Cover Top films tchèques et slovaques
Liste de

29 films

créée il y a environ 3 ans · modifiée il y a environ 1 mois
Le Soleil dans le filet
7.2
1.

Le Soleil dans le filet (1962)

Slnko v sieti

1 h 34 min. Sortie : 15 février 1963 (Tchéquie). Drame

Film de Štefan Uher

Arthur Debussy a mis 9/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Le Soleil dans le filet est officiellement le premier film de la Nouvelle Vague tchécoslovaque, et il pose les bases de ce brillant mouvement cinématographique : point de vue individuel, questionnement existentiel, acteurs non professionnels, captation de l'air du temps, expérimentations formelles, critique politique et sociale à peine déguisée, esthétique magnifiquement travaillée... Il faut le voir pour le croire : Štefan Uher, dès son deuxième long métrage de fiction, livre un chef-d’œuvre absolu, d'une beauté irréelle. On comprend qu'il ait pu inspirer tant de cinéastes géniaux par la suite...

Le Miroir aux alouettes
7.5
2.

Le Miroir aux alouettes (1965)

Obchod na Korze

2 h 05 min. Sortie : 8 octobre 1965 (Tchéquie). Drame

Film de Ján Kadár et Elmar Klos

Arthur Debussy a mis 9/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Les années 1960 furent particulièrement riches et fécondes pour le cinéma tchécoslovaque, malgré la censure. La Nouvelle Vague locale fut un des grands mouvements artistiques en Europe, pendant ces années, avec l'éclosion de réalisateurs et de réalisatrices de talent. Mais des réalisateurs plus âgés ont également pu briller.

C'est le cas du duo formé par Ján Kadár et Elmar Klos, qui avaient respectivement 47 et 55 ans au moment de la sortie de leur chef-d’œuvre Le Miroir aux alouettes, quand les cinéastes de la Nouvelle Vague avaient la trentaine. Dans ce film, Kadár et Klos démontrent tout leur savoir faire en matière de réalisation, tout en insufflant un esprit profondément ironique et contestataire typique de l'époque.

L'histoire se passe en 1942, dans la République Slovaque, état devenu "autonome" en 1939, mais en réalité vassalisé par l'Allemagne nazie. Le duo de réalisateurs, également scénaristes, montre de façon comique et terrible à la fois comment le fascisme et l'antisémitisme ont gagné la population, des élites aux gens du peuple, en prospérant lentement mais sûrement...

Avec talent, ils nous font éprouver de la sympathie pour cet anti-héros, Tono, qui se retrouve embrigadé malgré lui dans cette mascarade visant à spolier les Juifs... avant de les exterminer. Il s'attache à cette vieille Madame Lautmann, et nous aussi. La fin n'en est que plus terrible... Le Miroir aux alouettes est une longue descente aux enfers, d'un homme, d'un pays, et de tout un continent, qui s'abîment dans le Mal absolu...

Alternant moments de rire, foncièrement drôles ou grinçants, et séquences glaçantes, Le Miroir aux alouettes est un tour de force magistral, qui n'a absolument pas vieilli (hélas), et qui mérite amplement son Oscar du Meilleur film étranger. Il rejoint aussi la liste des meilleurs films réalisés sur la Shoah. Qu'il faut remontrer de nouveau, particulièrement aujourd'hui où le fascisme ressurgit partout dans le monde...

Amadeus
7.9
3.

Amadeus (1984)

2 h 40 min. Sortie : 31 octobre 1984 (France). Biopic, Drame

Film de Miloš Forman

Arthur Debussy a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Certes c'est plutôt un film international, mais tout de même réalisé par un des plus célèbres réalisateurs tchèques et tourné à Prague

Les Petites Marguerites
7.2
4.

Les Petites Marguerites (1966)

Sedmikrásky

1 h 14 min. Sortie : 15 novembre 1967 (France). Comédie, Drame, Expérimental

Film de Věra Chytilová

Arthur Debussy a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Film à la fois ambitieux et léger, totalement irrévérencieux et frondeur, tantôt nihiliste tantôt philosophique et sociologique, à la fois expérimental et tout à fait compréhensible, pop et arty, intello et décomplexé... Un long métrage superficiel en apparence, pour mieux dénoncer l'horreur des régimes totalitaires, dont bien sûr l'URSS.

C'est toujours un très grand plaisir de découvrir de vrais cinéastes, plus encore quand il s'agit d'une femme et qu'on découvre un film aussi accompli et réussi. Les Petites Marguerites est un long métrage à la fois très contextualisé (issu de la République Tchèque, dans les années 60, sous le rideau de fer communiste) et complètement universel, annonçant le grand cirque occidental qui prévaudra à partir des années 80 (et même 60), et plus encore aujourd'hui.

Un grand merci et bravo à l'équipe de l'éditeur Malavida Films, qui font un formidable travail depuis des années pour mettre en valeur le cinéma d'Europe Centrale et de l'Est. La copie du film, aux couleurs somptueuses, était parfaite, tout comme l'important travail éditorial qui accompagne les sorties de leurs films en salle et en DVD. Merci également au Reflet Médicis pour cette belle avant-première... et à l'élégante et malicieuse Jitka Cerhová de nous avoir honorés de sa présence !

Trains étroitement surveillés
7.1
5.

Trains étroitement surveillés (1966)

Ostre sledované vlaky

1 h 33 min. Sortie : novembre 1967 (France). Comédie dramatique, Guerre

Film de Jiří Menzel

Arthur Debussy a mis 8/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

S'il ne paie pas de mine, ce film se révèle progressivement très attachant (à l'image de ses personnages), d'une certaine poésie et d'une profondeur bien plus grande que ce que laisse penser son allure modeste.

Sorte de tragi-comédie amusante, c'est en fait une œuvre inclassable, aux qualités nombreuses, et en réalité ambitieuse.

Un film de grande qualité, qui démontre tout l'apport des Tchèques à l'art européen et mondial, notamment en cette période extrêmement riche que furent les années 1960... avant le Printemps de Prague, et l'invasion des troupes soviétiques, sonnant la fin de cette semi-liberté pour jeter un grand froid sur l'Europe Centrale...

La Plaisanterie
6.2
6.

La Plaisanterie (1969)

Zert

1 h 20 min. Sortie : 28 novembre 1990 (France). Comédie dramatique

Film de Jaromil Jireš

Arthur Debussy a mis 8/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

Un film coup de poing, une très belle réussite, que l'on doit autant au talent du grand cinéaste Jaromil Jireš, l'un des pères de la Nouvelle Vague tchécoslovaque, qu'à Milan Kundera, ici scénariste, qui adapte son premier roman, et qui fut lui aussi une figure tutélaire pour la plupart des cinéastes de cet âge d'or du cinéma d'Europe Centrale. La Plaisanterie est un film particulièrement critique et insolent envers le régime communiste : à tel point qu'on se demande comment il a pu voir le jour... Mais il sera bien vite rattrapé par la censure, qui l'interdira pendant des décennies... On comprend pourquoi. Et l'on mesure la chance que l'on a de pouvoir encore découvrir ce film aujourd'hui, qui n'a pas pris une ride, hélas...

Les Diamants de la nuit
7.1
7.

Les Diamants de la nuit (1964)

Demanty Noci

1 h 07 min. Sortie : 1964 (France). Drame, Guerre

Film de Jan Němec

Arthur Debussy a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Sublime et terrible long métrage, dans lequel nous suivons la fuite éperdue de deux jeunes Juifs dans les forêts tchécoslovaques pendant la Seconde Guerre Mondiale, alors qu'ils se sont évadés d'un train devant les conduire vers un camp de concentration.

Jan Němec signe à la fois un film simple et complexe : il est simple par ses prises de vues belles et limpides. Complexe par sa narration, qui entremêle trois dimensions de l'intériorité de l'un des personnages : ce qu'il vit au présent, avec son compagnon de fuite ; ses hallucinations et fantasmes ; le désir qu'il a de retrouver son chez soi, à Prague.

Cette combinaison d'images et de temporalités qui se croisent et s'entrechoquent font des Diamants de la nuit à la fois un film sensoriel et un film cérébral. Il faut accepter de se perdre dans l'espace mental du fuyard. Dès lors, on ne peut qu'être qu'estomaqué (positivement) par la beauté de certaines de ces visions, et en même temps choqué par ce qui arrive à nos deux jeunes héros.

Jan Němec signe un premier long métrage très fort. S'il n'est pas totalement maîtrisé, il démontre une maturité certaine et une confiance dans le pouvoir du cinéma, qui dans ses mains semble pouvoir tout raconter et tout montrer.

Un jour un chat
7
8.

Un jour un chat (1963)

Až přijde kocour

1 h 45 min. Sortie : 8 décembre 1965 (France). Comédie, Fantastique

Film de Vojtech Jasny

Arthur Debussy a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Film culte de la Nouvelle Vague tchécoslovaque, Un jour un chat est une pépite irrésistible so sixties, avec son esthétique parfois psychédélique et sa musique qui le fait pencher un peu (mais pas totalement) vers la comédie musicale américaine ou française (Demy).

Vojtech Jasny dynamite le cinéma de l'époque et le terne réalisme socialiste qui devait être de rigueur en Tchécoslovaquie. Ici, les sentiments enfouis au plus profond des gens se libèrent, et les personnages deviennent monochromes en fonction de leurs actes et de leurs pensées : les amoureux en rouge, les menteurs ou infidèles en jaune, etc.

Outre que la mise en scène et les effets spéciaux sont bluffants, la liberté de ton et même l'insolence du cinéaste, qui pousse à détruire les carcans sociaux et à lutter contre l'hypocrisie de la société, sont incroyables dans ce pays sous régime dictatorial, qui use et abuse de la censure...

Un jour un chat est un film profondément humaniste, drôle, léger... mais aussi plus profond qu'il n'en a l'air. C'est clairement un des meilleurs films de la Nouvelle Vague tchécoslovaque, qu'il a contribuer à lancer à sa sortie, en 1963.

Alouettes, le fil à la patte
6.4
9.

Alouettes, le fil à la patte (1969)

Skrivanci na niti

1 h 30 min. Sortie : 16 mai 1990 (France). Comédie, Drame, Romance

Film de Jiří Menzel

Arthur Debussy a mis 8/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

Alouettes, le fil à la patte est plutôt considéré comme un Menzel mineur. Or c'est tout le contraire. Il se hisse largement à la hauteur de Trains étroitement surveillés à mon sens. C'est une critique frontale et très drôle du régime communiste. Incroyable de se dire que le film a été tourné en 1968... L'époque était au dégel et au Printemps de Prague... avant l'invasion soviétique et russe. Le film sera terminé en 1969. Jiří Menzel le dit lui-même dans son autobiographie, il pensait que le régime avait appris de ses erreurs et était prêt à l'auto-critique. Hélas, il n'en était rien... Le film sera interdit de diffusion, et ne ressortira qu'en 1990, année où il gagnera l'Ours d'Or à Berlin, un prix amplement mérité.

Ce long métrage est un peu comme un mix entre le cinéma de Philippe de Broca, léger et gentiment grivois, et l'ironie mordante de Milan Kundera, dont le film La Plaisanterie de Jaromil Jires, adapté de son œuvre avec lui-même au scénario, sera un exemple éclatant de son génie littéraire et comique.

Alouettes, le fil à la patte est un portrait collectif de prisonniers politiques et de prisonnières, enfermées car elles ont tenté de quitter le pays. Chaque personnage masculin effectuait un métier considéré comme bourgeois et a sa propre personnalité. Ils sont tous ostensiblement critiques du régime, mais il ne peut pas leur arriver grand chose de plus - en principe - vu qu'ils sont déjà prisonniers. Alors ils se lâchent, pour notre plus grand bonheur. Mais le régime veille.

Le film est adapté de nouvelles de Bohumil Hrabal, et ce dernier a effectué le scénario du long métrage. On retrouve son humour omniprésent et burlesque, son humanisme profond, son goût pour l'anticonformisme. Jiří Menzel a travaillé à de nombreuses reprises avec lui, et le tandem nous a offert de merveilleux films, dont le plus connu est bien sûr Trains étroitement surveillés.

Notons que la mise en scène de Menzel est magnifique ici, dès les premiers plans sur une décharge de métaux, qui semble sans fin. La photographie en couleur de Jaromír Sofr est somptueuse, et la restauration récente du film rend justice aux sublimes images qu'il a tournées. Jiří Menzel était en outre un excellent directeur d'acteurs, et il nous gratifie encore ici d'une réjouissante galerie de personnages.

Le film est complètement jubilatoire, du début à la fin. C'est une œuvre profondément attachante, avec plein de saynètes tendres et amusantes. Il y a aussi des passages beaucoup plus lourds et t

L'Oreille
7.3
10.

L'Oreille (1970)

Ucho

1 h 34 min. Sortie : 2 janvier 1991 (France). Drame, Thriller

Film de Karel Kachyna

Arthur Debussy a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

L'Oreille de Karel Kachyňa compte parmi les grandes réussites du cinéma tchécoslovaque des années 60-70, et est presque un film culte. C'est une tragicomédie sur la paranoïa sous l'ère communiste, qui s'empare d'un apparatchik, un vice-ministre, qui se met à paniquer avec sa femme lorsqu'ils apprennent que son supérieur vient d'être évincé, et qu'une purge à eu lieu, ses proches ayant été arrêté par le régime.

On suit alors notre anti-héros et sa femme se prendre le bec chez eux, avec quelque litres d'alcools dans le sang, se hurlant dessus alors qu'ils se savent épiés et sous écoute. La mise en scène, géniale, nous met mal à l'aise pendant tout le film, tout en faisant preuve d'une grande maestria visuelle, avec une belle gestion du noir et blanc, de l'ombre et de la lumière.

Surtout, le film sait à la fois être inquiétant et parfois très drôle, avec un humour caustique et énormément d'irrévérence politique. Il fait partie de ces films dénonçant clairement le régime communiste, comme La Plaisanterie de Jaromil Jireš, sur un scénario de Milan Kundera. L'Oreille aura la même trajectoire et sera immédiatement censuré, avant de sortir enfin en 1990, une fois le régime communiste mis à bas.

Aujourd'hui, le film peut paraître un peu désuet et ne pas verser assez dans le côté thriller. Mais c'est se tromper sur les intentions des auteurs il me semble, qui cherchent avant tout à montrer la déliquescence des êtres humains et de la société sous le joug totalitaire, les réduisant à être pire que des animaux, prêts à tout pour survivre, quitte à s'entredéchirer. En cela, L'Oreille est un film brillant et multiple, qui n'a rien perdu de sa pertinence, plus encore à notre époque où le fascisme ressurgit et où la désinformation se propage... Tout comme la peur...

Vive la république !
7.6
11.

Vive la république ! (1965)

At' zije Republika

2 h 12 min. Sortie : 5 novembre 1965 (Tchéquie). Comédie dramatique

Film de Karel Kachyna

Arthur Debussy a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Vive la République est l'un des chefs-d’œuvre du duo Jan Procházka (au scénario) et Karel Kachyňa (à la réalisation), célèbres par ailleurs pour leur film L’Oreille (1970), œuvre pamphlétaire et charge virulente contre le régime communiste, qui sera censurée et causera la perte de Procházka.

Vive la République est une œuvre contemporaine de la Nouvelle Vague tchécoslovaque, mais ses auteurs comme cette œuvre n’en font pas partie. Procházka et Kachyňa étaient proches du régime, ils étaient donc mal vus par les jeunes cinéastes de la Nouvelle Vague, qui peinaient à se faire entendre…

Pour autant, Vive la République ne ménage pas le régime communiste ni l’histoire récente de la Tchécoslovaquie. Procházka notamment, avec son scénario, montre comment la population d’un village de Moravie s’accommode de l’occupation nazie, avant d’accueillir dans la joie les troupes soviétiques.

Mais au-delà de ces considérations politiques, Vive la République est avant tout le portrait d’un jeune enfant, Oldrich, une dizaine d’années, qui est le souffre-douleur des garçons de son village et de son père violent, qui le bât continuellement. Malgré tout, Oldrich est courageux et débrouillard, il arrive toujours plus ou moins à s’en sortir. Il peut compter sur son amitié avec Cyril, un homme rejeté par la communauté locale, et avec des animaux, notamment des chiens, qu’il aime soigner et côtoyer.

Vive la république est un film très fort sur le fond, montrant un pays dans des nuances de gris, la population pactisant plus ou moins avec les occupants, enfermée dans la jalousie et la cupidité. Sur la forme, c’est un long métrage magnifique, parfaitement maîtrisé, qui réserve des séquences d’une grande inventivité lors des nombreux rêves d’Oldrich. Il s’agit bien là d’un des plus grands films du cinéma tchèque et slovaque.

La Fête et les Invités
6.6
12.

La Fête et les Invités (1966)

O Slavnosti a hostech

1 h 20 min. Sortie : 1966 (France). Comédie, Drame

Film de Jan Němec

Arthur Debussy a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

En deux long métrages, Jan Němec s'est imposé comme une figure phare de la Nouvelle Vague tchécoslovaque. Les Diamants de la nuit était un grand film halluciné sur la Shoah, une sorte de thriller survivaliste d'auteur.

La Fête est les invités est radicalement différent. Les cadrages y sont beaucoup plus soignés et figés, renforçant l'impression d'artificialité et de malaise. Surtout, le propos y est plus élaboré et cérébral : il s'agit d'une fable grinçante sur le totalitarisme.

Le film peut être divisé en 3 parties : le picnic d'une demie douzaine d'adultes banals, avec des conversations frivoles ; ces mêmes personnages pris au piège d'un jeu malaisant par le mystérieux Rudolf (génial Jan Klusák), fils adoptif de "l'hôte", vrai tyran en puissance ; et enfin la fameuse fête, présidée par "l'hôte", qui est tout aussi tyrannique que son fils adoptif.

Chaque partie comporte son lot de situations gênantes, même si les deux dernières sont particulièrement incommodantes. Le cinéma de la Nouvelle Vague tchécoslovaque usait souvent de l'impression de malaise, pour mieux matérialiser l'horreur quotidienne de vivre dans une société totalitaire. La Fête et les invités est un sommet du genre, qui s'imprime durablement dans la mémoire du spectateur.

Les dialogues et les situations sont très inspirés, et profondément ironiques et mordants. Le film s'en prend violemment au régime communiste de l'époque, mais par des moyens détournés, par des métaphores et des sous-entendus. Néanmoins la fable est assez limpide, et le pouvoir, sans forcément tout comprendre de ce film, ne s'y trompera pas. Il sera censuré, et la carrière de Jan Němec sera brisée...

Il s'exilera après l'invasion soviétique de 1968, il ne retournera en République Tchèque qu'en 1990, après la Révolution de Velours. Lui qui semblait promis à un avenir brillant n'aura réalisé qu'une douzaine de longs métrages durant toute sa carrière...

Quelque chose d'autre
6.8
13.

Quelque chose d'autre (1963)

O necem jiném

1 h 24 min. Sortie : 25 mai 1966 (France). Drame, Sport

Film de Věra Chytilová

Arthur Debussy a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Věra Chytilová, ou le cinéma comme il devrait toujours être : libre, frondeur, audacieux, beau, engagé. Avec Quelque chose d'autre, la cinéaste tchèque contribue à poser les bases de ce que deviendra la Nouvelle Vague tchécoslovaque, par le biais d'une esthétique façon cinéma-vérité, mais savamment travaillée. Věra Chytilová nous livre une véritable masterclass, à la fois visuellement et scénaristiquement. Chaque plan est une merveille d'élégance et de beauté, tout en restant dans l'épure. Et l'écriture est tout autant réussie, avec ce parcours parallèle de deux femmes, toutes deux enfermées par les normes d'une société patriarcale. Courrez voir ce film, c'est une petite merveille !

Le Plafond
7.1
14.

Le Plafond (1962)

Strop

42 min. Sortie : 1962 (Tchéquie). Drame

film de Věra Chytilová

Arthur Debussy a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Le Plafond est le premier film officiel de Věra Chytilová. Elle a réalisé plusieurs courts métrages pendant ses études à la FAMU, mais elle n'en était pas satisfaite. Le Plafond est son film de fin d'études, et il est vrai qu'elle signe un moyen métrage déjà mature et maîtrisé. Si la caméra est encore parfois maladroite ou hésitante, le cinéma à venir de Věra Chytilová est déjà en place ici.

Elle suit une jeune étudiante, Martha, qui sèche les cours pour tenter de devenir mannequin. Tout le propos du film est de voir Martha s'émanciper de son statut de femme objet pour prendre son indépendance et se soustraire au regard masculin qui la réifie.

Il lui faudra subir un certain nombre de vexations avant de se rendre compte de l'environnement matérialiste et toxique de la mode, pour s'enfuir de la ville (Prague ?) et retrouver son humanité dans un train, avec des "vrais gens", modestes mais généreux.

Comme à son habitude, Věra Chytilová use d'une mise en scène (post)moderne, avec poses millimétrées de l'actrice principale, photographie soignée, montage organique et approche méta. C'est un excellent film, qui démontre combien les débuts de la cinéaste tchèque furent fulgurants et prometteurs, ce qu'elle confirmera très vite par la suite.

Un sac de puces
6.9
15.

Un sac de puces (1962)

Pytel blech

43 min. Sortie : 15 mars 1963 (Tchéquie). Drame

Documentaire de Věra Chytilová

Arthur Debussy a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Un sac de puces est un moyen métrage extrêmement ambitieux et réussi, qui démontre le talent fou de Věra Chytilová dès ses débuts. Elle filme de façon quasi documentaire et sociologique un internat de jeunes filles qui travaillent dans une usine textile.

Mais Věra Chytilová ne s'arrête pas là : la grande majorité des plans sont tournés en caméra subjective, le public adoptant le point de vue d'une jeune fille, Eva, à travers les yeux de laquelle on voit tout le film. Les jeunes filles interagissent avec Eva, ce qui rend notre immersion dans ce film totale.

Une fois de plus, Věra Chytilová use d'un dispositif filmique particulièrement intelligent et moderne. C'est aussi très beau, et ça évite que le film tombe trop dans le classicisme ou l'artificialité. Le résultat est spontané et subtil, la caméra captant toutes les inflexions du visage des jeunes filles, notamment de Jana, qui devient progressivement l'héroïne principale.

Un sac de puces est un moyen métrage remarquable, qui transcende l'exercice de style du film de cinéaste débutant(e). Premier film vraiment professionnel de Věra Chytilová, une fois ses travaux d'études terminés, il annonce une grande artiste en devenir. C'est une petite merveille à découvrir de toute urgence !

Un cas pour un bourreau débutant
6.6
16.

Un cas pour un bourreau débutant (1970)

Případ pro začínajícího kata

1 h 46 min. Sortie : 3 août 1970 (France). Drame, Fantastique

Film de Pavel Juráček

Arthur Debussy a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

J'attendais beaucoup - énormément même - de ce film, du fait de son pitch particulièrement prometteur. Et mes attentes ont été en partie comblées, en partie déçues, mais le positif l'emporte largement. Mettre en scène les aventures de Gulliver de Jonathan Swift dans la Tchécoslovaquie des années 1960, en ajoutant une grosse louche de Kafka : voilà un projet qui avait tout pour me plaire.

Dans l'ensemble, le film tient cette promesse. Il regorge de scènes marquantes, visuellement très inspirées, dans un enchaînement de plans qui donne le tournis. On est vite perdu dans cette intrigue absurde, mais c'est ce qui fait son charme. On retrouve bien l'univers de Swift, avec notamment cette fameuse cité volante de Laputa, qui inspirera également un certain Hayao Miyazaki. Je regrette que les images de Laputa dans le film soient très peu nombreuses, c'est une invention littéraire tellement mythique que j'aurais aimé en voir davantage... C'est sans doute là ma déception principale.

Autre déception : le film est un peu inégal, les scènes les plus bluffantes et originales visuellement se trouvent plutôt dans la première moitié du film, voire dans le premier tiers, même si tout du long le film reste intéressant, avec ce mélange inoubliable de folie et d'inquiétude kafkaïenne.

Malgré tout, au total Un cas pour un bourreau débutant est un excellent film de la Nouvelle Vague tchécoslovaque, qui mériterait d'être davantage connu. Par ailleurs, Pavel Juráček semble avoir été quelqu'un de particulièrement intègre et à la personnalité attachante, il était très apprécié de ses collègues cinéastes. Il a co-écrit un certain nombre de scénarios de ses célèbres compatriotes, dont Les Petites marguerites de Věra Chytilová, soit l'un des films absolument cultes de la Nouvelle Vague, excusez du peu.

Pavel Juráček sera d'ailleurs le seul cinéaste à signer la Charte 77, or il fallait un sacré courage pour oser s'exprimer ainsi contre le régime communiste, ce n'est pas pour rien qu'il fut le seul à le faire... Hélas, Un cas pour un bourreau débutant sera interdit de diffusion et la carrière de Pavel Juráček sera brisée, il ne tournera plus jamais de film, et décèdera en 1989 à seulement 53 ans...

Du courage pour chaque jour
6.9
17.

Du courage pour chaque jour (1965)

Kazdy den Odvahu

1 h 26 min. Sortie : 9 novembre 1966 (France). Drame

Film de Evald Schorm

Arthur Debussy a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Pour son premier long métrage de fiction, Evald Schorm frappe fort. Il livre un film sombre et désespéré, sur une jeunesse aux idéaux trahis par le régime communiste, et complètement perdue. Si le film débute comme une chronique sentimentale moderne et légère façon nouvelle vague, bien assez vite il montre la chute et la déchéance du jeune héros, Jarda, ouvrier modèle qui se rend compte que tout n'est que supercherie, tandis que sa petite amie, Vera, sent qu'il perd pied et peine à renouer le dialogue avec lui, complètement impuissante face à sa descente aux enfers. Photographié dans un magnifique noir et blanc, excellemment interprété par le trio d'acteurs Jan Kačer (Jarda), Jana Brejchová (Vera) et Josef Abrhám (Borek), Du courage pour chaque jour est une œuvre où règne l'angoisse existentielle et le questionnement éthique. Evald Schorm fut considéré comme le maître spirituel de la Nouvelle Vague tchécoslovaque, et effectivement, il apparaît ici et dans ses interviews comme l'un des cinéastes de ce mouvement les plus préoccupés par l'existence physique et morale de ses compatriotes sous le joug d'un régime totalitaire, qui a détruit la société et les individus.

L'Incinérateur de cadavres
7.6
18.

L'Incinérateur de cadavres (1969)

Spalovach mrtvol

1 h 40 min. Sortie : 21 juillet 1971 (France). Drame, Thriller, Épouvante-Horreur

Film de Juraj Herz

Arthur Debussy a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

L'Incinérateur de cadavres est un film complètement fou, qui va très loin dans la noirceur, le cynisme... et l'horreur. Il se place du point de vue d'un employé d'un crématorium tchèque, pendant les années 1930, très zélé dans son métier, incitant tout le monde à souscrire à un contrat d'incinération, à grand renfort d'idéologie pseudo-bouddhiste, l'incinération étant censée couper court à toute souffrance humaine.

Lorsqu'un de ses anciens amis nazis tente de le faire adhérer à ses thèses et lui indique qu'il a probablement du sang allemand dans les veines, notre incinérateur professionnel vit comme une révélation, et se fait un devoir d'exterminer un maximum de personnes, en priorité des Juifs.

Juraj Herz marque avec ce film à la fois par son propos très osé et jusqu’au-boutiste, servi par une esthétique très maîtrisée et audacieuse, qui fait de L'Incinérateur de cadavre un objet filmique complètement unique... et très dérangeant. Âmes sensibles s'abstenir... Je dois dire qu'assez vite j'ai eu la nausée...

Et en même temps, c'est un monument d'irrévérence, intelligent, un véritable pamphlet filmique, qui dénonce la collusion qui a pu exister entre certains Tchèques et l'Allemagne nazie. Mais plus largement, le film questionne la folie qui réside dans chaque être humain, et atteint un propos universel.

En 1969, la Nouvelle Vague tchécoslovaque était à son apogée de maturité et d'effronterie, les cinéastes de l'époque osaient tout. Avant que le couperet du régime s'abatte, et que la censure brise dans son élan, à jamais, ce mouvement cinématographique. L'Incinérateur de cadavres en est l'un des exemples les plus brillants et les plus extrêmes, c'est une expérience hardcore et inoubliable... Hélas, l'être humain d'aujourd'hui ressemble beaucoup à celui de l'époque...

Éclairage Intime
6.5
19.

Éclairage Intime (1965)

Intimni Osvetleni

1 h 15 min. Sortie : 8 avril 1965 (Tchéquie). Comédie

Film de Ivan Passer

Arthur Debussy a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Célèbre film de la Nouvelle Vague tchécoslovaque, Eclairage intime pâtit de sa réputation de film culte. En effet, parmi les films de ce mouvement, il y en a un paquet nettement plus ambitieux et formellement éblouissants. La forme et le fond modestes d'Eclairage intime jouent contre lui. Mais si ce long métrage possède un tel statut, ce n'est pas pour rien.

Il faut se rappeler qu'Ivan Passer était l'un des deux compagnons de route indissociables des débuts tchèques de Miloš Forman, avec Jaroslav Papoušek. A eux trois, ils ont co-scénarisé les premiers films de Forman, jusqu'à Aux feu les pompiers inclus. Passer était d'ailleurs co-scénariste de Forman dès son tout premier moyen métrage, L'Audition. Passer a donc fortement contribué au succès fulgurant de Forman, qui en a fait l'une des figures majeures de la Nouvelle Vague tchécoslovaque.

Or dans Eclairage intime, on retrouve tout ce qui fait le sel des premiers films de Forman : une mise en scène soignée, des séquences semi improvisées, des acteurs non professionnels (mais très talentueux), et surtout cet amour amusé des gens, ce goût pour leur maladresse, leurs ambitions déçues, pour leur amitié indéfectible, et surtout pour leur soif de vivre envers et contre tout.

Eclairage intime est donc un film très appréciable, frais et léger comme une soirée d'été, où l'on aurait bu joyeusement et refait le monde avec ses amis. Tout le monde ne sera pas sensible à ce film, ce que je comprends tout à fait. Mais pour ma part, j'ai été embarqué dans le monde gentiment poétique et anticonformiste d'Ivan Passer.

Chronique morave
20.

Chronique morave

Vsichni Dobri Rodaci

2 h. Drame

Film de Vojtech Jasny

Arthur Debussy a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Si Chronique morave de Vojtěch Jasný manque de rigueur formellement, son propos est très fort. Jasný fait le bilan de 10 ans de communisme et de collectivisation des terres agricoles dans une petite ville de Moravie. Et le constat est sans appel : tout a été détruit, la politique, l'économie, et plus encore le sens moral de la population.

A l'arrivée des troupes soviétiques en 1948, les opportunistes locaux sont entrés au parti communiste. Et ceux qui étaient auparavant amis sont irrémédiablement divisés : les profiteurs extorquant leurs ex-camarades sans vergogne.

Chronique morave est un film qui commence avec légèreté, mais qui devient progressivement tragique et désabusé. C'est le reflet de la Tchécoslovaquie de 1968, avec des artistes qui s'expriment enfin librement sur la réalité de leur pays... avant que leur parole soit bâillonnée définitivement avec l'arrivée des chars. Vojtěch Jasný livre un film sans concession... qui sera bien entendu censuré.

Personne ne rira
21.

Personne ne rira (2025)

Nikdo se nebude smat

1 h 34 min. Sortie : 10 décembre 2025 (France). Comédie, Drame

Film de Hynek Bocan

Arthur Debussy a mis 7/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

Une pépite méconnue de la Nouvelle Vague tchécoslovaque, sur laquelle plane l'esprit corrosif de Milan Kundera. Mais son réalisateur Hynek Bočan parvient à livrer un film original, à la fois profond et léger, avec une belle esthétique typique des années 60, élégante et amusante. Avec toujours l'ombre du régime communiste qui plane sur l'existence des individus, la légèreté étant toute relative... et l'amertume bien présente.

Les Petites perles au fond de l'eau
6.2
22.

Les Petites perles au fond de l'eau (1966)

Perličky na dně

1 h 47 min. Sortie : 7 janvier 1966 (Tchéquie). Comédie dramatique, Sketches

Film de Jiří Menzel, Evald Schorm, Jan Němec, Jaromil Jireš et Věra Chytilová

Arthur Debussy a mis 7/10.

Annotation :

Je ne m'attendais pas à ça... Un film à sketchs complètement barge et inclassable, adapté du recueil de nouvelles éponymes de Bohumil Hrabal. Comme tout film à sketches, ceux-ci sont assez inégaux, mais tous sont unis par une certaine bizarrerie.

On commence doucement par La Mort de Monsieur Baltazar, de Jirí Menzel. Comme beaucoup des films de Menzel, l'atmosphère est détendue, amusante, un peu loufoque, mais rien d'extravagant. Il s'agit de plusieurs personnages qui devisent lors d'une course de motos, qui voit affluer un public massif, en quête de sensations. La mise en scène est correcte mais pas incroyable, on a l'impression que Menzel ne se foule pas trop.

Puis vient Les Imposteurs, de Jan Němec. Un film de facture classique pour ce cinéaste réputé iconoclaste et féru d'expérimentations. Seule bizarrerie majeure, les acteurs, vraiment très vieux et qui semblent très malades (surtout l'un des deux acteurs principaux), ce qui rend assez vite mal à l'aise...

La Maison de la Joie d'Evald Schorm est de loin le plus fou et le plus original. Un duo de bureaucrates veulent faire signer un contrat d'assurance vie à un monsieur à la campagne, qui est à la fois tanneur et artiste-peintre (sic). Il vit, déjà bien âgé, avec sa vieille mère, et il peint sous sa direction dans un style d'art brut, au milieu d'animaux vivants (beaucoup de lapins) et d'autres morts, dont il ne reste que la peau... Le tout avec une musique d'orgue parfois brève et assourdissante, dans une atmosphère de folie campagnarde et gothique vraiment très particulière.

Le film qui suit, Bistrot "Le Monde", est signé Věra Chytilová, et c'est clairement l'un des meilleurs, avec celui qui précède et celui qui suit, de Jaromil Jireš. Le segment de Věra Chytilová est tourné comme un film noir américain, dans l'ambiance nocturne d'un bistrot où se passe en même temps un suicide et un mariage du tonnerre (bonjour l'ambiance :-)). Visuellement, c'est le plus beau des sketchs avec celui de Jireš. Les prises de vue de Chytilová sont élégantes, soigneusement cadrées et éclairées. La fin est assez bizarre... mais bon, comme tout le long métrage. Et comme dans tout le long métrage, l'humour est très présent, mais un humour très ironique.

Romance, de Jaromil Jireš, clôt le long métrage. C'est le segment qui fait le plus penser, instantanément, à la Nouvelle Vague française, avec ces références au cinéma (notamment Fanfan la Tulipe de Christian-Jacque, avec Gérard Philippe bien mis en avant), tout en fa

Radio Prague, les ondes de la révolte
6.6
23.

Radio Prague, les ondes de la révolte (2024)

Vlny

1 h 56 min. Sortie : 19 mars 2025 (France). Drame, Historique, Thriller

Film de Jirí Mádl

Arthur Debussy a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Radio Prague, les ondes de la révolte, un film de Jiří Mádl, énorme succès sorti en 2024 en République Tchèque et en Slovaquie, où près d'1 million de spectateurs l'ont vu là-bas (soit 1/10e de la population tchèque, le pays comptant 10 millions d'habitants), et qui vient de sortir le 19 mars en France.

On comprend son succès : c'est un excellent film, haletant, surtout dans sa 2e partie, qui évoque les événements du Printemps de Prague. Il raconte comment des résistants ont fait face aux envahisseurs soviétiques, en faisant preuve de courage et d'ingéniosité. En 1968, l'URSS et les troupes du Pacte de Varsovie envahissent la République Tchèque, qui vivait une vague de libéralisation, sous l'impulsion d'Alexander Dubček.

Les Tchèques et les Slovaques furent choqués par cette invasion de "pays amis" et accueillirent les envahisseurs sans violence, mais en résistant et en leur intimant de repartir. Le film raconte comment des résistants de la radio nationale ont tout fait pour soutenir les militants de la liberté et de la vérité, en émettant de façon pirate jusqu'au dernier moment, pour informer leurs concitoyens de ce qui se passait, alors que la propagande officielle propageait mensonge sur mensonge...

Bien évidemment, ce film résonne d'autant plus aujourd'hui, alors que la guerre en Ukraine fait rage, et que la République Tchèque compte parmi les fervents soutiens de l'Ukraine, les Tchèques connaissant très bien l'impérialisme russe pour l'avoir éprouvé dans leur chair... A Prague, les rues sont noires de monde lors des manifestations pro Ukraine, ce qui n'est hélas pas le cas en France... On ferait bien de davantage regarder ce qui se passe à l'Est, on en apprendrait beaucoup... Et je ne peux qu'inciter à aller voir ce superbe film, qui donne du courage pour résister.

Les Amours d'une blonde
7.1
24.

Les Amours d'une blonde (1965)

Lásky jedné plavovlásky

1 h 21 min. Sortie : 16 février 1966 (France). Comédie dramatique, Romance

Film de Miloš Forman

Arthur Debussy a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Les Amours d'une blonde est le film qui confirme la place prépondérante de Milos Forman au sein de la Nouvelle Vague tchécoslovaque, avec un ton irrévérencieux, moderne, et anticonformiste. Il brocarde la Tchécoslovaquie de son temps, son quotidien gris et morose, auquel la jeunesse tente tant bien que mal d'échapper. C'est aussi un film d'apprentissage, les amours de la blonde éponyme étant plutôt des amours déçus... La lucidité de Forman est parfois cruelle, mais aussi salvatrice à une époque où le régime impose une vérité alternative. Forman filme de vrais gens et la vraie vie, ce qui n'est pas toujours drôle (encore que)... mais fait un bien fou.

Le Meurtre de l'ingénieur diable
25.

Le Meurtre de l'ingénieur diable (1970)

Vrazda ing. certa

1 h 27 min. Sortie : 18 septembre 1970 (Tchéquie). Comédie, Fantastique

Film de Ester Krumbachova

Arthur Debussy a mis 7/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

Film étonnant, délirant, très drôle et profondément féministe, l'unique long métrage réalisé par Ester Krumbachová, célèbre artiste et muse de la Nouvelle Vague tchécoslovaque, est un véritable régal, anticipant de 50 ans les luttes d'aujourd'hui pour les droits des femmes, avec un regard très moderne pour l'époque. Une petite pépite, qui démontre tout le talent dont faisait preuve Ester Krumbachová, qui était co-scénariste, directrice artistique et costumière... et qui s'est révélé avec ce film brillante réalisatrice.

L'As de pique
6.6
26.

L'As de pique (1964)

Cerný Petr

1 h 30 min. Sortie : 23 novembre 1964 (France). Comédie dramatique

Film de Miloš Forman

Arthur Debussy a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Avec L'As de Pique, son premier long métrage, Milos Forman poursuit dans le style de ses deux premiers moyens métrages sortis l'année précédente, en 1963, S'il n'y avait pas de guinguettes et L'Audition.

Il use d'un mélange entre documentaire et fiction naturaliste, avec une grande majorité d'acteurs non professionnels. Mais L'As de Pique est clairement plus ancré dans l'esthétique et les préoccupations de la Nouvelle Vague tchécoslovaque. Forman met en scène des adolescents désœuvrés, lors de leur passage à l'âge adulte. Petr, l'anti héros du film, est un jeune homme nonchalant, qui n'apprécie guère son premier emploi de surveillant dans un magasin d'alimentation. Il préfère se baigner avec ses copains et sa petite amie, ou danser avec elle le twist.

A travers cette peinture d'une jeunesse semble-t-il tout à fait inoffensive, Forman est en fait corrosif pour l'époque, où le Parti Communiste régnait en maître derrière le Rideau de Fer. Il montre des jeunes fascinés par le grand ennemi, les Etats-Unis d'Amérique. Il préfère aussi s'attarder sur un "héros" vraisemblable, un simple adolescent, plutôt que de mettre en scène un héros du peuple, comme le voudrait le Parti Communiste. Et quand il filme Petr mal à l'aise à l'idée de surveiller les gens, en essayant de se faire le plus discret possible selon les recommandations de son patron, il est évident que Forman dénonce la société soviétique d'alors, où tout le monde s'épiait, dans une grande hypocrisie.

Ainsi, aujourd'hui L'As de Pique peut sembler être un film relativement banal et terne. Il est vrai qu'il y a quelques longueurs, le montage manque de punch. Mais quand on replace ce film dans son contexte, on comprend que c'est l'un des films jalons qui ont permis à la Nouvelle Vague tchécoslovaque de s'épanouir. Et puis, à l'époque Milos Forman s'adonnait avec beaucoup de talent à la comédie avec ses premiers films... Celui-ci comporte donc des passages très drôles, ce qui n'enlève rien à son charme et à son intérêt, bien au contraire !

L'Audition
6.3
27.

L'Audition (1964)

Konkurs

45 min. Sortie : 20 novembre 2019 (France). Musique

Documentaire de Miloš Forman

Arthur Debussy a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Dès ses deux premiers courts métrages, réunis en un long sous le titre de L'Audition, tout Milos Forman est là. Ce goût pour un naturalisme parfois cruel, cet enthousiasme pour la jeunesse, mal dégrossie et maladroite, effrontée et rêvant d'ailleurs, cet intérêt pour l'art et la créativité, ce questionnement sur le talent...

Et puis cette façon de filmer les visages, quasiment de tous les plans... On sent que Forman aime l'être humain. Mais ça ne l'empêche pas de brocarder tel ou tel personnage, qu'il s'agisse d'un chef d'orchestre truculent, de jeunes qui préfèrent aller voir des courses de motos plutôt que de jouer dans la fanfare locale, ou de jeunes femmes qui tentent de percer dans la musique, entre trac, swing et facéties.

On sent l'attrait des Etats-Unis et de sa culture pour la jeunesse tchécoslovaque de l'époque. Il est d'ailleurs étonnant qu'un tel film ait pu passer la censure, mais en 1963 le temps est plutôt au dégel.

Et puis quelques moments inouïs, comme ce passage où une chanteuse rabrouée lors de répétitions se transfigure sur scène, son visage illuminé d'un grand sourire. Forman savait filmer l'imperfection et la grâce, l'humanité en somme, c'est dire combien son cinéma est précieux.

Au feu les pompiers !
6.7
28.

Au feu les pompiers ! (1967)

Hori ma panenko

1 h 10 min. Sortie : 15 juin 1968 (France). Drame, Comédie

Film de Miloš Forman

Arthur Debussy a mis 6/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

Une farce grotesque et grinçante qui fustige le délitement de la société communiste tchèque. Forman se sert d'une sorte de fable pour illustrer son propos. Certains dialogues, notamment vers la fin, à propos du vol, sont irrésistibles. Dommage que l'ensemble soit lourd et caricatural. Le film ne dure qu'1h10 et pourtant le temps passe très lentement, certaines scènes étant étirées démesurément, et le comique n'étant pas franchement des plus subtils... Malgré tout, « Au feu les pompiers » reste un film saisissant sur l'échec du communisme, Forman a su le mettre en image avec un certain brio.

Les Fruits du paradis
6.4
29.

Les Fruits du paradis (1970)

Ovoce stromů rajských jíme

1 h 38 min. Sortie : 31 juillet 1970 (Tchéquie). Comédie dramatique

Film de Věra Chytilová

Arthur Debussy a mis 5/10.

Annotation :

Une grosse déception... Le film commence très bien, par un beau générique et une magnifique séquence d'introduction, représentant Adam et Eve dans le jardin d'Eden... Puis le film s'effondre sur lui-même.

Il narre les "aventures" d'un trio de personnages : Eve, Joseph son mari et Robert, dont elle s'éprend. Chytilová étire des séquences peu intéressantes (voire ridicules...) plus que de raison pendant tout le film, ce qui fait qu'on s'ennuie la plupart du temps... sans rien comprendre à ce qui se passe à l'écran tellement c'est abstrait et abscons...

En sortant j'ai découvert un plus long résumé (ou plutôt pitch) du film que ce qui est proposé sur Sens Critique, et sans ça, il aurait été impossible de deviner l'histoire globale du long métrage...

Par contre ce film a un atout : sa bande son, qui au début et à la fin du long métrage est bluffante, avec de magnifiques harmonies vocales et un style très impressionnant, qui réapparaît de temps en temps au fil de l'histoire. Dommage que tout le film ne soit pas à l'image de ces séquences de début et de fin et de cette bande-son ambitieuse... et réussie, elle.

Liste vue 772 fois

2