C'est l'accident bête quand on est un artiste renommé.
On a plein de projets sur le feu, des débuts de scénario intéressants éparpillés ça et là sur le bureau, des esquisses de scènes mythiques attendant de trouver le film dans lequel elles s'inséreront, si bien que quand l'éditeur appelle le Dimanche soir pour boucler le projet "consumés" le lendemain, on se dit "Ho la vache, où-est ce que j'ai mis la fin de cette putain d'histoire ?"...
Et quand on a un nom bien connu dans un milieu artistique, même s'il ne s'agit pas de celui dans lequel on s'essaie, la tendance doit être forte de le balancer tel quel, j'entends sans "vraie" fin.


Autant poser le décor, je suis un concret. J'aime que les choses soient claires et non soumises à l'imaginaire du lecteur, et pour cause, je suis un lecteur dont l'imaginaire est un chantier laissé à l'abandon. J'abhorre les livres mystérieux destinés à un public clairement au-dessus de la moyenne intellectuelle nationale qui s'offrent les louanges de critiques littéraires renommés, ceux-là même qui considèrent le polar comme la dernière roue du carrosse littéraire.


Aussi est-il opportun de le préciser, Consumés aurait dû être un polar. Noir, dérangé, tout en longueur, et en superficialité (par ailleurs parfaitement assumée par l'absence de caractère des deux personnages principaux, dont l'existence numérique a clairement pris le pas sur l'existence tangible), mais un polar néanmoins, qui selon moi implique d'avoir une fin, un dénouement, allez, j'ose le mot, une EXPLICATION. On s'aventure dans cette histoire torturée avec curiosité sur les cent premières pages, puis avec méfiance sur les 200 qui suivent.


Car on sent vite la déception poindre le bout de son nez... On a l'impression que l'auteur s'est enfermé dans un dédale malsain de rebondissements improbables défiant toute logique, et l'impression d'abandon à la fermeture de l'ouvrage a pour ma part été totale : abandon du projet, et abandon du lecteur.


Au final, le message de l'auteur semble être : j'ai placé toutes les clés pour dénouer l'intrigue au fil de l'ouvrage, à vous de les trouver... Démerdez-vous !


Terrible frustration... On dirait du Carax en livre.

Zago
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le 28 févr. 2016

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Zago

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