"Nous vivons dans un monde furieusement paradoxal où la liberté de haïr n'a jamais été si débridée que les réseaux sociaux mais ou celle de parler de de penser n'a jamais été si surveillée dans la vie réelle" P.9



En dépit de sa réputation sulfureuse, Caroline Fourest propose ici une réflexion très intéressante et plus que jamais d'actualité sur la notion d'appropriation culturelle ("reprise de formes, de thèmes ou de pratiques créatives ou artistiques par un groupe culturel au détriment d'un autre" P.22)
L'essayiste dénonce ici la violence d'internautes déversant des propos haineux sur les réseaux sociaux et s'intéresse à la perception des traditions culturelles par les "jeunes" (millénials comme moi ).


Pourtant, son ouvrage n'est ni moraliste ni dévalorisant pour les jeunes générations.
Il s'agit plutôt d'un appel à la tolérance, à la quiétude.
Une invitation à cesser de penser que les "micro-agressions" qui les révoltent sont des enjeux aussi centraux que ceux auxquels ont été confrontés leurs aïeuls, qu'il s'agisse de la ségrégation, de la Shoah ou des luttes des suffragettes.
Certes, le chemin est long pour parvenir à l'égalité.
Cependant, pourquoi ne pas lutter ensemble pour cet idéal au lieu de combattre chacun dans son coin, au risque de blesser certains de ses camarades, au lieu de tirer sur l'ennemi ?


J'ai découvert la notion d'universalisme dans cet ouvrage.



"L'UNIVERSALISTE Souhaite lutter contre les préjugés, l'essentialisation des identités pour permettre à chacun de s'épanouir individuellement et de s'autodéterminer, de choisir son genre, de
s'identifier à la culture de son choix sans être assigné ou discriminé. Adepte de la transgression des genres et du métissage, il ne juge ni le fait de changer de sexe ne de tresser des dreadlocks et
défend une vision fluide des identités et lutte contre les obstacles à cette liberté de s'autodéterminer.



Cet antiracisme peut se mobiliser de façon communautaire contre la discrimination, les préjugés, racisme ou l'homophobie. Son but n'est jamais d'obtenir une reconnaissance particulière ni un traitement de faveur mais la fin des discriminations. "



Il s'agit d'un bel idéal vers lequel j'espère tendre.


Je vous conseille ainsi de découvrir sa réflexion, exposée de façon claire, sans trop de lourdeurs, cependant quelque peu autocentrée .
J'ai par exemple été interpellée par une grosse contradiction concernant son opinion à l'égard du film "La vie d'Adèle". Voici l'extrait:



"Je ne suis pas allée voir le film, le regard trop masculin d'Abdellatif Kechiche m'en dissuadait. (…) A aucun moment pourtant il me serait venu l'idée de vouloir interdire le film. Je n'avais qu'à
tourner la tête ou réaliser d'autres films. C'est ce que j'ai fait avec sœur d'armes.



En suivant les pas d'une jeune yézidie qui rejoint la résistance Kurde pour venger des djihadistes, j'ai choisi de raconter une histoire qui fait écho à mes engagements, sans être la mienne. En me coulant dans la peau de mes personnages, aussi bien masculins que féminins. Je peux comprendre la rage d'une héroïne yézidie comme la perversité d'un djihadiste. " P92-93



Pourquoi se juge-t'elle capable de se mettre à la place de ses personnages, tous genres confondus alors qu'elle prétend que le réalisateur de "La vie d'Adèle" a échoué?
D'où vient ce talent de compréhension qu'elle s'auto-attribue tout en soulignant l’absence de cette même légitimité chez les autres...
C'est là l'un des seuls aspects que mon esprit critique me permet de remettre en cause, qui ne nuit pourtant pas au fond de son propos.


Elle déclare en effet un peu plus loin, à propos d'une étudiante américaine tentant de clore un débat sur le port du voile lors de l'une de ses interventions dans une université:



"Qui est-elle pour décider qui a le droit de parler? Tout le monde
devrait pourtant débattre d'un sujet aussi politique qui concerne le
droit des femmes. Ou les antiféministes ont gagné!" P.128



Fourest brûle ( sans mauvais jeu de mot ) et donne l'alerte dans son livre... à découvrir, à méditer.



"A force de tout relativiser, les inquisiteurs ne savent plus faire la différence entre un démocrate et un dictateur, entre protester et censurer" P.150



Valentine
:)

Valentineuuh
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le 26 mars 2020

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Valentineuuh

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