Magnifique livre que j'ai dévoré avec passion.


Au nord du Nord, au pays des bûcherons et des flotteurs de bois -les draveurs -, il était une fois un petit cuisinier boiteux et son fils de douze ans, gamin impressionnable à l’imagination peuplée d’ours indiscrets. Ils avaient pour garde du corps Ketchum, l’ogre anarchiste, ivrogne, rusé, faux illettré à l’intelligence incisive.
A l’image de la Twisted River torrentielle, ce récit d’une vengeance impitoyable bourlingue son lecteur d’ethnies en états sur trois générations, rencontre explosive entre l’Orient et l’Occident, comédie de mœurs culinaires, tragédie des portes mal fermées entre la splendeur d’une nature meurtrière et la quiétude imprudente du foyer.
Un chien héroïque, une Mustang bleue fantôme, une ange atterrie dans la fange : le chef Irving nous réserve toutes les surprises de son art consommé dans un roman qui se dévore et se déguste jusqu’à la dernière page. Bombe glacée pour tout le monde au dessert !
résumé/1954, au nord du New Hampshire, à Twisted River, pays sauvage des bûcherons et des flotteurs de bois, les draveurs, Dominic Baciagalupo, 30 ans, veuf et père de Danny, 11 ans, travaille comme cuisinier avec, pour garde du corps Ketchum, l'ogre anarchiste au grand cœur, l'ami de toute une vie. Suite à la mort malencontreuse de Jane, sa maîtresse, causée par Danny qui l'a prise pour un ours, père et fils fuient le courroux revanchard du shérif Carl, l'« officiel » de la dame. Première étape, Boston, où Dominic cuisine dans un restaurant italien, où Danny rêve de devenir écrivain. De nouveau inquiétés par le shérif, les Baciagalupo se bâtissent une nouvelle vie dans le Vermont : après avoir tâté de la gastronomie chinoise, Dominic se lance à son compte avec succès, et Danny devient un écrivain célèbre. Ultime étape : Toronto. Mais on n'échappe pas à la rage vengeresse du shérif !


bio:John Irving, né en 1942, a grandi dans le New Hampshire. Depuis la parution du Monde selon Garp, l’auteur accumule les succès tant auprès du public que de la critique. Dernière nuit à Twisted River est le 12ème roman de J Irving, également auteur d’un recueil de nouvelles, d’un récit.John Irving sera présent à Paris du 24 au 26 janvier 2011.


un avis de lecteur intéressant et nuancé: "Te mets pas les couilles à l’envers !" Comment ? Oui, le dernier John Irving est riche en expressions imagées, sorties de la bouche de Ketchum, personnage a priori secondaire, mais en fait essentiel, de Dernière nuit à Twisted River. Il n’y a pas que la rivière qui soit sinueuse, le récit d’Irving l’est tout autant, s’étalant sur une cinquantaine d’années, l’histoire d’une vengeance, plat qui ne s’est jamais mangé aussi froid. Dominic et Danny Baciagalupo, sont au coeur de ce roman foisonnant, dense, dont le principal défaut est de se perdre souvent dans des digressions superfétatoires. Dominic est cuisinier, ce qui nous vaut de multiples détails culinaires ; lui et son fils travaillent, dans les années 50, auprès d’une population de flotteurs de bois, allons-y gaiement pour une description minutieuse de leur métier. Irving n’a jamais été doué pour faire court mais là, sur 560 pages, il y a beaucoup de longueurs et pas mal de lourdeurs dans un style qu’on a connu plus fluide. Evidemment, les personnages hauts en couleur abondent et certains passages sont du pur Irving, burlesques et hilarants : cet ange qui tombe du ciel dans le plus simple appareil, ce meurtre à la poêle à frire, etc. La tonalité est pourtant sombre, plus qu’à l’accoutumée, avec cette idée que les accidents tragiques sont inévitables et gâchent une existence entière. La plupart des obsessions de l’écrivain se retrouvent dans le roman, comme recyclées : il y a des ours, des tapis de lutte (avec modération), une relation père/fils compliqué... On peut y voir aussi un aspect autobiographique, puisque Danny Baciagalupo est écrivain et qu’il finit par rédiger le même livre qu’Irving. A noter aussi que le romancier a rarement été aussi violent dans sa vision de la politique américaine, de la guerre du Vietnam à l’Irak. Un "pays de merde" comme dit Ketchum, dont la verve grossière et libératrice sont sans nul doute l’expression des sentiments d’Irving. Un Ketchum dont la présence tutélaire, grotesque et vaguement inquiétante traverse une moitié de siècle dans un roman, certes pas le meilleur de son auteur, mais qui finit par en imposer, quels que soient ses défauts, par son ampleur et sa luxuriance.


un deuxième avis intéressant:
Avec Dernière nuit à Twisted River, John Irving nous offre un roman à la fois foisonnant et profond, riche en personnages baroques et en anecdotes burlesques, qui revisite cinquante ans d’histoire américaine. C’est le roman de la fuite, puisqu’on a tous quelqu’un ou quelque chose à nos trousses : un shérif dingue, une Mustang bleue, un goût immodéré pour l’alcool, ou une dame noire armée d’une faux. Chacun de nous est condamné à perdre ceux qu’il aime. Ce roman est un exutoire à ce qui semble être l’angoisse première de John Irving : la perte d’un enfant. Et la partie la plus intéressante, à mes yeux, est celle où l’écrivain se livre à un mise en abyme de son œuvre romanesque ne faisant de son héros un écrivain devenu célèbre à son quatrième roman (tout comme Irving lui-même, devenu célèbre avec Le monde selon Garp, publié en 1978), un écrivain qui a un goût particulier pour le point-virgule, écrit un roman sur le thème de l’avortement, avant de s’exiler pour le Canada. John Irving en profite pour justifier certains de ses points de vue sur la politique américaine, tout en attirant l’attention du lecteur sur la fragile frontière entre fiction et réalité : auteur et narrateur sont deux personnes différentes, l’auteur met un peu de sa vie dans son œuvre, mais son œuvre n’est pas sa vie, la fiction se nourrit de la réalité sans être la réalité.

HenriMesquidaJr
8
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le 29 juin 2016

Critique lue 225 fois

HenriMesquidaJr

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