Ça y est, depuis le temps qu'elle me refile des livres pourris, ma mère m'a enfin donné à lire un livre que je trouve BON. Alleluyah !!
L'élégance du hérisson est un livre avec du style, des péripéties bien amenées, des problématiques intéressantes et des personnages qu'on pourrait presque trouver attachant. Certes, ça pète pas très haut mais ça reste quand même de la littérature qui est loin d'être honteuse.
Culture et lutte des classe :
L'histoire se déroule dans un appartement parisiens cossues, tenus par des gens qui ont l'air de faire partis des "1%" qu'ils soient d'une droite aisée et pédante ou d'une gauche-caviar qui se cherche des excuses. On suit deux narrateur, la première étant Renée, la concierge regarde ce petit monde d'un air blasée et n'ose pas dire que sous ses airs revêche, elle aime la grande littérature, l'art et les films d'auteurs. Elle s'amuse à les laisser croire qu'elle est bête et se moque d'eux. L'autre narrateur est Paloma, une gamine de 12 ans, très intelligentes, qui, lasse du monde, fait des projets de suicide.
Et le roman se pose déjà des questions intéressantes dans le début, notamment que le coup du travailleur misérable mais lettrée, je l'ai vu, moi qui fut agent de nettoyage avec une licence de lettres. : à quoi sert la culture ? Qu'est ce que ça nous apporte d'être cultivé pour balayer les escaliers ou lorsqu'on doit être critique gastronomique ? Cela nous rend-il plus heureux ? La question du mépris de classe est très présent dans le roman et c'est plutôt bien traité, notamment lorsqu'il aborde la question de gens qui se disent proches du peuple, mais ne fait que le singer (la soeur de Paloma, qui a des tics de langages de banlieue, s'habille décontracté mais fait des grandes études et ne reste qu'avec des gens de son milieu.)
Bon, le livre m'a parlé en partie parce que les références de Renée, je les connais. C'est d'autant plus amusant que ressortant de la lecture d'un volume de Proust, j'étais agréablement surpris de lire une référence à l'un de ses personnages. On trouve aussi du Tolstoï, du Ozu et d'autres auteurs classiques. De plus le récit est émaillé des réflexions des personnages, que ce soit sur le mouvement de la vie, de la nécessité d'avoir un chat ou sur la pluie d'été. Cela approfondit les personnages sans être trop pédant (les chapitres sont relativement court.)
Le Sauvage savant 2000 :
Le livre part sur un tournant au premier tiers, avec l'arrivé d'un monsieur japonais dans l'immeuble, qui devient l'ami de Paloma et Renée. Celui-ci réveille l'intérêt des deux protagonistes entre Paloma qui lit des mangas (mais du Taniguchi, sinon ça fait vulgaire) et Renée qui a une adoration pour le cinéma d'Ozu (inévitablement.)
Je suis assez divisé sur ce personnage : d'un côté il est extrêmement sympathique, il permet de faire évoluer le récit (même s'il l'amène vers une piste assez banale) et permet de faire le lien entre les deux personnages principaux. Toutefois, j'ai l'impression qu'il est décrit de manière trop parfaite et de voir le topos du XVIIIe siècle consistant à se moquer du système en y plaçant un étranger, qui, regardant nos habitudes d'un regard pseudo-neutre, va émettre des critiques qui tiennent du "bon sens." (cf Les Lettres Persanes ou L'Ingenu) Ici, Kakuro se moque des conventions sociales des habitants de l'immeuble et devient ami avec Paloma et Renée en se moquant du qu'en-dira-t-on.
Alors, c'est cool. Sauf que lorsqu'on connait un peu le Japon, on sait que c'est vraiment LE pays de la convention sociale, où tout le monde doit rester à sa place et où tout le monde masque ses sentiments derrière des façades. Ce qui est dommage, car cela aurait pu être souligné par celui-ci et lui donner un peu plus de consistance que "c'est un vieux monsieur japonais et comme il est japonais il est sage et il regarde le monde avec des yeux neutres."
Néanmoins, le livre se lit bien et on passe un bon moment. La fin du livre est relativement convenue alors qu'elle se voulait comme une grosse surprise. Dommage, cela tombe dans une facilité franchement bête et se donne des airs d'American Beauty.