecdote pour créer une histoire à part entière. Ici l'écriture assez classique n'aide pas à élever le sujet, et on en reste surtout à des décors ou des situations insolites qui ne "vivent" pas assez.

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Le titre n'est pas à prendre au sens de "maléfiques". Ce que ces femmes ont en commun c'est plutôt un caractère puissant, entier, radical, et il y a toujours de l'admiration pour elles dans la voix des différents narrateurs. Barbey d'Aurevilly est un conteur très habile, dont les récits enchassés naviguent toujours entre l'histoire elle-même et le moment, le contexte dans lequel celle-ci est racontée. D'où un jeu de digressions bien troussées, d'alternance de pics et de pauses jusqu'au dénouement. Avec ce fameux parfum de décadence, de dandysme et de symbolisme érudit qui infuse chaque texte et donne son unité de ton au recueil.

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Cinq nouvelles de 100 pages chacunes, ce Shepard est généreux et aime développer ses univers. Il y en a pour tous les goûts : du néo-noir, du lovecraftien, du réaliste-étrange façon The Leftovers, du space opera... avec comme premiers rôles des variantes de la figure du marginal protecteur. Chaque histoire démarre dans son genre littéraire assigné, avant de se nourrir d'une sève fantastique qui va aller crescendo et redéfinir l'intrigue. Inégal car ce recueil est une sélection de récits écrits à plusieurs années d'intervalle, mais Shepard a le mérite d'une certaine ambition dans l'écriture et s'en sort plutôt bien de côté là, à quelques passages ampoulés près.

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Carver puise ses bouts d'histoire dans la banalité du quotidien, celle des problèmes de couple et des défauts universels, sans volonté d'en faire ressortir une paradoxale beauté cachée. Aucune lumière ne jaillit, aucune noirceur exagérée non plus cela dit. Ce qui suinte de ces êtres maussades et résignés, c'est une sorte de véracité crue, inconfortable, dans laquelle Carver parvient malgré tout à distiller de la compassion. Elle est pudique, absolument pas démonstrative, et pourtant on la devine. Après, je n'ai pas trouvé ça non plus à la hauteur de l'immense réputation du bonhomme.

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DFW varie les registres, s'essaie même au pastiche, donnant parfois l'impression de lire un recueil écrit par plusieurs auteurs. Le liant c'est cet esprit brillant, ce recul sur les choses, déjà palpables dès cette œuvre de jeunesse. J'ai beaucoup aimé "John Billy" et "Lyndon", où la figure d'un homme mythique nous est racontée par des tiers. L'histoire autour de Jeopardy arrive à créer de l'émotion dans ce cadre en toc de jeu TV, une belle réussite également. Mention aussi à "Ici et là-bas" et sa mélancolie subtile. En fait, ce sont les nouvelles où j'ai senti la plume réellement en empathie avec ses personnages, où le ton distancié révèle malgré tout l'intime. D'autres textes m'ont moins emballé, ceux dans lesquels DFW m'a paru un peu trop conscient de ses effets, à des fins d'exercice de style. La longue nouvelle méta, censée être l'apothéose, m'a finalement assez gonflé malgré ses indéniables étincelles.