Top Films 2021, une liste vaccinée de la VOD

Annotation :

I can get no (satisfaction). Immense coup de coeur pour Julie (en 12 chapitres). Joachim Trier dynamite avec une joie mauvaise mais communicative les injonctions à se mettre en couple, à fonder un foyer, tout en célébrant en grande pompe notre génération d'insatisfaits chroniques. Qui dit grand film féministe dit grande actrice : bouleversante, amusante, agaçante, épuisante et toujours instinctivement juste, Renate Reinsve s'y révèle.

Festival de Cannes - Compétition officielle - Prix d'interprétation féminine.

Annotation :

Sound of Silence. C'est dans son élégante minutie que réside la vertigineuse ampleur du geste d'Hamaguchi : la grâce se niche dans des plans sublimes de simplicité (deux cigarettes à la main, une ballet de langue des signes). La beauté dure trois heures.

Festival de Cannes - Compétition officielle - Prix du scénario.

Annotation :

Le Dernier Samouraï. Fièvre de la jungle, récit à la Crusoé : Arthur Harari narre l'engagement fanatique du lieutenant Onoda, "dernier soldat" de la 2e Guerre Mondiale perdu dans le maquis philippin, qui refusa jusqu'en 74 de croire que le conflit était bien fini. Organique et onirique.

Festival de Cannes- Un certain regard.

Annotation :

Etat d'urgence. Ils sont rares les films à prendre avec autant de puissance le pouls du pays sous Macron. Avec La Fracture, Catherine Corsini a l'intelligence d'assumer puis de déconstruire par l'autodérision son regard bourgeois pour un film ouragan, drôle et sidérant.

Festival de Cannes - Compétition officielle.

Annotation :

Il était une fois l'Amérique. Plutôt que le brûlot politique contre le capitalisme, Chloé Zhao opte pour une étude de caractère : Fern, gueule cassée de la crise, erre en van dans les ruines de feu le rêve américain et la conquête de l'Ouest. Son van, sa maison, son outil de travail, sa prison aussi, symbole d'un deuil sans fin, mais aussi paradoxalement son seul vecteur de liberté. Nomadland c'est tout ça : le constat d'une Amérique morte, aliénée, à qui Chloé Zhao, loin du misérabilisme, rend toute sa dignité. Bouleversant.

Lion d'or à la Mostra de Venise 2020.
Oscar du meilleur film.

Annotation :

Goodbye, Staline. Impensable : des ouvriers se soulèvent dans une Russie socialiste sûre de son fait. Le communisme aspirationnel, celui des travailleurs, vient heurter le communisme sclérosé des apparatchiks. Kontchalovski filme implacablement, sans chichi ni vétille, la désillusion politique au sein d'une petite bureaucratie minable d'une province loin de Moscou. Le tout dans un sublime noir et blanc qui laisse toute leur place aux nuances de gris.

Annotation :

Métal précieux. Julia Ducournau, de la rage et du Cronenberg plein sa besace, supplicie autant qu'elle magnifie les corps, déconstruit le male gaze et signe un beau body horror frenchie qui s'adresse autant à la chair qu'à l'esprit. Titane transpire le cinéma par tous les pores, en plus d’être un magnifique et féroce cri de guerre féministe.

Festival de Cannes - Compétition officielle - PALME D'OR.

Annotation :

Satire à balles réelles. Découvert dans une séance de minuit fiévreuse comme on les aime, Oranges sanguines déploie son univers impitoyable de crasse et de drôlerie. Avec de la gynécologie, un cochon, un ministre des Finances, et Patrice Laffont. Pépite noire.

Festival de Cannes - Séance de minuit.

Annotation :

Nostalgiallo. C'était pas mieux avant, clame Edgar Wright dans un film beaucoup plus sombre et mature que son cinéma adulescent habituel. Ici, la nostalgie est brocardée comme un enfer glauque, peuplé de fantômes et de traumas, qui nous rongent jusqu'à l'os. La mise en scène est une masterclass du genre.

Annotation :

A Star is Porn. Ninja Thyberg filme le porno comme il est : usine sans désir, où tout est éclairé comme au rayon jambon de Carrefour. Mais, à travers Bella, wannabe pornstar, elle y introduit avec malice le regard féminin, pour renverser les codes du spectateur et le rapport de force.

Festival de Deauville - Prix du Jury.

Annotation :

Les nerfs à vif. Joachim Lafosse filme un foyer qui se délite à cause de la psychose d'un père. Redoutable de justesse, net et sans bavure, sans sombrer dans la surenchère. Damien Bonnard, qui monte décidément en puissance, pouvait prétendre au prix d'interprétation masculine.

Festival de Cannes - Compétition officielle.

Annotation :

Etoiles montantes. Feu Gagarine, la cité rouge d'Ivry démolie en 2020, reprend vie au cinéma. La banlieue française magnifiée par le prisme de la poésie et de la science-fiction, pour un très joli premier film.

Annotation :

Bad Review. Un dispositif épuré - deux acteurs, un huis clos, un noir & blanc - pour une engueulade d'anthologie. Entre calme et tempête, le film met en miroir le bras de fer entre un réal et sa muse et les orages qui agitent le cinéma et la critique américaine. Zendaya irradie.

Annotation :

Soltani's Way. Un taulard iranien, sous les verrous pour une faute médiocre (une dette impayée), obtient une forme de rédemption par un acte de vertu médiocre (rendre un sac d'or à sa propriétaire). De cette simple histoire, Asghar Farhadi raconte une société iranienne bouffie de bureaucratisme et de principes moraux, obsédée par la réputation, l'honneur et les faux semblants.

Festival de Cannes - Compétition officielle - Grand Prix

Annotation :

Attitude Adjustment. L'Amérique des casinos minables, rongée de l'intérieur, en quête d'une rédemption qui se dérobe : un grand thème schraderien pour un grand film de Paul Schrader. Oscar Isaac bouffe l'écran.

Annotation :

Salut, sabbat ? Enchanté par cette relecture féministe du procès en sorcellerie, que ne renierait pas Mona Chollet. Face à des mecs effrayés par les femmes, les accusées décident d'endosser le costume d'adoratrices du diable. Quitte à coller à l'Inquisition une sacrée danse.

Annotation :

HerStory of Violence. Le grand cinéma australien secoue, et The Nightingale le réaffirme d'un coup de poing sec dans la mâchoire. Dans ce rape & revenge impitoyable et cru, Jennifer Kent ausculte une terre maudite condamnée à corrompre les âmes par la violence. Grand et terrifiant.

Annotation :

Mères, Patrie. A partir d'une histoire presque cliché d'échange de bébés, Almodovar arrive à raconter le face-à-face entre deux mères et la mémoire enfouie de la guerre d'Espagne. Brillamment écrit et magnifiquement emballé.

Mostra de Venise 2021 - Coupe Volpi de la meilleure actrice.

Annotation :

6,5 millions. La loi de Téhéran, c'est une torgnole à plusieurs visages, entre polar nerveux, film carcéral et drame social. Le tout assemblé via un montage qui force le respect, pour dresser le portrait d'une société rongée par la drogue et intoxiquée au malheur sur lequel prospère les dealers.

Annotation :

L'attente. Giovanni Aloï filme en plan serré le regard alerte des Sentinelles, déambulant dans un Paris qu'ils croient scène de guerre. Dans leurs yeux inquiets c'est la crispation d'une France de l'état d'urgence permanent qui se dessine.

Annotation :

Le Grand Bug en Avant. Fans de tous poils, Hollywood est devenu votre Matrice, votre pilule bleue, votre anxiolytique carburant aux mêmes histoires-doudous qu'on vous ressasse pour vous satisfaire. On a essayé de vous en libérer, mais vous y êtes toujours. Alors allez vous faire mettre, ne reste plus qu'à sauver l'amour, et nos personnages. Voilà le constat explosif de ce 4e volet, blockbuster conscient et méta, anomalie du système, doigt d'honneur à une industrie épuisée. En dessous, de manière purement formelle, de la trilogie, mais d'une puissance thématique ahurissante.

Annotation :

La Bourse et la Plume. Flamboyant "rise and fall" à la française : la rencontre entre Xavier Giannoli et la geste balsacienne accouche d'un bien beau bébé, porté par un casting cinq étoiles où chacune brille à sa façon. Mention spéciale à Benjamin Voisin et Vincent Lacoste.

Annotation :

La Gangrène et le Mulet. Ridley Scott reprend la confrontation des points de vue de Rashômon, transposé à un viol dans la France du XIVe. Il piétine la figure du chevalier pour signer un beau pamphlet féministe. Jusqu'au dernier acte... Brutal. Irrespirable. Implacable.

Annotation :

Just a white guy and a lockdown. Entre le one man show et le long-métrage de cinéma, Bo Burnham a profité du confinement pour tromper l'ennui et révolutionner les codes du seul-en-scène. Une oeuvre étonnante et qui a parfaitement capté l'air semi-dépressif de notre époque covidée.

Annotation :

Ondes de choc. Mélancolique et envoûtant premier film, qui raconte le choc de deux mondes : la sinistrose des années 80 contre l'élan de la jeunesse et des radios libres. Le travail du son est brillant, la photographie sublime.

Annotation :

Pente glissante. Film d'emprise, thriller charnel, avec dérapage contrôlé dans le giallo : c'est assez vertigineux de voit à quel point Slalom est riche et dense pour une première oeuvre. Quasi sans faute, mais on regrettera une fin un peu abrupte : manquent sans doute dix ou quinze minutes de film.

Annotation :

Prêche dans le désert. Autoportrait énervé, charge virulente contre la politique israélienne, geste rageur autant que conscient de son impuissance : le dernier Lapid c'est tout cela à la fois, ça déborde d'idées, quitte à verser dans la pose et le trop-plein. Mais ça emporte tout sur son passage. Un bon coup de Genou dans le cinéma.

Festival de Cannes - Compétition officielle - Prix du jury.

Annotation :

Wes Nice Stories. Wes Anderson au cube. Ceux peu friands de son style vont tirer la tronche. Pour les autres, c'est une masterclass, une idée de mise en scène par seconde, un film somme des obsessions formelles du cinéaste. Bref un plaisir.

Festival de Cannes. Compétition officielle.

Annotation :

Retour à Napoli. Sorrentino livre une touchante oeuvre partiellement autobiographique, entre déclaration d'amour à Naples, à Maradona, à ses parents décédés durant son adolescence et aux grands maîtres italiens qui l'ont construit en tant qu'homme et cinéaste.

Mostra de Venise 2021 - Lion d'argent/Grand Prix du Jury.

Annotation :

Master of Nonnes. Comme attendu, Benedetta, ça n'est pas très catholique. Mais c'est aussi (et surtout) très drôle : sous la chasuble Paul Verhoeven dresse un triple portrait caustique de femmes et de leur quête d'émancipation et de désir, égratignant au passage la duplicité et la vanité inhérentes à la foi.

Festival de Cannes - Compétition officielle.