Cover Top perso Kathryn Bigelow

Top perso Kathryn Bigelow

Petite vidéo sur les débuts de la cinéaste : https://www.youtube.com/watch?v=x72NpoAbp3U

Ici, une analyse de sa filmographie par le site L'ouvreuse :
http://louvreuse.net/analyse/kathryn-bigelow-1ere-partie.html

Et là, l'épisode que Capture Mag a consacré à sa carrière ...

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Liste de

11 films

créee il y a plus de 6 ans · modifiée il y a environ 3 ans

Démineurs
6.9
1.

Démineurs (2008)

The Hurt Locker

2 h 11 min. Sortie : 23 septembre 2009 (France). Guerre, Drame, Thriller

Film de Kathryn Bigelow

Toshiro a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

L'une des caractéristiques du cinéma de Kathryn Bigelow réside dans l'importance qu'elle accorde aux collaborations. Nombreux sont les chefs op' et scénaristes avec lesquels elle a travaillé, mais sans doute est-ce avec Mark Boal et Barry Ackroyd que cette façon de faire a eu les meilleurs effets.

Le premier, au scénario, apporte une matière documentaire issue de son expérience vécue aux côtés d'une brigade de déminage. Le deuxième apporte son mode de filmage extrêmement brut. La réalisatrice achève ainsi la mue de son cinéma vers une sorte d'hybride entre fiction et documentaire. Dans la plupart des scènes, 4 caméra cernent ainsi de partout les acteurs, en quasi constant recadrage, zoom ou mouvement. Au montage, ce matériel est ensuite articulé dans un découpage très cut mais jamais illisible.

Parce que tout le film, de manière globale ou au niveau de chaque scène, semble avoir été pensé pour être absolument sang gras, mais trés précis. C'est un film d'action où l'on se confronte à la matière et à l'hostilité palpable d'un environnement où l'armée US n'est clairement pas à sa place, ou en tout cas pas plus que sur Mars ! Et pour cause : l'une des origines du projet du film est l'opposition radicale de Bigelow à cette guerre. Mais comme c'est une cinéaste, elle s'exprime par les moyens de son art, et cherche plus à donner matière à réflexion qu'à se faire donneuse de leçons. Autrement dit, si le film se fait politique, c'est de façon indirect.

Ainsi, de ce personnage ne trouvant de raison de vivre que dans l'adrénaline du désamorçage de bombes à l'autre bout du monde (quand chez lui, tout l'ennuie) se dessine en creux le portrait un peu absurde d'un pays souffrant d'une sorte de complexe du super-héros, comme nostalgique de l'époque de la Conquête de l'Ouest. Difficile en effet de ne ne pas voir dans la rue irakienne telle qu'elle est filmée ici l'image fantôme des villes de western. Genre auquel le film, comme la réalité avant lui (cf. les mercenaires), emprunte beaucoup, et notamment dans sa rythmique.

Encore une fois, Démineurs est donc un film d'action, mais volontairement absurde en ce sens qu'elle ne sert à rien (il y a aura toujours une autre bombe, un autre tireur embusqué...). Et aussi parce qu'elle produit de la fiction au mieux délirée (les scènes où James s'improvise enquêteur), au pire dangereuse (ses conséquences sur Eldridge) et aliénante pour ceux, au pays, qui y croiraient, entretenant par là une guerre salement surréaliste.

Detroit
7.2
2.

Detroit (2017)

2 h 23 min. Sortie : 11 octobre 2017 (France). Policier, Drame, Historique

Film de Kathryn Bigelow

Toshiro a mis 8/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

Kathryn Bigelow reforme ici sa dream team avec Mark Boal et Barry Ackroyd. Résultat : le meilleur de chacun des trois collaborateurs au service d'un métrage qui a pour lui la force de l'évidence et de la limpidité.

Mark Boal fluidifie sa narration mais garde cet art du récit factuel, sans jugement ou orientation trop grossièrement amenées du point de vue du film. Des faits qui, par ailleurs, sont si édifiants en eux même qu'il "suffit" de les structurer en scénario pour en faire une analyse au scalpel des rapports entre les noirs et la police blanche aux USA, et à travers cela de cette fracture "raciale" qu'écarts de richesses et communautarisme ne peuvent qu'accentuer.

Barry Ackrod, lui, reprend sa technique des multiples caméras disposées un peu partout et, faisant preuve d'une capacité à manier tous les outils (téléobjectifs, courtes focales...), techniques (zooms et dézooms) et plus généralement d'une immense capacité d'adaptation (le mode de filmage s'adapte aux situations, configurations scéniques et temporalités) démontre une fois de plus que montage cut et parfaite lisibilité de l'action ne sont pas incompatibles.

Dés lors, après une brève remise en contexte, Bigelow peut faire ce qu'elle sait faire de mieux : de la vraie mise en scène, dont le style sans gras ni la moindre faute de goût trouve la parfaite distance avec ce qu'elle raconte : ni trop près (risque de complaisance) ni trop éloigné (histoire d'impliquer et de témoigner d'une violence "vraie" sans hypocrisie). L'immersion est totale, l'effet de réel omniprésent et nombres de scènes, non seulement jouent au Docteur Maboul avec nos nerfs et nos tripes, mais, surtout, le font intelligemment.

C'est-à-dire d'une façon qui produit une sorte de raisonnement. Comme une manière d'étude sociologique ou politique. Ainsi par exemple de ce bref passage ou la police prend une fillette à une fenêtre pour un tireur embusqué et réplique à sa "menace" avec toute sa force de frappe. En un clin d’œil, le lien se fait avec Démineurs et l'Irak. Constat : comme là-bas, on est ici plongé en plein conflit asymétrique, où méconnaissance de l'opposant et violence disproportionnée entretiennent toujours ce même rapport de cause à effet dévastateur, cercle vicieux produisant racisme et inégalités systémiques. De quoi bien faire pourrir une société.

Bref, l'exemple type d'un cinéma assez anti-didactique qui n'aurait pas besoin de nous faire la leçon pour en être une.


Zero Dark Thirty
6.7
3.

Zero Dark Thirty (2012)

2 h 37 min. Sortie : 23 janvier 2013 (France). Drame, Historique, Thriller

Film de Kathryn Bigelow

Toshiro a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

S'il me fallait résumer ZDT à un concept, ce serait le point aveugle. Ou comment tout le film semble mû par un très progressif et laborieux mouvement centripète autour d'une sorte de trou noir.

Dans l'idée, il s'agit de raconter la traque d'un fantôme, Ben Laden, disparu des radars US au lendemain de la bataille de Tora Bora, par une agent de la CIA obsessionnelle et toute une chaînes d'alliés plus ou moins coopératifs et amoraux. Dans les faits, pour Mark Boal et Kathryn Bigelow, ça passe par un film dossier hyper-documenté, très factuel - au risque de l'aridité -, mais aussi, de manière quasi-contradictoire, par une façon de construire narration et mise en scène autour de l'idée de l'absence, du non-visible, et de toute une sommes de stratégies cherchant à percer ce voile aveuglant que les attentats du 11 sept auraient fait tomber sur les USA.

Le film s'ouvre ainsi sur un écran noir (comme pour répondre au trop plein d'images des tours) et se termine dans un assaut nocturne semblant, lui, être là pour combler par la (docu)fiction les images manquantes entre, d'une part, la fameuse photo de la situation room d'Obama & co, et d'autre part, celle de Ben Laden exécuté. Entre cette ouverture et ce climax, on tâtonne et s'agite donc pour faire entrer dans le domaine du visible (et de l'audible) le grand méchant barbu.

Sauf que lorsque c'est fait, c'est un quasi retour au noir. Ou disons plutôt que pour Maya et l'Amérique, le dés-aveuglement non seulement semble faire mal, mais ne saurait durer. Comme si l'ennemi public n°1 avait aussi été une sorte de phare dans la nuit des années 2000, une raison d'être à toute la machine de guerre ricaine. Et qu'une fois ce phare éteint, on se rendrait enfin compte de l'absurdité de l'entreprise, le symbole liquidé étant un peu trop humain pour remplir le rôle mythique qui lui aura été assigné. J.B Thoret parle de Moby Dick. Moi, je pense à The Searchers...

Pour le reste, on reconnait la patte de Mark Boal dans le chapitrage du film en blocs, et cette façon d'être politique sans l'être, de montrer sans pointer ni commenter. Quant à Bigelow, collaborant cette fois avec Greig Fraser, elle opte pour un style de mise en scène et de montage, lui aussi, très factuel et moins cut que dans Démineurs. Mais comme dans le climax de ce-dernier, le sens de l'hyperréalisme de la cinéaste finit par créer une impression de surréalisme, d’hallucination dont on sort, un peu comme Jessica Chastain, éclairé mais moralement désorienté.

Strange Days
7.1
4.

Strange Days (1995)

2 h 25 min. Sortie : 7 février 1996 (France). Action, Science-fiction

Film de Kathryn Bigelow

Toshiro a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Oeuvre d'anticipation mésestimée, Strange Days est pourtant un film d'importance au sein de deux filmographies : celle de James Cameron, producteur et monteur à l'origine de son histoire extrapolant sur une Amérique dystopique inspirée de l'affaire Rodney King ; et celle de Kathryn Bigelow, qui trouve là pour la première fois de sa carrière l'occasion de faire explicitement entrer le "politique" dans son travail.

Parlons tout de suite de ce qui fâche : d'abord le découpage du récit qui, alternant grosses ellipses et séquences en quasi temps réel déboussole un peu, donnant parfois cette impression que le film n'est pas cohérent avec sa propre timeline (à moins que ce ne soit voulu ?...). Ensuite, il y a la façon dont les deux enquêtes se rejoignent, un peu artificiellement, et, enfin, comment le film ne va pas au bout de sa charge en faisant finalement du racisme structurel des USA l'affaire de quelques uns (les deux flics), problème que l'on règle d'un coup de baguette magique (l'intervention miraculeuse de leur chef).

Ceci étant, tout au long de ses 2h25, Strange Days aura excellé à dépeindre une Amérique comme à deux doigt de la guerre civile, Kathryn Bigelow nous plongeant dans une atmosphère au croisement des émeutes raciales de L.A. en 1992 et du cinéma catastrophe. Autrement dit : la pirouette scénaristique finale à beau vouloir recadrer le film en fin de parcours, c'est déjà trop tard. La mise en scène est plus forte que le scénario. L'idée d'une Amérique poussée au bord du gouffre par ses propres démons aura été trop puissamment inséminé dans notre cervelle.

En fait, l'effet est un peu le même que celui des vidéos de Lenny : les différents régimes d'images adoptés par la réalisatrice produisent un tel effet de réel, un sentiment d'immersion si prégnant, que ce qui domine, une fois que le générique de fin défile devant nos yeux, c'est l'impression d'avoir plongé en pleine fête/insurrection de fin du monde. Et ce que se soit via les séquences dites POV (pour point of view) ou via l'ampleur de scènes de foules.

Après, on voit ici à quel point le "thème" de la quête d'une forme de trip absolu rejoint chez la réalisatrice la question de l'image. Soit un vrai problème de cinéma consistant, grosso merdo, pour chaque héros bigelowien, à trouver l'équilibre entre son instinctive tendance à l'autisme, à faire son propre film dans son coin et dans sa tête, en quelque sorte, et le reste du monde, la société, c'est-à-dire le reste du film.

Point Break - Extrême limite
6.6
5.

Point Break - Extrême limite (1991)

Point Break

2 h 02 min. Sortie : 28 août 1991 (France). Action, Policier, Thriller

Film de Kathryn Bigelow

Toshiro a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Avec ce film à l'origine destiné à Ridley Scott, Kathryn Bigelow passe pour moi un vrai cap. C'est là que sa science dans la mise en scène de l'action, celle qui nous immerge dans un milieu, dans une poursuite, naît vraiment. Il suffit de voir ce plan séquence nous introduisant avec Utah dans les bureaux du FBI. S'en suivront les nerveuses séquences de braquages et d'assauts, et puis cette poursuite à pied dans les ruelles et à travers les maisons de L.A. : du pré-Matrix ou Blackhat ! Les séquences de surf sont, elles, plus classiques (ralentis, soleil couchant), et celle de chute libre, pour l'époque, impressionnantes (exepté le parachute assez visible de la doublure de Keanu Reeves dans la scène où il n'est pas sensé en avoir).

La rumeur voudrait que James Cameron (ex-mari et producteur ici) ait apporté son aide ici ou ailleurs. Pourtant, mis à part les 3 climax et un L.A. ressemblant pas mal à celui de T2 (les 2 films sont de la même année), je ne reconnais pas tant que ça sa patte. En fait, c'est plus Near Dark qui, notamment à travers son casting (Bill Paxton, Jeanette Goldstein, Lance Henriksen) me fait pensé à du Cameron. Et pour cause : la réalisatrice en est venue à rencontrer Iron Jim parce qu'elle adorait ses 2 premiers films, au point de personnellement lui demander l'autorisation d'emprunter "ses" acteurs.

Sinon, comme d'hab, la réalisatrice ne s’embarrasse pas d'exposition longuette, laissant l'action dire tout. Un montage parallèle entre une séance de surf de Body et l'entrainement de Utah sous la flotte + quelques scènes et le film est programmé. Tout le reste (l'évolution des rapports entre les personnages) passera par leurs rapports au monde, c'est-à-dire à leur environnement et aux autres, à la société. Le tout sans trop de dialogues pour sur-commenter ce qu'on avait déjà compris, à l'image de la mort du collègue de Utah, conséquence logique de ses non-choix, le destin forçant les choses.

Pour Utah, donc, au final, c'est une histoire de recherche et de découverte de soi. Puisque, comme lui dit Tyler dès le début, il a déjà, en lui, l’œil du kamikaze. A partir de là, il s'agira pour lui de trouver ses limites, physiques et morales. Pour Body, quant à lui, c'est une quête d'absolu qui ne peut que faire des dommages collatéraux et n'a donc pas vraiment, elle, de limites, si ce n'est la mort. La beauté du film étant d'ailleurs un peu là aussi, dans ce petit côté "métaphysique" en plus que n'ont pas forcément les autres films du genre.

K-19 - Le Piège des profondeurs
6.3
6.

K-19 - Le Piège des profondeurs (2002)

K-19: The Widowmaker

2 h 18 min. Sortie : 18 septembre 2002 (France). Drame, Action, Guerre

Film de Kathryn Bigelow

Toshiro a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Utah et Body, James et Sanborn, et ici Vostrikov et Polenin : pas de doutes, Kathryn Bigelow aime les duels de fortes têtes. Et qui de mieux que ses monstres de charisme que sont Harrison Ford et Liam Neeson pour porter la chose. Quant au reste de la distribution, rien à redire non plus (et je pense notamment au trop rare Chritian Canargo).

Alors évacuons tout de suite la question : évidemment, K-19 ne navigue pas dans les mêmes eaux que l'éprouvant Das Boot ou la partie d'échec que constitue The Hunt for Red October. Ceci étant, non content d'être fort bien mis en image, il annonce assez clairement Démineurs dans son approche à la fois abstraite et viscérale de la guerre.

Abstraite parce que l'ennemi n'existe pas vraiment : c'est la guerre froide, l'ère de l'atome, dont on ne peut que souffrir les effets. Soit la réaction en chaîne du réacteur nucléaire dont on perd le contrôle, belle métaphore du brusque réchauffement de la guerre froide que pourrait causer toute action irresponsable parmi l'équipage. Autrement dit : la tension trouve ici un formidable objet pour décrire sa montée en puissance, un peu comme lorsque Brian De Palma suspend Tom Cruise au bout d'une corde pour littéralement fabriquer du suspens.

Par ailleurs, si l'approche est si viscérale, c'est parce que, Kathryn Bigelow + film sous-marin oblige, on est sous-pression avec les personnages. A ce titre, la caméra très mobile et les choix de focales (souvent courtes, évidemment) de Bigelow et son chef op' piqué à David Fincher (Jeff Cronenweth) remplissent très bien leur office. Le reste est une affaire d'écriture et d'interprétation. Lesquelles donnent vie, corps et âme à cet équipage fantôme de l'Histoire avec lequel on partage tout pendant 2h18 de film.

A ce sujet, peut-être faut-il ici rappeler une chose : venant du monde de l'art conceptuel, la réalisatrice n'est pas vraiment une conteuse (elle ne signe les scénarios que de Near Dark et Blue Steel). C'est une visuelle frappée de plein fouet par la vision hallucinée de La Horde Sauvage (film fétiche). Voilà pourquoi elle collabore toujours beaucoup avec différents scénaristes. Et voilà pourquoi son cinéma est si cinégénique, parce qu'il travaille le temps, l'espace et l'action comme des matières.

Quant à ce K-19, in fine, non content d'être une histoire d'autant plus folle qu'elle est issue de notre monde bien réel. c'est probablement le film le plus ouvertement humaniste de la réalisatrice avec Detroit.

Blue Steel
5.9
7.

Blue Steel (1990)

1 h 40 min. Sortie : 25 avril 1990 (France). Action, Policier, Drame

Film de Kathryn Bigelow

Toshiro a mis 7/10.

Annotation :

Avis aux freudiens. Vous voulez vous faire plaisir ? Ben débrouillez-vous pour voir ce film. Vous pourrez caser toutes vos expressions préférées, genre volonté de puissance, complexe de castration, figure du père, etc.

La raison à cela ? L’application du style de mise en scène (encore en formation mais déjà bien affirmé) de Kathryn Bigelow à une histoire à la Dirty Harry où le flic tordu confronté à son double encore plus tordu est ici UNE flic confrontée à une sorte de figure du père-amant-ogre-castrateur-n'en-jetez-plus à tuer pour enfin pouvoir s'assumer en tant que femme dans un univers d'hommes, en gros.

Le style, quel est-il ? D'abord, dans la continuité de The Loveless et Near Dark, une façon particulière d'iconiser voire fétichiser façon pré-NWR un certain nombre d'attributs de la virilité. Ici, c'est notamment le générique s’arrêtant sur toute la panoplie a priori masculine de Jamie Lee Curtis (flingue et costume de flic) avant qu'elle n'affronte le sexisme ordinaire de ses collègues.

Ensuite, chose particulièrement frappante ici, une grammaire qui, lors des scènes d'action et plus spécifiquement de gun fight, est cameronnienne en diable ! C'est fou, mais c'est presque comme si Blue Steel nous refaisait en boucle la cultissime scène du Tech Noir de Terminator et son usage si marquant du ralenti suspendant le temps à l'imminence de la mort. Preuve si l'en est que l'autre film matrice/de chevet de Kathryn Bigelow avec La Horde sauvage est bel est bien le fameux second long métrage de Big Jim, futur ex-mari, auquel la cinéaste emprunte aussi sa manie des triples climax.

Voilà, à mes yeux, c'est le premier film de Bigelow à vraiment en imposer. Le canevas simple d'une série B aidant sans doute, le récit est parfaitement maîtrisé, sans gras ni manque. La mise en scène trouve un excellent point d'équilibre entre "rendu brut' de l'environnement citadin de l'époque (quelques plans en caméra à l'épaule, colorimétrie à dominantes grises, noires et bleutées) et une stylisation parfaitement exécutée (découpage de l'action nickel et usage fort maîtrisé du ralenti et des jeux de lumière).

Bref, un cop movie et une série B haut de gamme annonçant non seulement Point Break mais aussi, entre autre de par le score "métallique" que signe ici un certain Brad Fiedel, Terminator 2...

Aux frontières de l'aube
6.6
8.

Aux frontières de l'aube (1987)

Near Dark

1 h 34 min. Sortie : 9 novembre 1988 (France). Drame, Épouvante-Horreur, Thriller

Film de Kathryn Bigelow

Toshiro a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Une chose est sûre, ça a de la gueule ! L'idée de mêler les imaginaires westerniens et vampiriques est l’occasion de pondre de belles images entre chien et loup. Les grands espaces sans âge s'accordent aussi très bien avec l'idée d'errance temporelle associée à la figure du vampire. Et en plus, la réalisatrice a la bonne idée de limiter les dialogues au minimum.

Mais en parallèle, le personnage principal apparaît bien falot, là où celui de Keanu Reeves dans Point Break (et à charisme alors encore égal à celui, ici, d'Adrian Pasdar) avait un petit quelque chose en plus, un brin de folie. La galeries de personnages composant la troupe de vampires, elle, est une réussite, que ce soit au niveau de leurs tronches ou de leurs interprétations - Lance Henriksen bouffe la caméra à chaque apparition et Bill Paxton cabotine à fond. Le personnage du vampire enfermé pour l'éternité dans un corps d'enfant constitue par ailleurs une très belle idée anticipant Entretien avec un vampire et Morse.

Autre problème : quelques facilités d'écriture, et notamment dans ce final où le temps de combustion des vampires exposés aux UV varie suivant leur méchanceté. Et puis cette conclusion, je la trouve un peu "gentille", comme si le récit n'avait pas fondamentalement changé la vie du héros. Alors que ça commençait pourtant comme un film de Peckinpah (cf. le moustique écrasé en lieu est place des autres animaux martyrs de l'ami Sam)

Après, question mise en scène, à quelque raccords bizarres près, c'est pas mal pour un début de carrière. Mais je garde cet impression que Kathryn Bigelow aurait mieux fait de d'avantage développer ses personnages plutôt que de faire avancer son histoire si précipitamment. Il y a évidemment quelque chose de l'efficacité de la série B ici. Mais les scènes d'action ne laissent pas encore transparaître ce qui fera la marque de la réalisatrice. Là, on en est encore à des ralentis très 80's qui ne m'emballent pas des masses.

Question tension, par contre, il y a déjà ici une scène qui fait son petit effet : celle où les vampires prennent leur temps pour massacrer des humains dans un saloon. D'ailleurs, on voit là la filiation avec The Loveless, qui avait déjà des scènes similaires. Comme si le goût de Bigelow pour les personnages adeptes de sensation fortes et en rupture avec la société avait la même origine que les motards du premier Mad Max. Et c'est sous cet angle, celui d'une jeunesse "déviante", que la part sexuelle du mythe du vampire se renouvelle.

Le Poids de l'eau
5.2
9.

Le Poids de l'eau (2000)

The Weight of Water

1 h 55 min. Sortie : 31 juillet 2002 (France). Drame, Thriller

Film de Kathryn Bigelow

Toshiro a mis 7/10.

Annotation :

A priori, rien de plus difficile que de raccrocher ce méconnu Poids de l'eau au reste de la filmographie de Kathryn Bigelow, tant au niveau du fond que de la forme. Et cependant, je me demande si, d'une certaine façon, on ne pourrait pas y voir l'origine du virage qu'accomplira définitivement la réalisatrice avec Démineurs.

On a en effet coutume de voir dans ce-dernier la vraie réinvention du cinéma de Bigelow. Réinvention à laquelle doit effectivement énormément la rencontre avec Mark Boal. Mais ne serait-ce pas à partir du Poids de l'eau que la réalisatrice entame la mue de son cinéma ? Un cinéma qui, de la fiction pure, commencerait ici, discrètement, à amorcer son hybridation avec le film documentaire.

Le fait est qu'ici, comme par ailleurs dans K-19 (d'une autre façon), on pense parfois beaucoup à un docu-fiction, du genre de ces émissions typiques de la télé ricaine où l'on revient sur une cold case ou une catastrophe que l'on reconstitue avec des acteurs plus ou moins bons jouant dans des reconstitutions plus ou moins minables en alternance avec les commentaires solennels de prétendus experts. Bien sûr, rien d'aussi rédhibitoire ici : les acteurs font leur job et les deux niveaux de réalité (l'histoire passée et la présente où l'on enquête sur la première) entretiennent un dialogue autrement plus intéressant cinématographiquement parlant.

Le travail de montage me parait savant, et si l'héroïne de l'histoire au présent enquête bel et bien sur l'histoire passée, celle-ci vient bientôt faire office de film fantôme hantant le film contemporain. Le climax me paraît assez explicite à ce propos, mais aussi certains passages du film au passé où la mise en scène passe au noir et blanc et rappelle certains films d'horreur gothique des 30's. Et ce de façon pertinente vu l'époque et ce qui est raconté.

Autrement, si l'enquête reste ludique, elle a assez peu d'intérêt à mes yeux (d'autant qu'on comprend vite qui a fait le coup). Mais Bigelow trouve là l'occasion de faire un vrai film de personnages, en ce sens que le temps est pris de développer leur psychologie et des morceaux de leur passé. Et puis il y a tout un jeux autour de l'ambivalence des désirs (lequel passe presque exclusivement par les jeux de regards), et un certain regard sur la condition féminine et la solitude des êtres.

Un film qui, à mon sens, à défaut d'être génial ou révolutionnaire, mérite donc tout de même d'être découvert.

Last Days
6.4
10.

Last Days (2014)

03 min. Sortie : 2014 (France). Animation

Court-métrage de Kathryn Bigelow

Toshiro a mis 7/10.

Annotation :

Court métrage engagé disponible ici :
https://www.youtube.com/watch?v=5gQujyNDp98&t=1s

Que dire ? si ce n'est que Kathryn Bigelow poursuit là dans la nouvelle voie qu'a pris son cinéma avec Démineurs. C'est-à-dire un cinéma ayant vocation à être, pour reprendre les mots de la cinéaste, "informative", "journalistic".

Cette fois, il s'agit donc de nous informer - et de façon assez frontale et offensive, du reste - sur les tenants et aboutissants du trafique d'ivoire. Le film, par le même genre de procédé qui ouvrait le Lord of War d'Andrew Niccol, c'est-à-dire un montage séquence suivant le trajet d'une marchandise (mais cette fois dans un ordre antéchronologique), reconstitue ainsi tout un réseau en remontant sa chaîne depuis le consommateur lambda de bijoux en ivoire aux tueurs d'éléphants en Afrique en passant par un des groupes terroristes trouvant dans ce business le moyen de financer ses exactions. Une approche classique en somme, mais tout à fait cohérente avec le but poursuivi : provoquer une prise de conscience.

D'un point de vue plus strictement cinématographique, on notera que c'est la première fois que la réalisatrice recours à l'animation (de peintures comme pour le prologue de Detroit). Procédé qui lui permet de faire preuve d'une certaine violence graphique sans que ce soit insupportable lorsqu'il s'agit de dépeindre les sanglants massacres d'éléphants. Par ailleurs, le film inclue aussi quelques images d'archive (donc live) d'un autre genre de massacre, cette fois dans un mall de Nairobi (Kenya), perpétré par un de ses groupes terroristes (Al Shebab) vivant du trafique d'ivoire. Cette fois alors, la violence passe par la froideur des exécutions sommaires partiellement filmées par des caméras de surveillance et aussi par le mixage sonore - lequel est tout au long du métrage traité avec un soin tout particulier.

Bref, quand bien même le graphisme général et l'animation sont relativement rudimentaires (proche de l’abstraction, très stylisé), ce qui créer un effet de distanciation, on reste dans un film de Kathryn Bigelow. Autrement dit quelque chose qui cherche à immerger le spectateur (ici notamment par le son) pour, en plus de l'informer, susciter en lui une réaction venant d'avantage des tripes, une réponse émotionnelle sensée ensuite venir motiver un autre type de réaction.

P.S. : la réalisatrice parle ici du film :
https://www.youtube.com/watch?v=GR_0V6Qeknk&t=117s

The Loveless
6.4
11.

The Loveless (1981)

1 h 32 min. Sortie : 7 août 1981 (États-Unis). Drame

Film de Kathryn Bigelow et Mont Montgomery

Toshiro a mis 5/10.

Annotation :

Vu il y a longtemps dans de mauvaises conditions. J'en garde le souvenir d'un truc assez bizarre, sorte de film fétichiste (pré-NWR, si l'on veut) d'une certaine idée de la jeunesse rebelle telle qu'elle avait pu être incarnée par James Dean et Marlon Brando dans les années 50-60. Le fait est que Kathryn Bigelow a grandie dans les sixties dans la région de San Fransico au moment où la jeunessse y était donc en pleine ébullition.

J'ignore ce qui est ici de Monty Montgomery et de Kathryn Bigelow - même si on retrouve déjà cette façon récurrente qu'à la cinéaste de filmer le quotidien d'un groupe masculin avec ses codes et toujours en mal de performances, de "sensations limites".

Toujours est-il que la cinéaste décrit ce film comme quelque chose de "non narratif" au sens ou elle s'y essayait d'avantage à produire des scènes (à la Pasolini ou Fassbinder, dit-elle) qu'une véritable histoire au sens où on l'entend traditionnellement dans le cinéma mainstream.

Toshiro

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