Top Films 2023, une mêlée de cinéma

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Le livre d'images. Quand le monument Spielberg s'auto-analyse dans l'oeil de sa caméra, cela donne une magistrale leçon de cinéma, un grand film sur l'enchantement et le regard. Le septième art y apparait à la fois comme un manège aux illusions, un refuge et un révélateur de vérité crue (une famille chaotique, le poison de l'antisémitisme). Le cinéma selon Spielberg. Donc le cinéma, point barre.

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Le rêve haut. Le cinéma de Pietro Marcello paraît presque anachronique et, sans tomber dans de la posture de conservateur aigri, c'est ce qui fait sa pertinence. A l'heure de la grande lessiveuse numérique, l'Italien redonne leur centralité aux images, aux corps de ses héros prolétaires - les mains noueuses, la terre, la boue... Une fresque à la troublante beauté classique.

Festival de Cannes 2022 - Quinzaine des réalisateurs.

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Quand vient la fin de l'été. Un de ces films où "il ne se passe rien" et pourtant il y a tout. Toute la grâce des petits moments de la vie, pour narrer les vacances qui se terminent et les derniers instants complices d'une relation père-fille amenée à se déliter. On pense fort à Somewhere de Coppola, et on est pas loin de penser qu'Aftersun a dépassé son modèle.

Festival de Deauville 2022 - Compétition officielle - Grand Prix.
Festival de Cannes 2022 - Semaine de la Critique - Prix du Jury.

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Ça bastonne pas mal à Paris. Plus la saga avance, plus sa mythologie s'effrite au profit d'une quasi abstraction narrative : ce qui importe, c'est le mouvement du héros, la chorégraphie de ses combats, le choc, les corps, qui contiennent le sens du film. De ce point de vue là, John Wick 4 est un sacré morceau. Ce quatrième opus porte le savoir-faire de cascadeur de Stahelski à des sommets d'impact, notamment dans sa partie parisienne, à l'image de cette montée dantesque au Sacré-Coeur ou de ce battle royale improbable au pied de l'arc de Triomphe.

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Political world. "We living in a political world", chantait Bob Dylan. L'acteur, désormais réalisateur, Jesse Eisenberg explore ici son angoisse sur la vacuité de son art et de sa carrière face à un monde en mouvement et les aspirations de la jeunesse. Un film sucré-salé, touchant et drôle, et impitoyable avec ses personnages et leurs contradictions.

Festival de Deauville 2022 - Première.

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Revoir Naples et se souvenir. Martone ne bluffe pas. Chez lui, les madeleines de Proust finissent à l'étouffée. Un cinéma à la fois mélancolique et fort en gueules, à commencer par celle de Pierfrancesco Favino, qui repart de Cannes bredouille et c'est dommage.

Festival de Cannes 2022 - Compétition officielle.

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Sur le pont de rupture. Excellente surprise que ce premier film, thriller nautique et social bien troussé. Le cinéaste met en scène deux trajectoires - les Blancs mus de ce désir si occidental de "s'évader", un Somalien cherchant une meilleure vie - qui, malgré toutes leurs bonnes intentions, ne peuvent qu'entrer en collision. Un récit sombre en plein soleil.

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Balèze. Aronofsky signe un film jumeau avec The Wrestler : même corps supplicié (le gras remplace le catch), même drame familial, même gimmick biblique dans le dernier plan, même acteur "ringardisé" en quête de rédemption (Rourke/Fraser). Les deux films fonctionnent en miroir comme une longue ligne de crête doloriste qu'Aronofsky arpente sans complaisance ni voyeurisme excessif. Et nous interroge : qu'est-ce qu'un corps ? Comment peut-il nous trahir ? Qu'envoie-t-il comme message au monde ?

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The Watchtower. De Julia Ducournau à Coralie Fargeat, l’hybridation du genre horrifique avec les thématiques féministes cogne là où il faut que ça fasse mal. Avec Watcher, son premier film, l’Américaine Chloe Okuno frappe un grand coup. Redoutable, d’une efficacité démonstrative indéniable, il nous conjure de croire la parole des femmes et des victimes, avant qu’il ne soit trop tard.

Festival de Deauville 2022 - Compétition officielle.

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Un Indien dans le vil. Dans la réserve de Pine Ridge, bidonville austère et miséreux au fin fond du Dakota du Sud, la tribu Oglala survit de petits boulots, de magouilles et de trafics. Elle est aliénée par le capitalisme, acculturée. Mais les réalisatrices arrivent à déjouer le piège du misérabilisme lourdingue, pour esquisser la possibilité d’une autre issue, hymne à la débrouille et à la revanche sur la grande Histoire.

Festival de Cannes 2022 - Un certain regard - Caméra d'or (meilleur premier film).
Festival de Deauville 2022 -Compétition officielle - Prix du jury et Prix de la Révélation (meilleur premier film)

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La plume, cette plaie. Jolie comédie que Youssef Salem, un peu chiche en mise en scène mais qui déploie une vraie science des dialogues. Le film repose ainsi sur de savoureuses séquences de ping pong verbaux, à table, en bagnole, sur un plateau télé ou lors du soirée mondaine. Un film de mots plus que d'images.

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La faim d'un monde à Hollywood. A la charnière du muet et du parlant, les dieux de l'Olympe hollywoodien, stars et producteurs, festoient comme si c'était leur dernière orgie. Damien Chazelle signe une œuvre-monstre à l'image de son sujet : démesurée, tourbillonnante, boursouflée, épuisante.

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The Ring. Michael B. Jordan a gardé la mise en scène percutante et redoutablement efficace de Coogler. Par contre, la saga boxe maintenant dans une toute autre catégorie : Rocky était un outsider prolétaire qui entrait par effraction dans le monde de la boxe. Dans Creed III, Adonis, golden boy des rings, doit remettre à sa place l'outrecuidant prolo qui veut lui ravir son monde. Balboa s'est embourgeoisé, et c'est dommage.

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From Dusk Till Drown. Quand Domino de Tony Scott rencontre Une nuit en enfer de Robert Rodriguez sur fond de mythologie ouest-africaine. Des maladresses dans l'écriture mais une réjouissante irruption du cinéma de genre au Sénégal.

Étrange Festival 2021 - Hors compétition.

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Sortie de route. Une formatrice en sécurité routière profite de son boulot pour massacrer des chauffards dans une folle quête vengeresse. Jonathan Barré reprend la trame de Boulevard de la mort, avec une nuance : ici, tout le monde est un crétin. Le mariage entre comédie basse du front et son envie de cinéma de genre ne prend pas toujours, mais cela reste un bon moment et au-dessus du tout venant de la comédie française.

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Un mariage et un entêtement. Serebrennikov tente d'ausculter la chute d'une femme dévorée par sa passion pour son génie de mari, incapable de lui rendre son amour et qui ne l'a épousé que pour sauver les convenances. C'est un film spectral, en décomposition, souvent excessif dans ses effets, comme si le cinéaste n'arrivait pas à décoder son héroïne et se forçait à danser follement autour d'un sujet qu'il ne perce jamais totalement.

Festival de Cannes 2022 - Compétition officielle.

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Maire courage. Les petites victoires est l'histoire d'une grande défaite : celle de territoires vouées à la désertification, sur lesquels le film pose un constat amer, malgré son enrobage feel-good qui le rend éminemment sympathique. Au point d'en faire un film anxiolytique sans efficacité politique ? La question se pose.

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Jusqu'à ce que la mort les sépare. Une série B horrifique indé qui en a dans la boîte à gants, même si le twist assèche assez vite l'atmosphère presque lynchien que le film essaie de se donner en première instance. Reste que sur un sujet connexe, c'est bien meilleur que Men d'Alex Garland.

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C'est dans les vieux Poe... Scott Cooper aime déambuler dans les ruines du rêve américain, du drame social Les Brasiers de la Colère à son western tragique Hostiles. Celui-ci, enquête dans les noirs dessous d'une académie militaire new yorkaise, n'est pas son itération la plus convaincante. Mais disons que dans le tout-venant de Netflix, voilà un polar gothique et hivernal suffisamment bien écrit pour nous tenir en haleine.

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The Puppet Master. Le projet de rêve de Phil Tippett, vieux de 30 ans, est enfin là : déambulation hallucinatoire et dantesque dans un univers torturé, cauchemardesque, quelque part entre du Cronenberg suintant et du Tim Burton nécrosé. Bon, par-contre, on ne sait pas trop ce que ça cherche à raconter, outre une dissertation confuse sur la création, la mort, la vie, l'univers... et le Reste.

Étrange Festival 2021 - Compétition officielle.

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Gangs of Paname. Jimmy Laporal-Trésor a grandi en banlieue parisienne dans ces années-là, celles de Mitterrand mais aussi des premiers coups politiques du Front National. Deux jeunesses face à face. Le réalisateur tire de ses souvenirs d’ados son premier film, qui aborde cette page de l’histoire française encore peu mise en scène au cinéma. Film de bande un peu brutal, pas toujours finaud et souvent facile, « Les Rascals » souffre de son manque de budget, qui l’oblige à filmer Paris sans montrer Paris, faute de pouvoir assumer de vrais décors de reconstitution. Il a toutefois la politesse d’être efficace, grâce à l’énergie de ses intenables jeunes acteurs, à qui on pardonne même certains écarts de jeux. Passable mais prometteur.

Festival de Deauville 2022 - Hors compétition.

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Peninsula. Rendez-vous manqué avec ce portrait d'une héroïne profondément triste, seule et perdue, qui vient faire s'échouer sa peine dans un pays inconnu qui est censé lui offrir la clé de ses turpitudes. Mais le film égare en digression stylistique, en tapage narratif, et finit par être oubliable.

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Mytho et MeToo. Ozon retourne à la veine théâtreuse de son cinéma (8 Femmes, Potiche) pour une comédie post-Me Too qui fait tous les efforts du monde pour avoir l'air de ne pas y toucher. Le vaudeville hyper-appuyé (repoussoir instantané pour les allergiques au surjeu) brandit sa facticité en étendard : tout est farce, à commencer par la justice, et dans ce cas il est normal que les comédiennes raflent la mise. Quitte à faire passer les femmes pour les bénéficiaires de leurs agressions. Satire, oui, mais parfois à côté.

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La goutte dort. Quel dommage de passer à côté de son sujet en perdant de vue le quartier qu'on prétend filmer, au profit d'une caméra épaule vue et revue, comme si le cinéma social et le filmage des prolétaires ne pouvait se faire que comme ça.

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Bas les masques. Semi-habile et souvent débile, le sixième opus des massacres de Ghostface, qui promettait du renouveau, ressert les motifs réchauffés de la saga. Un symptôme du manque de créativité à Hollywood, que le film ne se prive certes pas de commenter - mais le cynisme, même ludique et décomplexé, a ses limites.

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Korean BBQ. Une trouzaine de détenus sont sur un bateau entre la Corée et les Philippines, coincés avec un simili-Frankenstein meurtrier. Un jeu de massacre dont la principale promesse réside dans la quantité de faux sang déversé sur le plateau. Crado, marrant, mais un poil long : cuistot fou, le réalisateur est presque trop généreux en viande, jusqu'à se répéter dans ses recettes.

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Mémoire de nos frères. Tirailleurs est exactement ce qu'on attendait et craignait : un film mémoriel "nécessaire" parfait pour des scolaires, mais qui malheureusement est d'un convenu ennuyeux quand il s'agit de mettre en scène les tranchées, la vie au front. Les clichés s'alignent - embarrassant, pour un film qui prétend redonner droit à une mémoire autre, oubliée.

Festival de Cannes 2022 - Un certain regard.

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De capes et d'effets. Comme avec Eiffel, Bourboulon s'applique aux commandes de ce gros projet de studio rêvé par Pathé comme le renouveau industriel du cinéma français. C'est propre, ambitieux, pas désagréable à l'oeil, mais tellement attendu et convenu qu'on finit par s'ennuyer poliment.

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The Lost Frears. Le cinéma du Britannique semble bien vieillot dans ce téléfilm BBC de luxe.

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Chili con sieste. A vouloir à tout prix réduire la tragédie historique à l'intime le plus dépouillé, Martelli livre un film sans souffle, qui n'a l'air que d'effleurer son sujet (la dictature de Pinochet).

Festival de Cannes 2022 - Quinzaine des réalisateurs.