Fahrenheit 451
7.7
Fahrenheit 451

livre de Ray Bradbury (1953)

Un livre lu dans les années 80 , parce que le CDI le proposait et que j'en avais entendu dire du bien par les copines. De toute façon, j'aimais la science-fiction, l'anticipation et tout ce qu'on n'appelait pas encore les dystopies. Un téléfilm enregistré récemment avait réactivé ma curiosité tant il m'avait paru à la fois prometteur et très en-dessous de ce qu'il aurait pu être. Enfin, dans mon souvenir, l'histoire présentait davantage d'épaisseur. J'ai donc entrepris de la relire, cette fois en VO (il s'est passé quelques bricoles significatives en 35 ans, heureusement). Et ce sont ces bricoles qui m'ont certainement rendu ce récit bien moins sensationnel qu'à l'époque. Malgré tout, tout y était bien plus substantiel que dans la pauvre resucée télévisuelle de cet été. D'abord, les scénaristes avaient cru bon de se débarrasser de la femme de Montag. Grave erreur : son malaise suspect du premier chapitre - s'est-elle suicidée? - offre d'entrée à l'histoire une épaisseur psychologique irremplaçable. Car cette société idéale qu'on fait ingurgiter aux Américains du futur à grands coups de shows télévisuels débiles ne rend visiblement pas ses cobayes, même consentants, si heureux que ça. L'épouse et son aréopage de copines superficielles et conformistes apportent en creux à l'histoire un contrepoint plutôt détonnant. Comment le pauvre Montag, pompier spécialisé en autodafés, en viendrait-il à s'extraire de la propagande gluante de la dictature du bonheur factice dans laquelle il vit si sa vie de couple n'était pas devenue un enfer calqué sur celui de la téléréalité ? Le téléfilm choisissait de mettre l'accent sur son supérieur hiérarchique, sorte de Torquemada de l'orthodoxie analphabète, qui le surveillait étroitement. Ça n'était pas une si mauvaise idée, d'autant que le rôle était confié à l'inquiétant Michael Shannon. Mais ça évacuait de fait le limier-robot qui terrifiait déjà Montag avant même qu'il n'ait songé à devenir un dissident. Bon, j'arrête là la comparaison, le film étant plutôt raté; pour en revenir au classique de 1953, d'un point de vue plus strictement littéraire, j'ai été à la fois agréablement surprise par certains personnages (l'épouse, donc, mais aussi Clarisse, la petite voisine à double-fond) et vaguement dépitée par certains passages plutôt mous, notamment dans la dernière partie. La fuite de Montag semble un peu bâclée et la traque du limier artificiel tourne court. Quelques rebondissements haletants ne m'auraient pas déplu. Mais la société secrète des érudits clandestins, vivant retranchés au fond des bois, est une trouvaille qui fait rêver à des feux de camp pittoresques au son des vers immortels des grands auteurs. J'avais conservé l'idée que chacun de ses membres connaissait un livre par cœur pour le sauver des anathèmes d'un régime autodestructeur, et j'ai été plutôt surprise de découvrir que je me trompais (comme les scénaristes du film avaient visiblement choisi de le faire sciemment, ils ont dû trouver ça plus épatant et romantique aussi...). Du coup, c'est un double soulagement : je peux arrêter d'essayer d'apprendre The Price of Salt par cœur pour le sauver de la prochaine dictature des cancres qui s'annonce (encore que... l'exploit me tente toujours, par goût du jeu...) et je ne milite plus pour une congélation immédiate de Fabrice Luchini pour mettre à l'abri tout La Fontaine et une bonne partie de Céline... Blague à part, une lecture inégale, donc, dont certains passages m 'ont emballée à nouveau et d'autres plutôt ennuyée.

Créée

le 2 sept. 2021

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