Cover Théâtre à lire et relire, voire à voir et revoir

Liste de

19 livres

créee il y a plus de 7 ans · modifiée il y a environ 6 ans

Hamlet
8.2

Hamlet (1603)

(traduction Jean-Michel Déprats)

The Tragedy of Hamlet, Prince of Denmark

Sortie : 2002 (France). Théâtre

livre de William Shakespeare

Step de Boisse a mis 10/10.

Annotation :

La réplique culte
Acte 3, scène 1

Être ou bien n'être pas, voilà la question.
Est-il plus noble en notre for de supporter
Les traits dont nous meurtrit l'outrageuse Fortune,
Ou bien de s'insurger contre une mer d'ennuis
De lutter et d'en triompher ? Mourir, dormir,
Pas davantage, et, par un sommeil mettre fin
Aux maux du cœur, aux mille atteintes naturelles,
Le lot de toute chair, c'est là un dénouement
À souhaiter de tout son cœur. Mourir, dormir,
Dormir ; rêver peut-être: oui, c'est là qu'est le hic ;
En ce dernier sommeil quels rêves l'on peut faire,
Lorsqu'on s'est échappé de l'humaine bagarre,
Voilà qui doit nous faire hésiter: c'est le doute
Qui fait que l'infortune a si longue la vie.

L'Avare
7.1

L'Avare (1668)

Sortie : 1668 (France). Théâtre

livre de Molière

Step de Boisse a mis 8/10.

Annotation :

Le vol de la cassette
Acte 4, scène 7

Harpagon
Il crie au voleur dès le jardin, et vient sans chapeau. Au voleur ! au voleur ! à l'assassin ! au meurtrier ! Justice, juste ciel ! Je suis perdu, je suis assassiné ! On m'a coupé la gorge, on m'a dérobé mon argent ! Qui peut-ce être ? Qu'est-il devenu ? Où est-il ? Où se cache-t-il ? Que ferai-je pour le trouver ? Où courir ? Où ne pas courir ? N'est-il point là ? n'est-il point ici ? Qui est-ce ? Arrête ! Rends-moi mon argent, coquin !... (Il se prend lui-même le bras.) Ah ! c'est moi. Mon esprit est troublé, et j'ignore où je suis, qui je suis, et ce que je fais. Hélas ! mon pauvre argent, mon pauvre argent, mon cher ami, on m'a privé de toi ; et, puisque tu m'es enlevé, j'ai perdu mon support, ma consolation, ma joie ; tout est fini pour moi, et je n'ai plus que faire au monde : sans toi, il m'est impossible de vivre. C'en est fait, je n'en puis plus ; je me meurs, je suis mort, je suis enterré. N'y a-t-il personne qui veuille me ressusciter, en me rendant mon cher argent, ou en m'apprenant qui l'a pris ? Euh ? que dites-vous ? Ce n'est personne. Il faut, qui que ce soit qui ait fait le coup, qu'avec beaucoup de soin on ait épié l'heure ; et l'on a choisi justement le temps que je parlais à mon traître de fils. Sortons. Je veux aller quérir la justice, et faire donner la question à toute ma maison : à servantes, à valets, à fils, à fille, et à moi aussi. Que de gens assemblés ! Je ne jette mes regards sur personne qui ne me donne des soupçons, et tout me semble mon voleur. Eh ! de quoi est-ce qu'on parle là ? De celui qui m'a dérobé ? Quel bruit fait-on là-haut ? Est-ce mon voleur qui y est ? De grâce, si l'on sait des nouvelles de mon voleur, je supplie que l'on m'en dise. N'est-il point caché là parmi vous ? Ils me regardent tous et se mettent à rire. Vous verrez qu'ils ont part, sans doute, au vol que l'on m'a fait. Allons, vite, des commissaires, des archers, des prévôts, des juges, des gênes, des potences et des bourreaux. Je veux faire pendre tout le monde ; et, si je ne retrouve mon argent, je me pendrai moi-même après.

Le Cid
7.4

Le Cid (1637)

Sortie : 1637 (France). Théâtre

livre de Pierre Corneille

Step de Boisse a mis 9/10.

Annotation :

Acte 1 , Scène 4

Don Diègue
Ô rage ! ô désespoir ! ô viellesse ennemie !
N'ai-je donc tant vécu que pour cette infamie ?
Et ne suis-je blanchi dans les travaux guerriers
Que pour voir en un jour flétrir tant de lauriers ?
Mon bras qu'avec respect tout l'Espagne admire,
Mon bras, qui tant de fois a sauvé cet empire,
Tant de fois affermi le trône de son roi,
Trahit donc ma querelle, et ne fait rien pour moi ?
Ô cruel souvenir de ma gloire passée !
Oeuvre de tant de jours en un jour effacée !
Nouvelle dignité fatale à mon bonheur !
Précipice élevé d'où tombe mon honneur !
Faut-il de votre éclat voir triompher Le Comte,
Et mourir sans vengeance, ou vivre dans la honte ?
Comte, sois de mon prince à présent gouverneur ;
Ce haut rang n'admet point un homme sans honneur ;
Et ton jaloux orgueil par cet affront insigne
Malgré le choix du roi, m'en a su rendre indigne.
Et toi, de mes exploits glorieux instrument,
Mais d'un corps tout de glace inutile ornement,
Fer, jadis tant à craindre, et qui, dans cette offense,
M'as servi de parade, et non pas de défense,
Va, quitte désormais le derniers des humains,
Passe, pour me venger, en de meilleurs mains.

L'Alouette
7.4

L'Alouette (1953)

Sortie : 15 octobre 1953. Théâtre

livre de Jean Anouilh

Step de Boisse a mis 8/10.

Annotation :

"Il n'y a que les imbéciles qui se croient volés en donnant trop à une fille."

"La propagande est une chose sommaire, Seigneur Evêque, apprenez-le. L'essentiel est de dire quelque chose de très gros et de le répéter souvent, c'est comme cela qu'on fait une vérité. Je vous dis là une idée neuve, mais je suis persuadé qu'elle fera son chemin".

Phèdre
7.6

Phèdre (1677)

Sortie : 1677 (France). Théâtre, Romance

livre de Jean Racine

Step de Boisse a mis 8/10.

Annotation :

Acre 2, scène 5

Phèdre
Quand vous me haïriez, je ne m'en plaindrais pas,
Seigneur. Vous m'avez vue attachée à vous nuire ;
Dans le fond de mon cœur vous ne pouviez pas lire.
A votre inimitié j'ai pris soin de m'offrir ;
Aux bords que j'habitais je n'ai pu vous souffrir ;
En public, en secret, contre vous déclarée,
J'ai voulu par des mers en être séparée ;
J'ai même défendu, par une expresse loi,
Qu'on osât prononcer votre nom devant moi.
Si pourtant à l'offense on mesure la peine,
Si la haine peut seule attirer votre haine,
Jamais femme ne fut plus digne de pitié,
Et moins digne, Seigneur, de votre inimitié.

Dialogues des Carmélites
7.9

Dialogues des Carmélites (1949)

Sortie : 1949 (France). Théâtre

livre de Georges Bernanos

Step de Boisse a mis 10/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Tout petit extrait

"On ne meurt pas chacun pour soi, mais les uns pour les autres, ou même les uns à la place des autres, qui sait?"

La Reine morte
7.6

La Reine morte (1942)

Sortie : 1942 (France). Théâtre

livre de Henry de Montherlant

Step de Boisse a mis 8/10.

Annotation :

"Ferrante : Dona Inès, je suis prêt à donner aux sentiments humains la part qui leur est due. Mais non davantage. Encore une fois, ne me forcez pas à vous soutenir le point de vue de l'État, qui serait fastidieux pour vous. (La menant vers la fenêtre) Regardez : la route, la carriole avec sa mule, les porteurs d'olives, — c'est moi qui maintiens tout cela. J'ai ma couronne, j'ai ma terre, j'ai ce peu­ple que Dieu m'a confié, j'ai des centaines et des centaines de milliers de corps et d'âmes. Je suis comme un grand arbre qui doit faire de l'ombre à des centaines de milliers d'êtres. Et tout cela demande que ce mariage se fasse, qui sert merveilleusement ma politique. Don Pedro a eu un non brutal, et il a eu la folie de le dire même à l'Infante. Mais ce n'est là qu'un premier mouvement, sur lequel je veux qu'il revienne. À vous de l'y aider. Vous n'avez pas à prendre ombrage de ses sentiments pour l'Infante : entre eux, il n'est pas question d'amour. Et vous satisferez votre roi, qui incline vers la tombe, et a besoin que ses affaires soient en ordre. Faites-le donc, sous peine de mon déplaisir, et vous souvenant que toute adhé­sion qu'on me donne agrandit celui qui me la donne.

Inès : Seigneur, le voudrais-je, je ne pourrais dénouer ce que Dieu a noué."

Les Femmes savantes
6.9

Les Femmes savantes (1672)

Sortie : 1672 (France). Théâtre, Romance

livre de Molière

Step de Boisse a mis 7/10.

Annotation :

Acte 1, scène 1

Armande
Mon Dieu, que votre esprit est d’un étage bas !
Que vous jouez au monde un petit personnage,
De vous claquemurer aux choses du ménage,
Et de n’entrevoir point de plaisirs plus touchants,
Qu’un idole d’époux, et des marmots d’enfants !
Laissez aux gens grossiers, aux personnes vulgaires,
Les bas amusements de ces sortes d’affaires.
À de plus hauts objets élevez vos désirs,
Songez à prendre un goût des plus nobles plaisirs,
Et traitant de mépris les sens et la matière,
À l’esprit comme nous donnez-vous toute entière :
Vous avez notre mère en exemple à vos yeux,
Que du nom de savante on honore en tous lieux,
Tâchez ainsi que moi de vous montrer sa fille,
Aspirez aux clartés qui sont dans la famille,
Et vous rendez sensible aux charmantes douceurs
Que l’amour de l’étude épanche dans les cœurs :
Loin d’être aux lois d’un homme en esclave asservie ;
Mariez-vous, ma sœur, à la philosophie,
Qui nous monte au-dessus de tout le genre humain,
Et donne à la raison l’empire souverain,
Soumettant à ses lois la partie animale
Dont l’appétit grossier aux bêtes nous ravale.
Ce sont là les beaux feux, les doux attachements,
Qui doivent de la vie occuper les moments ;
Et les soins où je vois tant de femmes sensibles,
Me paraissent aux yeux des pauvretés horribles.

Topaze
7.3

Topaze (1928)

Sortie : 1928 (France). Théâtre

livre de Marcel Pagnol

Step de Boisse a mis 8/10.

Annotation :

Première scène

Topaze
Des moutons... Des moutons... étaient en sûreté... dans un parc; dans un parc. (Il se penche sur l'épaule de l’Élèveet reprend.) Des moutons... moutonss... (L’Élève le regarde ahuri.) Voyons, mon enfant, faites un effort. Je dis moutonsse. Etaient (il reprend avec finesse) étai-eunnt. C'est-à-dire qu'il n'y avait pas qu'un moutonne. Il y avait plusieurs moutonsse.


(...)

Tamise
Alors, vous avez choisi un bouc émissaire, un pauvre enfant qui paie pour tous les autres?

Panicault (choqué). Ah! permettez! Duhamel, c'est pour la musique seulement. En cas de boules puantes, je punis le jeune Trambouze. Quand ils ont bouché le tuyau de poêle avec un chiffon, c'est Jusserand qui passa à la porte. Et si je trouve un jour de la colle sur ma chaise, ce sera tant pis pour les frères Gisher!

Topaze
Mais c'est un véritable système !

Panicault
Parfaitement. Chacun sa responsabilité. Et ça n'est pas si injuste que ça peut en avoir l'air; parce que, voyez-vous, un élève qui a une tête à boucher le tuyau du poêlе, il est absolument certain qu’il le bouchera et, neuf fois sur dix, c'est lui qui l'aura bouché.

Topaze
Mais la dixième fois?

Panicault (avec noblesse)
Erreur judiciaire, qui renforce mon autorité. Quand on doit diriger des enfants ou des hommes, il faut de temps en temps commettre une belle injustice, bien nette, bien criante: c'est ça qui leur en impose le plus!

Le Visiteur
7.4

Le Visiteur

Sortie : 1993 (France). Théâtre

livre de Eric-Emmanuel Schmitt

Step de Boisse a mis 8/10.

Annotation :

Freud
Faites un miracle.

L’inconnu
Vous plaisantez ?

Freud
Faites un miracle !

L’inconnu (éclatant de rire)
Freud, le docteur Freud, un des plus grands esprits du siècle et de l’humanité, le docteur Freud me demande un miracle... Comment voudriez-vous que je me change, cher ami, en chacal, en soleil, en vache, en Zeus sur son fauteuil de nuages, en Christ sanguinolent au bout d’un pieu ou bien en Vierge Marie au fond de la grotte ? Je croyais devoir réserver mes miracles aux imbéciles...

Freud (furieux)
Les imbéciles voient des miracles partout, tandis que l’on n’abuse pas un savant. Il est vraiment dommage que Dieu n’ait jamais opéré un miracle en Sorbonne ou en laboratoire.

L’inconnu (sarcastique)
Le miracle serait que vous me croyiez.

Knock
7.2

Knock (1923)

ou le Triomphe de la médecine

Sortie : 1923 (France). Théâtre

livre de Jules Romains

Step de Boisse a mis 8/10.

Annotation :

Acte 2, scène 2, Knock et La dame en noir

- Ah ! voici les consultants. (A la cantonade.) Une douzaine, déjà ? Prévenez les nouveaux arrivants qu'après onze heures et demie je ne puis plus recevoir personne, au moins en consultation gratuite. C'est vous qui êtes la première, madame ? (Il fait entrer la dame en noir et referme la porte.) Vous êtes bien du canton ?
- Je suis de la commune.
- De Saint-Maurice même ?
- J'habite la grande ferme qui est sur la route de Luchère.
- Elle vous appartient?
- Oui, à mon mari et à moi
- Si vous l'exploitez vous-même, vous devez avoir beaucoup de travail ?
- Pensez, monsieur ! dix-huit vaches, deux boeufs, deux taureaux, la jument et le poulain, six chèvres, une bonne douzaine de cochons, sans compter la basse-cour.
- Diable ! Vous n'avez pas de domestiques ?
- Dame si. Trois valets, une servante, et les journaliers dans la belle saison.
Je vous plains. Il ne doit guère vous rester de temps pour vous soigner?
- Oh! non.
- Et pourtant vous souffrez.
- Ce n'est pas le mot. J'ai plutôt de la fatigue.
- Oui, vous appelez ça de la fatigue. (Il s'approche d'elle.) Tirez la langue. Vous ne devez pas avoir beaucoup d'appétit.
- Non.
- Vous êtes constipée.
- Oui, assez.
- Il l'ausculte. Baissez la tête. Respirez. Toussez. Vous n'êtes jamais tombée d'une échelle, étant petite ?
- Je ne me souviens pas.
- Il lui palpe et lui percute le dos, lui presse brusquement les reins.
Vous n'avez jamais mal ici le soir en vous couchant ? Une espèce de courbature ?
- Oui, des fois.
- Il continue de l'ausculter. Essayez de vous rappeler. Ça devait être une grande échelle.
- Ça se peut bien.
- Très affirmatif. C'était une échelle d'environ trois mètres cinquante, posée contre un mur. Vous êtes tombée à la renverse. C'est la fesse gauche, heureusement, qui a porté.
- Ah oui !
- Vous aviez déjà consulté le docteur Parpalaid ?
- Non, jamais.
- Pourquoi ?
- Il ne donnait pas de consultations gratuites.
- Un silence.
- Il la fait asseoir. Vous vous rendez compte de votre état ?
- Non.
- Il s'assied en face d'elle. Tant mieux. Vous avez envie de guérir, ou vous n'avez pas envie ?
- J'ai envie.
- J'aime mieux vous prévenir tout de suite que ce sera très long et très coûteux.
- Ah! mon Dieu! Et pourquoi ça ?
- Parce qu'on ne guérit pas en cinq minutes un mal qu'on traîne depuis quarante ans.
- Depuis quarante ans ?
- Oui, depuis que vous êtes tombée de votre échelle.
- Et combien que ça me coûterait ?

Cyrano de Bergerac
8.2

Cyrano de Bergerac (1897)

Sortie : 1897 (France). Théâtre

livre de Edmond Rostand

Step de Boisse a mis 10/10.

Annotation :

Cyrano
Ah ! non ! c'est un peu court, jeune homme !
On pouvait dire... Oh ! Dieu !... Bien des choses en somme.
En variant le ton, -par exemple, tenez :
Agressif : "Moi, monsieur, si j'avais un tel nez
Il faudrait sur-le-champ que je l'amputasse !"
Amical : "Mais il doit tremper dans votre tasse :
Pour boire, faites-vous fabriquer un Hanape !"
Descriptif : "C'est un roc!... C'est un pic!... C'est un cap!...
Que dis-je, c'est un cap?... C'est une péninsule!"
Curieux : "De quoi sert cette oblongue capsule ?
D'écritoire, monsieur, ou de boîte à ciseaux ?"
Gracieux : "Aimez-vous à ce point les oiseaux
Que paternellement vous vous préoccupâtes
De tendre ce perchoir à leurs petites pattes?"
Truculent : "Ca, monsieur, lorsque vous pétunez,
La vapeur du tabac vous sort-elle du nez
Sans qu'un voisin ne crie au feu de cheminée ?"
Prévenant : "Gardez-vous, votre tête entraînée
Par ce poids, de tomber en avant sur le sol !"
Tendre : "Faites-lui faire un petit parasol
De peur que sa couleur au soleil ne se fane !"
Pédant : "L'animal seul, monsieur, qu'Aristophane
Appelle Hippocampéléphantocamélos
Dut avoir sous le front tant de chair sur tant d'os !"
Cavalier : "Quoi, l'ami, ce croc est à la mode?
Pour pendre son chapeau, c'est vraiment très commode !"
Emphatique : "Aucun vent ne peut, nez magistral,
T'enrhumer tout entier, excepté le mistral !"
Dramatique : "C'est la mer Rouge quand il saigne !"
Admiratif : "Pour un parfumeur, qu'elle enseigne !"
Lyrique : "Est-ce une conque, êtes-vous un triton ?"
Naïf : "Ce monument, quand le visite-t-on ?"
Respectueux : "Souffrez, monsieur, qu'on vous salue,
C'est là ce qui s'appelle avoir pignon sur rue !"
Campagnard : "Hé, ardé ! C'est-y un nez ? Nanain !
c'est queuqu'navet géant ou ben queuqu'melon nain !"
Militaire : "Pointez contre cavalerie !"
Pratique : "Voulez-vous le mettre en loterie ?
Assurément, monsieur, ce sera le gros lot !"
Enfin parodiant Pyrame en un sanglot:
"Le voilà donc ce nez qui des traits de son maître
A détruit l'harmonie ! Il en rougit, le traître !"
- Voila ce qu'à peu près, mon cher, vous m'auriez dit
Si vous aviez un peu de lettres et d'esprit :
Mais d'esprit, ô le plus lamentable des êtres,
Vous n'en eûtes jamais un atome, et de lettre
Vous n'avez que les trois qui forment le mot : sot !
Eussiez vous eu, d'ailleurs, l'invention qu'il faut
Pour pouvoir là, devant ces nobles galeries,
Me servir toutes ces folles plaisanteries,
Que vous n'en eussiez pas articulé le quart
De la moitié du commencement d'un

La guerre de Troie n'aura pas lieu
7.2

La guerre de Troie n'aura pas lieu (1935)

Sortie : 1935 (France). Théâtre

livre de Jean Giraudoux

Step de Boisse a mis 9/10.

Annotation :

Acte 2, scène 5

Hector
Ô vous qui ne nous entendez pas, qui ne nous voyez pas, écoutez ces paroles, voyez ce cortège. Nous sommes les vainqueurs. Cela vous est bien égal, n’est-ce pas ? Vous aussi vous l’êtes. Mais, nous, nous sommes les vainqueurs vivants. C’est ici que commence la différence. C’est ici que j’ai honte. Je ne sais si dans la foule des morts on distingue les morts vainqueurs par une cocarde. Les vivants, vainqueurs ou non, ont la vraie cocarde, la double cocarde. Ce sont leurs yeux. Nous, nous avons deux yeux, mes pauvres amis. Nous voyons le soleil. Nous faisons tout ce qui se fait dans le soleil. Nous mangeons. Nous buvons… Et dans le clair de lune !…. Nous couchons avec nos femmes… Avec les vôtres aussi…

Demokos
Tu insultes les morts, maintenant ?

Hector
Vraiment, tu crois ?

Demokos
Ou les morts, ou les vivants.

Hector
Il y a une distinction…

Priam
Achève, Hector… Les Grecs débarquent…

Hector
J’achève… Ô vous qui ne sentez pas, qui ne touchez pas, respirez cet encens, touchez ces offrandes. Puisque enfin c’est un général sincère qui vous parle, apprenez que je n’ai pas une tendresse égale, un respect égal pour vous tous. Tout morts que vous êtes, il y a chez vous la même proportion de braves et de peureux que chez nous qui avons survécu et vous ne me ferez pas confondre, à la faveur d’une cérémonie, les morts que j’admire avec les morts que je n’admire pas. Mais ce que j’ai à vous dire aujourd’hui, c’est que la guerre me semble la recette la plus sordide et la plus hypocrite pour égaliser les humains et que je n’admets pas plus la mort comme expiation au lâche que comme récompense aux héros. Aussi, qui que vous soyez, vous absents, vous inexistants, vous oubliés, vous sans occupation, sans repos, sans être, je comprends en effet qu’il faille en fermant ces portes excuser près de vous ces déserteurs que sont les survivants, et ressentir comme un privilège et un vol ces deux biens qui s’appellent, de deux noms dont j’espère que la résonance ne vous atteint jamais, la chaleur et le ciel.

Lorenzaccio
7.3

Lorenzaccio (1834)

Sortie : 1834 (France). Théâtre

livre de Alfred de Musset

Step de Boisse a mis 8/10.

Annotation :

Acte 3, scène 3

Lorenzo.
Suis-je un Satan ? Lumière du Ciel ! je m’en souviens encore, j’aurais pleuré avec la première fille que j’ai séduite si elle ne s’était mise à rire. Quand j’ai commencé à jouer mon rôle de Brutus moderne, je marchais dans mes habits neufs de la grande confrérie du vice comme un enfant de dix ans dans l’armure d’un géant de la fable. Je croyais que la corruption était un stigmate, et que les monstres seuls le portaient au front. J’avais commencé à dire tout haut que mes vingt années de vertu étaient un masque étouffant ; ô Philippe ! j’entrai alors dans la vie, et je vis qu’à mon approche tout le monde en faisait autant que moi ; tous les masques tombaient devant mon regard ; l’humanité souleva sa robe, et me montra, comme à un adepte digne d’elle, sa monstrueuse nudité. J’ai vu les hommes tels qu’ils sont, et je me suis dit : Pour qui est-ce donc que je travaille ? Lorsque je parcourais les rues de Florence, avec mon fantôme à mes côtés, je regardais autour de moi, je cherchais les visages qui me donnaient du cœur, et je me demandais : Quand j’aurai fait mon coup, celui-là en profitera-t-il ? J’ai vu les républicains dans leurs cabinets ; je suis entré dans les boutiques ; j’ai écouté et j’ai guetté. J’ai recueilli les discours des gens du peuple ; j’ai vu l’effet que produisait sur eux la tyrannie ; j’ai bu dans les banquets patriotiques le vin qui engendre la métaphore et la prosopopée ; j’ai avalé entre deux baisers les armes les plus vertueuses ; j’attendais toujours que l’humanité me laissât voir sur sa face quelque chose d’honnête. J’observais comme un amant observe sa fiancée en attendant le jour des noces.

Philippe.
Si tu n’as vu que le mal, je te plains, mais je ne puis te croire. Le mal existe, mais non pas sans le bien ; comme l’ombre existe, mais non sans la lumière.

Lorenzo.
Tu ne veux voir en moi qu’un mépriseur d’hommes : c’est me faire injure. Je sais parfaitement qu’il y en a de bons ; mais à quoi servent-ils ? que font-ils ? comment agissent-ils ? Qu’importe que la conscience soit vivante, si le bras est mort ? Il y a de certains côtés par où tout devient bon : un chien est un ami fidèle ; on peut trouver en lui le meilleur des serviteurs, comme on peut voir aussi qu’il se roule sur les cadavres et que la langue avec laquelle il lèche son maître sent la charogne d’une lieue. Tout ce que j’ai à voir, moi, c’est que je suis perdu, et que les hommes n’en profiteront pas plus qu’ils ne me comprendront.

Partage de midi
6.9

Partage de midi (1905)

Sortie : 1905 (France). Théâtre

livre de Paul Claudel

Step de Boisse a mis 7/10.

Annotation :


Mesa
Ah ! Je sais maintenant !
Ce que c’est que l’amour ! Et je sais ce que vous avez enduré sur votre croix, dans ton Cœur,
Si vous avez aimé chacun de nous
Terriblement comme j’ai aimé cette femme, et le râle, et l’asphyxie, et l’étau !
Mais je l’aimais, Ô mon Dieu, et elle m’a fait cela ! Je l’aimais et je n’ai point peur de Vous,
Et au-dessus de l’amour
Il n’y a rien, et pas Vous-même ! et Vous avez vu de quelle soif, Ô Dieu, et grincement de dents,
Et sécheresse, et horreur et extraction,
Je m’étais saisi d’elle ! Et elle m’a fait cela !
Ah ! Vous y connaissez, Vous savez, Vous,
Ce que c’est que l’amour trahi ! Ah, je n’ai point peur de Vous !
Mon crime est grand et mon amour est plus grand, et votre mort seule, ô mon Père,
La mort que Vous m’accordez, la mort seule est à la mesure de nous deux !
Mourons donc et sortons de ce corps misérable !
Sortons, mon âme, et d’un seul coup éclatons cette détestable carcasse !
La voici déjà à demi rompue, habillée comme une viande au croc, par terre ainsi qu’un fruit entamé.
Est-ce que c’est moi ? Cela de cassé,
C’est l’œuvre de la femme, qu’elle le garde pour elle, et pour moi je m’en vais ailleurs.
Déjà elle m’avait détruit le monde et rien pour moi
N’existait qui ne fût pas elle et maintenant elle me détruit moi-même.

Huis clos
7.7

Huis clos (1945)

Sortie : 1945 (France). Théâtre

livre de Jean-Paul Sartre

Step de Boisse a mis 8/10.

Annotation :

Scène 5

Garcin
Le bronze…(il le caresse) Eh bien voici le moment. Le bronze est là, je le contemple et je comprends que je suis en enfer. Ils avaient prévu que je me tiendrais devant cette cheminée, pressant ma main sur ce bronze, avec tous ces regards sur moi. Tous ces regards qui me mangent…(Il se retourne brusquement). Ha ! Vous n’êtes que deux ? Je vous croyais beaucoup plus nombreuses. (Il rit). Alors c’est ça l’enfer je n’aurais jamais cru… Vous vous rappelez : le soufre, le bûcher, le gril… Ah! Quelle plaisanterie. Pas besoin de gril, l’enfer c’est les Autres.

Ne réveillez pas Madame...
8

Ne réveillez pas Madame... (1970)

Sortie : 24 octobre 1970. Théâtre

livre de Jean Anouilh

Step de Boisse a mis 8/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Julien
J’ai généralement assez bonne conscience mais, tout de même, je finis par me demander s’il n’y pas là davantage qu’une coïncidence.
(...)

Tonton
Au fond elles (les femmes) ont plus de courage et de logique que nous. Le vrai principe de vie, du temps qu’on était un peu aquatique, c’est elles qui l’ont gardé, dans le secret de leur ventre… Dans les épreuves, dans les exodes, les épidémies, les hommes tombent comme des mouches. Elles, elles tiennent. C’est tout fragile, tout souffrant, mais ne vous y trompez pas : ça s’adapte. Ça fait des veuves – solides.
(...)

Fessard
Mais le rêve ça reste des rêves… Et les femmes, dès que ça arrête ses mains, ça rêve à ce que ça aurait pu être si ça n’avait pas été ce que ça est.

Œdipe Roi
7.7

Œdipe Roi (-430)

(traduction Victor-Henri Debidour)

Oidípous týrannos

Théâtre

livre de Sophocle

Step de Boisse a mis 8/10 et a écrit une critique.

Annotation :

L’homme qui murmurait à l’oreille des Grecs anciens

Antigone
7.6

Antigone (-441)

(traduction Paul Mazon)

Antigónê

Sortie : 1997 (France). Théâtre

livre de Sophocle

Step de Boisse a mis 8/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Créon a bien changé

Liste vue 746 fois

17
5