Dernière nuit à Twisted River par Nina in the rain
La sortie d'un John Irving est toujours un évènement, en tout cas pour moi. Enfin, je dis ça je frime un peu, vu que le dernier c'était Je te retrouverai en 2006 et qu'avant ça c'était la Quatrième main en 2002, autant dire que vu la fréquence des parutions, des évènements irvinguesques j'en ai pas eu beaucoup. Mais là, depuis que Twisted River avait pointé le bout de son nez dans les programmes des éditeurs et avait fait la couv de Livres Hebdo (la Pravda du libraire) je bouillais d'impatience. Le samedi suivant sa sortie j'était à neuf heures à la librairie (qui ouvre à dix heures mais ne changeons pas de sujet, j'ai bu un café c'est tout) pour avoir ma drogue de chevelu du New Hampshire. Bon, il m'a fallu le temps de trouver le courage de terminer le Patient Anglais, mais voilà ça y est je l'ai lu ce nouveau Irving, et je dois dire qu'il m'a fait très peur.
Il commence lentement. TRES lentement. On débute sur un accident mortel puis une longue explication de la vie de la ville de Twisted River, qui marque le terminus de la descente de la rivière par les grumes qui iront en camion fariquer des balançoires. Un père veuf et son fils, l'ami de la famille, des ours, mon cerveau commence déjà à retrouver ses repères familiers. Un assassinat à la poële, une fuite éperdue, ça y est je baigne dans mon Irving préféré. Ses détracteurs diront certainement qu'il a encore une fois écrit le même roman. De fait, comme le montre ce tableau charmant que je vous reproduis en dessous et qui provient de Wikipedia, John Irving aime à réutiliser les mêmes éléments dans ses romans.
Est-ce vraiment un mal ? Certains auteurs se renouvellent sans cesse. Mais la plupart tournent sur les mêmes obsessions, ce qui permet au lecteur qui ouvre un de leurs romans de se couler avec plaisir dans une trame dont il connaît déjà certains éléments, de retrouver même parfois des personnages qu'il aime. Le succès non démenti des séries n'en est-il pas une preuve éclatante ? De Sherlock Holmes à Erika Falck en passant par Mickaël Blomkvist ou Hercule Poirot, les héros sont les mêmes, les histoires sont les mêmes ... et on continue à adorer !
John Irving, comme un Echenoz ou un Martin Suter, a des passages obligés. Des ours, de la lutte, des enfants morts, des parents célibataires ... C'est pour ça que je l'aime. Son écriture franche, solide, ne cherche pas à impressionner, à faire peur ou à faire pleurer dans les chaumières. Il déroule ses histoires comme du papier à musique, doucement, tranquillement et, sans être obnubilé par le roman, on a plaisir à le prendre, à en lire quelques pages ... et peine à le finir. Non pas parce qu'on ne voudrait pas quitter les personnages, les romans d'Irving se finissent réellement, mais parce qu'on voudrait rester dans ces ambiances douces-amères pour moi très caractéristiques du New Hampshire.
Bref, Twisted River est un Irving plutôt réussi, que l'on lit avec plaisir et qui donne envie de relire d'autres romans de sa bibliographie dès qu'on l'a terminé. Bon, cela dit, pour moi, ce sera un Benny Barbash.