Serais-je donc moi aussi un monstre ?

« L’étranger ».
Ce titre colle à la fois parfaitement au roman (Meursault, le héros de cette œuvre est complétement étranger à la société au sein de laquelle il vit) en étant paradoxal, puisque après tout, cet « étranger » c’est moi, et c'est nous tous.
Ainsi, ce personnage, dont certains décrieront la froideur et l'apathie présente l’avantage de permettre l’identification de chacun. Camus nous montre ainsi que Meursault n’est pas qu’un simple héros de roman à l’histoire singulière, au contraire, c’est l'Homme (tous les hommes, même) qu'il incarne.

Je reste stupéfaite en voyant que certains attribuent des 1 ou des 2/10, à cette œuvre, qui est incontestablement l’un des meilleurs romans que j’ai lu. Sa principale force provient selon moi de l’écriture de Camus, accessible, très simple et épurée (que je trouve d'ailleurs particulièrement propice à l’évocation du thème de l’absurde) mais également parfaitement adaptée à l’expression de l’indifférence perpétuelle de Meursault ; et qui permet de surcroit au lecteur d’élaborer sa propre interprétation de l’œuvre, indépendamment du récit.

Stupeur également, lorsqu’un ami ayant lu « L’Etranger » et le considérant d’ailleurs comme son livre préféré, me déclare à propos de Meursault « Quel monstre ! ». Serais-je donc moi aussi un monstre ? Moi qui m’identifiais complétement à ce héros un peu naïf, dont le seul crime réside dans son incompréhension face à l'absurdité de toutes ces normes auxquelles les hommes s’astreignent, de notre société, et plus généralement de la vie, je tombe de haut. J’étais même allée jusqu’à ériger mentalement Meursault au rang de véritable héros ; rang que mérite pour moi un homme qui, comme lui, par amour de la Vérité, accepte la mort sans ciller et refuse de mentir au reste du monde, et surtout de se mentir à lui-même (puisqu’au fond, c’est ce que nous faisons tous, chaque jour, optimistes résolus que nous sommes, en essayant de nous persuader que notre vie possède un sens et un but bien précis).

Aucun livre n'a eu un tel impact sur ma façon d'envisager la vie, il constitue une source intarissable de réflexions et de questionnements sur la condition humaine, c'est pourquoi je le conseille à tous sans la moindre hésitation.