Alors qu'au XIXem siècle Baudelaire était censuré pour ses vers qui étaient considérés comme des outrages aux bonnes mœurs, voilà qu'à notre époque tout cela est bien fini et des romans érotique et pornographique deviennent des Best-sellers. Mais est-ce une bonne chose, finalement ?


Cinquante Nuances de Grey, de Mme EL James fait fureur un peu partout dans le monde depuis quelque temps déjà … Adulé principalement par les critiques britanniques, en France il est plutôt classé de « Porno pour ménagère ». Cela m'a intriguée … J'ai entendu beaucoup de choses sur ce livre ; « porno pour ménagère », déjà. J'ai aussi entendu dire que « C'est trop bien, c'est libérateur pour les femmes, cela exprime des envies refoulées par la plupart ». J'étais assez sceptique. Voyons, que me promet la quatrième de couverture ? « Romantique, libérateur et totalement addictif, ce roman vous obsédera, vous possédera et vous marquera à jamais ».
Hmmm …


Je dois avouer, je ne m'attendais pas à de la grande littérature. Et de ce point de vue … Et bien, j'avais raison. Moi qui en général aime plutôt lire du classique, j'ai eu l'impression de littéralement tuer mes neurones. Et puis j'ai compris : À la base, Fifty Shades Of Grey était une fan fiction de Twilight. Bon, ceci explique peut-être que ce roman est un champ de stéréotypes.


Cela pourrait d'abord expliquer ces personnages nian nian et … Stéréotypés – oui je vais beaucoup me plaindre de ça. Nous avons Anastasia, jeune étudiante en littérature, petite vierge innocente de 21 ans, qui évidemment est belle mais se trouve « trop maigre, trop moche, trop blanche ». De l'autre, Christian Grey, un malade du BDSM, du contrôle, de la domination qui a 27 ans, est PDG d'une multinationale, est richissime, orphelin, joue du piano comme Elton John, sait piloter les hélicoptères et les planeurs, fait la cuisine comme Maïté et est beau comme une statue grecque. Il est décrit comme étant tellement charismatique que TOUTES les filles deviennent gagas devant lui – même la mère d’Ana bave devant lui. Nous passerons sur les autres personnages secondaires inutiles.
L'histoire ? Je m'attendais à une histoire d'amour chiante comme dans Twilight, mais avec du sexe dedans. Oulala la grosse erreur. A part peut-être le fait que Ana soit aussi ennuyante que Bella, je ne vois pas DU TOUT le rapport avec Twilight. Du sexe, ça oui il y en a. Beaucoup. Trop. Je vois « romantique » à l'arrière. Bon, des scènes érotiques, ça me dérange pas … Mais là c'est juste abusé. À partir du chapitre 8 (il y en a 26 en tout), nous avons une à deux scènes de cul tous les deux chapitres. Une véritable overdose … Et encore, si seulement ce n'était pas toujours les mêmes … Mais à part quelques ajouts BDSM à la fin du bouquin, c'est tout le temps la même chose. Les « préliminaires » sont toujours pareils et là … Le gros gros gros WTF de ce livre … D'accord, je veux bien que ça soit un livre basé sur une relation charnelle, mais … Christian est quand même capable d'éjaculer deux fois en quelques minutes. Dans 90% des cas, une scène de cul/pratiques sexuelles non incluant une pénétration, mais engendrant une éjaculation est suivie … De la même chose. Non seulement les scènes de sexe sont redondantes, mais on en fait une véritable overdose. C'est abominable.
Alors que c'était censé être le cœur du livre, c'est au final vraiment, vraiment raté.


On dit que les femmes aiment à s'identifier à cette histoire. Ok. Qui a envie qu'on lui enfonce un pouce dans le vagin pour ensuite être forcé à sucer ce même pouce pendant qu'on lui dit « Je veux que tu te goûtes. Suce fort bébé. » ? Qui a envie de se faire baiser pendant qu'elle a ses règles ? Qui a envie de lécher un torse poilu ? Qui a envie de sucer des orteils ? Qui a envie d'être avec un homme qui fait des choses tellement hard qu'il fait signer un contrat de confidentialité ? Qui a envie d'être appelée « la Soumise », et d'être une esclave qui doive respecter une vingtaine de règles pour éviter une punition très douloureuse ?
Ai-je oublié de mentionner que lorsque Christian enfonce son pouce dans le vagin de Ana, il vient juste de la dépuceler, et il y a donc du sang ?
Ce bouquin regorge de truc tellement immonde que c'est difficile à croire que certaines femmes aimeraient se retrouver dans ces situations.


Pour la forme, j'ai évidemment parlé des scènes de sexe très redondantes. Mais entrons un peu plus dans les détails. Comme dit plus haut, le bouquin indique qu'il y a du romantisme. NON NON NON ET NON. Ce bouquin est tout sauf romantique. « Il me pilonne », « Suce fort », « Me masse le cul » … Et j'en passe et des meilleurs. Les expressions utilisées ne sont absolument pas romantiques. Cela laisse place à des scènes de baise vulgaire et sans fond. Je n'ai rien contre ça. Mais ce n'est pas ce que promet le livre.
Aussi, j'ai trouvé cela insupportable d'avoir un récit parasité par les pensées d'Ana. Pourquoi parasité ? Car certaines des pensées d'Ana se retrouvent en italique en plein milieux de phrases. Où est le problème ? Me direz-vous. Et bien le problème c'est que nous avons déjà un récit de … Des pensées de sa conscience ? Je ne sais pas comment expliquer. Sa conscience est présente comme un personnage bien distinct dans la tête d'Ana, accompagné d'un autre personnage distinct : sa « déesse intérieure ». Petite chose qui apparaît comme ça au début du livre sans que l'on sache bah … Qu'est ce que ça représente exactement pour elle. Pour ma part je me suis dit que c'était peut être son coté « dark », car étant toujours en opposition avec la conscience. Je ne sais pas, cela reste assez sombre pour moi.


J'ai trouvé certaines choses assez drôles.
Déjà, tout au long du livre le mot « zip » est utilisé pour désigner … Une fermeture éclaire. Pas une seule fois le mot « fermeture » apparaît. Tout le temps, on a le mot « zip ». Alors imaginez dans une scène hot « Il descend lentement mon zip »...
Aussi, il y a parfois des références à des choses de la culture classique britannique. Page 342 « Je songe qu'aucun homme n'est une île, sauf peut être Christian Grey. » Nous avons une petite note au mot « île » qui est : « Référence au poème No Man is an Island de John Donne. Hm d'accord. Mais et si on ne connaît pas ce poème ? Il n'y a aucune explication. Bref, un soupir de plus sur le grand nombre que ce bouquin m'a arraché …


Il y a parfois des choses qui paraissent importantes, mais en fait ne le sont pas. Qui n'ont aucune explication.
Au tout début du livre, dans le premier chapitre, on nous décrit Kate la meilleure amie de Ana qui évidemment est une blonde plantureuse absolument magnifique. Ensuite, Ana se rend dans les bureaux de M. Grey pour l'interview. Et là, toutes les filles que croisent Ana sont blondes. Toutes les employées de M. Grey sont blondes. Au départ j'étais « WTF elle a un problème avec les blondes l'auteur ou quoi ? ». Et puis Ana commence à se demander pourquoi il y autant de blondes. J'ai commencé à me dire que peut-être il y avait une raison. J'ai laissé couler et … Non. Ana se demande pendant trois pages pourquoi il y a des blondes partout, puis ce « détail » est totalement évincé de l'histoire, comme si de rien n'était.
Autre chose. Tout à la fin cette fois, Christian et Ana sont en Georgie, mais Christian doit repartir pour régler « une situation ». Cet élément perturbe énormément Ana pendant les deux derniers chapitres et … Non. Aucune explication à la fin.


Pour conclure tout ça … Le fond, ce n’est pas ça. Les personnages sont stéréotypés (tout le long du livre j'ai eu envie de mettre des gifles à Ana), l'histoire est chiante et tient à peine debout parfois, on a un lot de personnages secondaires inutiles, car même lorsque Ana et Christian ne sont pas ensembles, ils se parlent par mail. La forme, ce n’est pas ça non plus. On garde bien trop de traces de la fan fiction amatrice de base, les scènes de sexe sont tellement nul et mal faite qu'on a l'impression que Christian est un éjaculateur précoce capable de baiser 2 fois de suite ce qui est totalement improbable, à part les quelques références classiques littéraires le vocabulaire est pauvre ; « cul », « pilonne », reviennent bien trop souvent … Tout comme le lexique autour du verbe « rougir ». Ana passe son temps à rougir au moindre truc et le vocabulaire varie très peu.


Les plus :



  • Pas trop long

  • Rapide à lire

  • Assez gros pour servir de cale-porte.


Les moins :



  • Personnages stéréotypés.

  • Histoire chiante.

  • Éléments improbables.


Je tiendrais à rajouter que malgré tout ça, EL James a réussi à faire à la fois une histoire trop WTF mais à la fois très prévisible. Bravo.

VagaSnake
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le 8 janv. 2017

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VagaSnake

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