Germinal
7.3
Germinal

livre de Émile Zola (1885)

Dès les premiers chapitres, la description de la journée des mineurs nous plonge dans le quotidien des ouvriers, qui sont comme une masse informe, toujours en mouvement, grouillante, qui travaille, mange, culbute la voisine, puis dort, puis recommence. Pourtant au milieu de cette masse, se détachent des individus. Pas seulement les personnages principaux, sur qui on s’attarde plus longuement, mais d’autres bien moins importants dont on fait la connaissance en quelques mots, le temps d’une anecdote ou d’un dialogue. Cela nous suffit pour cerner quelques traits de caractères, une personnalité, qui fait qu’on est en terrain connu parmi cette foule des mineurs. La mine elle-même est un personnage. Décrite comme un monstre, elle impressionne et inquiète.


Connaissant un peu les opinions de Zola, on aurait pu craindre un roman trop démonstratif. Mais Germinal est plus subtil, grâce à tous ces personnages dont on connait un peu la vie, justement. Parmi les propriétaires des mines qui laissent crever de faim leurs employés, par exemple, il y a ce type amoureux de sa femme et trompé, qui apprend son malheur alors que la grève gronde et menace dehors, au moment où il ne peut pas s’en soucier. Chez les ouvriers, si le Maheu et sa femme sont touchants d’honnêteté et de dignité, leurs enfants n’ont rien d’admirable, et leur petit Jeanlin est un gamin vicieux et mauvais, repoussant. Le héros, Lantier, n’est pas épargné non plus. La tête pleine d’idéaux et de principes, il révèle ses propres vices au fur et à mesure qu’il gagne du pouvoir et que la situation lui échappe.


Le désespoir augmente au fur et à mesure du roman, l’atmosphère est de plus en plus sombre, le drame de plus en plus proche. La grève ne mène à rien, pire elle tue petit à petit les mineurs et leurs familles. Plusieurs scènes de misère et de mort sont proprement déchirantes. Le ton est simple, sans fioriture, mais les mots sont durs. Alors qu’on est accablé par les événements et qu’il semble que plus rien ne permette d’espérer, c’est pourtant l’espoir qui termine le roman, dans un lyrisme presque romantique : la bataille a été perdue, mais elle en engendrera d’autres, puis d’autres, qui un jour mèneront à la victoire.

Scarlett
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le 19 mai 2016

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