Discours sur la première décade de Tite-Live par steka

Parce qu'il dévoila froidement l'ignominie des logiques de la domination, on attribue généralement et sans plus d'analyse une parenté d'esprit à Machiavel avec cette même domination, en en faisant ainsi l'un de ses idéologues.


Mais au-delà du réflexe primaire, de cette fuite de la conscience qui prétend rendre responsable d'un mal celui qui le met en lumière, tout lecteur attentif et faisant preuve d'un peu de discernement, constatera aisément l'absurdité de cette thèse.


Pour se faire une idée claire de la personnalité de Machiavel, il faut lire le passionnant recueil de ses lettres, paru en deux gros volumes sous le titre
« Toutes les lettres officielles et familières de Machiavel » à la Librairie Gallimard en 1955. Outre sa prodigieuse intelligence, on y découvrira un homme simple, généreux, profondément attaché à l'amitié, à l'intérêt commun, et fort peu intéressé par le pouvoir et le profit personnel. Machiavel fut avant tout citoyen de Florence, alors capitale culturelle de la Renaissance, et œuvra toute sa vie à tenter de maintenir la liberté de sa cité dans une époque où, la guerre était la situation la plus courante dans une Italie divisée à l'extrême, l'élimination physique des opposants politiques, la règle.


On comprendra dans ces conditions, que Machiavel qui ne disposa jamais d'autre puissance que celle de sa propre Virtu, eut à prendre pour s'exprimer quelques précautions oratoires et chercha à voiler quelque peu les intentions véritables de ses écrits.


Mais c'est justement dans ce « Discours sur la première Décade de Tite-Live » où Machiavel, profitant de cette distance historique, donne son interprétation d'une période cruciale de l'histoire romaine, que l'on découvre les éléments fondamentaux de sa conception du politique.


Il est devenu, pour des raisons que chacun appréciera, parfaitement impossible à un « politicien » de notre temps de concevoir ce que put être le sens de la notion de Virtu dans l'esprit d'un Machiavel et surtout de la possibilité de la mettre en pratique. Aussi, aucun d'entre eux ne comprendra, pour ne donner qu'un seul exemple, la signification du chapitre 4 du livre Premier de cet ouvrage. Nous laissons aux lecteurs plus curieux de vérité le soin de la découvrir.

Créée

le 26 nov. 2011

Critique lue 750 fois

14 j'aime

5 commentaires

steka

Écrit par

Critique lue 750 fois

14
5

D'autres avis sur Discours sur la première décade de Tite-Live

Du même critique

La Société du Spectacle
steka
10

Du Devenir marchandise

Lire « La société du spectacle » n'est pas chose aisée. Non pas que ce livre soit particulièrement difficile en lui-même, mais parce que cette difficulté tient à la nature même de son objet. En...

le 25 nov. 2011

95 j'aime

17

Le Prince
steka
9

Machiavélique ?

"Je prétends que ceux qui condamnent les troubles advenus entre les nobles et la plèbe blâment ce qui fut la cause première de la liberté de Rome : ils accordent plus d’importance aux rumeurs et aux...

le 1 déc. 2011

83 j'aime

30

Discours de la servitude volontaire
steka
10

De notre servitude volontaire

Ce livre fut écrit il y a cinq siècles. Pourtant, chez tous ceux pour qui le mot Liberté a encore du sens et qui accessoirement savent lire, son actualité s'impose cruellement. Car si la domination a...

le 26 nov. 2011

65 j'aime

2