Iliade
7.9
Iliade

livre de Homère ()

L’Iliade, le Poème d’Ilion, la Colère d’Achille ! L’œuvre la plus importante de la culture Européenne, première manifestation du génie Grec. Depuis des millénaires, l’Iliade fascine. Pour les Grecs, l’œuvre était le tableau de référence de toutes les vertus essentielles du monde Hellénique, vertus que l’on enseignait donc aux jeunes Grecs par l’apprentissage de l’œuvre d’Homère. Homère donna ses lettres de noblesse à la Mythologie et fut le véritable éducateur de la Grèce pendant des siècles. Pour nous, lecteurs du XXIe Siècle, l’Iliade reste l’œuvre capitale vers laquelle nous nous tournons, à la recherche de nos racines, de cette perfection primitive sur laquelle toute notre culture se fonde.


Plonger dans l’Iliade, c’est plonger à une époque si lointaine, si obscure, si archaïque, au beau milieu de tous ces grands guerriers Achéens dont les noms résonnent encore aujourd’hui : Achille, Ulysse, Agamemnon, Ajax, Diomède, Nestor, Patrocle, Ménélas. Ces hommes dont le destin est le jouet des dieux, ces dieux si grands, si nobles, et pourtant étrangement humains. C’est une caractéristique particulière de la Mythologie Grecque : les hommes et les dieux sont très proches, se côtoient en permanence, et l’on assiste ainsi à des passages où les divinités elles-mêmes s’invitent sur le champ de bataille pour soutenir leur camp. La lutte entre Achéens et Troyens n’est pas qu’une affaire d’hommes, elle est également un conflit entre les dieux. Zeus en personne semble avoir bien du mal à contrôler toutes ces divinités qui se livrent à intrigues sur intrigues, et c’est sa reconnaissance envers la fidélité de Thétis qui, seule parmi les divinités, a délivré le Roi des Dieux de ses chaînes, qui entraîne tous les évènements de l’Iliade.


Beaucoup se fourvoient en lisant l’Iliade : ils pensent y trouver l’intégralité des dix années de la Guerre contre Troie, ou du moins toute la geste d’Achille retranscrite dans une seule et grande œuvre. L’Iliade est en réalité bien plus intéressante dans son traitement de la Guerre de Troie et nous narre un épisode bien précis : la Colère d’Achille. L’Iliade s’ouvre sur l’affront d’Agamemnon qui enlève la captive et bien-aimée d’Achille : Briséis. Cet outrage ne peut être toléré, c’est l’honneur même d’Achille qui est en jeu, et ce dernier rentre alors dans un courroux terrible, refuse de se battre, et demande à sa mère Thétis d’intercéder en sa faveur auprès de Zeus afin que ce dernier soit défavorable aux Achéens jusqu’à ce qu’Agamemnon lui rende Briséis. Cette colère initiale porte tout le récit et a des conséquences terribles, jusqu’à la mort de Patrocle qui sort le héros de sa torpeur. Achille reprend son destin en main et reparaît sur le champ de bataille plus glorieux que jamais pour venger son ami. Il massacre à lui seul des dizaines de soldats, chaque coup porté, chaque mort étant soigneusement décrits par Homère, jusqu’à sa revanche terrible sur Hector. Achille avait le choix : renoncer au combat et vivre vieux, ou continuer la lutte acharnée contre les Troyens et périr dans les honneurs et la gloire. Il choisit l’honneur.


L’honneur, notion fondamentale des Grecs qui perdurera par la suite dans bien des cultures européennes, et notamment dans notre culture française. Rien n’est plus important que l’honneur, et rien n’est plus avilissant que la lâcheté. Quiconque a lu l’Iliade se rappelle forcément de ces combats cycliques, les Achéens redoublant d’ardeur dans la lutte pour récupérer le corps d’un des leurs, puis les Troyens à leur tour enfonçant les lignes adverses avec le même soucis : rendre les honneurs aux défunts afin qu’ils puissent atteindre la demeure d’Hadès. Déjà se dessine une forme de tragédie de l’homme, soumis à la toute-puissance des Dieux. Il n’y a ni Bien, ni Mal dans l’Iliade, seulement deux groupes humains reposant sur des valeurs semblables et qui sont le jouet de volontés divines.


Parmi ces divinités, une en particulier a une emprise fatale sur les hommes, mais également sur les dieux : Atè, l’Egarement, la Faute. Nul n’échappe à cette déesse, pas même Zeus. L’influence d’Atè est prépondérante, fondamentale dirais-je même, dans l’Iliade. Sans Atè, Agamemnon n’aurait pas outragé Achille, sans Atè, Achille ne se serait pas obstiné dans sa colère et serait retourné au combat une fois Briséis rendue, sans Atè, Patrocle ne se serait pas laissé entraîner par l’húbris au combat, sans Atè, Hector n’aurait pas pris les armes contre Achille. Atè se trouve même à la racine du conflit, car la guerre de Troie trouve son origine dans l’erreur initiale de Pâris qui a ravi Hélène. Atè est la véritable puissance de l’Iliade qui pousse les personnages à commettre des fautes aux conséquences graves.


L’autre grande puissance sur laquelle même les dieux n’ont pas d’emprise est bien entendu le Destin. Celui-ci enserre chaque homme, même les grands personnages, et contribue énormément à l’aspect tragique des vies humaines. Même les dieux regardent, impuissants, leurs héros favoris périr lorsque vient leur heure.


Atè, le Destin, l’Honneur… Les grands principes de la tragédie grecque sont déjà posés dans l’Iliade, œuvre fondamentale et magnifique. Déjà également se ressent un intérêt marqué pour l’homme, sa place dans le monde, et comment il peut prendre son destin en main pour accomplir des exploits, et faire en sorte que son séjour sur Terre n’ait pas été vain. Ce qui compte, pour Homère, ce ne sont pas les descriptions physiques des personnages ou du cadre du récit, mais avant tout les actes de ces grands héros qui serviront de modèle pendant des millénaires. Les scènes de bataille sont minutieusement détaillées, très viscérales et organiques. On se retrouve dans la poussière et la clameur du champ de bataille, au milieu de ces combattants ancestraux. Chaque personnage qui combat et qui tombe sur le champ de bataille porte un nom, pas un n’est négligé. Certes, cet intérêt pour l’homme reste aristocratique, mais il s’agit de la première étape vers un humanisme plus universel qui fleurira dans la Philosophie et la Tragédie grecques.


2800 ans après sa composition, l’Iliade reste une œuvre profonde, puissante, et à la poésie guerrière inégalée. Lors des rares accalmies, l’aède n’en perd pas pour autant son génie, en témoigne le passage solennel et sublime pendant lequel Hector fait ses adieux à sa femme, Andromaque, et à son fils, Astyanax, devant la porte de Troie. Les Troyens aussi, possèdent leurs modèles de vertu et de bravoure. Dans l’Iliade se dessinent déjà toutes les problématiques, toutes les notions qui préoccuperont les Grecs anciens, ainsi qu’un idéal panhellénique vers lequel les cités grecques essaieront à plusieurs reprises de tendre, en vain. Enfin, comment ne pas être touché par la puissance poétique de la Mythologie grecque, qui inspire encore poètes et tragiques. Qui, après avoir lu l’Iliade, ne peut regarder un lever de soleil sans penser à Eos, aux doigts de rose, annonçant le matin sur son char de lumière… Équilibre parfait entre hommes, divinités, et nature.

Charlandreon
10
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 11 oct. 2020

Critique lue 200 fois

1 j'aime

Charlandreon

Écrit par

Critique lue 200 fois

1

D'autres avis sur Iliade

Iliade
Ze_Big_Nowhere
9

" L'Iliade " pour les nuls

Dix piges que les Achéens et les Troyens se foutent sur la gueule comme de vulgaires caciques de l'UMP, quand le roi Achéen Agamemnon décide de chourave la fille d'un cureton Troyen. Le cureton se...

le 15 déc. 2014

54 j'aime

24

Iliade
-Valmont-
10

Lettre à Homère

Salut à toi ô grand Poète, En reposant ton ode sanglante, après plusieurs jours de brumes rouges où aucun de mes proches ne voyait les affres dans lesquelles tu me plongeais, je songeais, cruel, que...

le 8 mars 2019

41 j'aime

22

Iliade
LâneFourbu
10

Homère m'a sauver

Strasbourg Saint-Denis : « Pour ne pas tenter les pickpockets, fermez-bien votre sac et surveillez vos objets personnels ». TUUUUUUUUT!! Entrez-donc dans la rame, amis voyageurs, n’ayez pas...

le 26 sept. 2015

24 j'aime

26

Du même critique

Syberia II
Charlandreon
9

La suite d’une grande Aventure

Après Syberia, j’étais très curieux de savoir si Benoît Sokal et l’équipe de Microïds allaient réussir à créer une suite avec le même niveau d’excellence que le premier opus, même si je me doutais...

le 7 nov. 2020

4 j'aime

Final Doom
Charlandreon
9

DOOM pour les vétérans

«Plutonia a toujours été destiné à ceux qui avaient fini DOOM II en Difficile et qui cherchaient un nouveau défi. Je jouais toujours aux niveaux que j’avais fait en Difficile, et si je pouvais les...

le 3 sept. 2020

3 j'aime

2