On ne présente plus L’Exorciste, légendaire long métrage de William Friedkin (mettant en scène Ellen Burstyn et Linda Blair) sorti sur grand écran en 1973. Longtemps considéré comme le film le plus terrifiant de tous les temps, ambulances à la sortie des salles, malaises et crises cardiaques de spectateurs auront grandement contribué à ancrer la légende dans l’esprit collectif.
Mais avant d’être un film, L’Exorciste fut aussi un roman, que l’on doit à un autre William :
William Peter Blatty.
Publié en 1971 et fort de plusieurs millions d’exemplaires vendus dans le monde, Blatty s’inspire, pour son roman, du véritable cas de possession et d’exorcisme d’un jeune garçon; fait divers dont il eut vent dans les années ’50 alors qu’il était étudiant.

D’un prologue dans des ruines ensablées d’Irak, irradiée d’une chaleur étouffante, et berceau du Mal («ailes déployées, pieds en forme de serres, pénis bulbeux en érection, bouche étirée par un rictus sauvage. Le démon Pazuzu.»), l’histoire prend place sous le ciel automnal du quartier de Georgetown à Washington, au cœur d’une maison de style coloniale où vivent Chris McNeal, actrice que tout le monde s’arrache, et sa timide et craintive fille Reagan.
L’histoire vous la connaissez tous…

L’écriture de Blatty est simple, quasi clinique, scénaristique même, tant les dialogues s’enchaînent à vitesse folle. Le frisson grandit à mesure que les pages se tournent et là réside à mon goût l’intérêt du texte : l’atmosphère malsaine dans laquelle il nous plonge sans même que l’on y prenne garde. L’enfer nous happe dans son déchaînement, les lits bondissent du sol, les meubles traversent les pièces et les obscénités (si connues désormais) fusent de la bouche de cette (autrefois) angélique fillette.

Si les similarités avec le film sont indéniables (à la virgule prêt dans certains dialogues), le fil de l’intrigue n’est en rien gâché. On explore plus en profondeur les pensées des protagonistes: le questionnement sur la mort, qui agite Chris dès le début de l’histoire, ou la culpabilité du Père Karras quant à sa mère par exemple.
On découvre aussi une intrigue secondaire (inexistante dans l’adaptation cinématographique) concernant les domestiques de la famille; certes, pas vraiment indispensable mais qui a le mérite de nous faire rentrer un peu plus dans l’intimité des personnages.
Alors disons que si vous appréciez le film, le roman agit un peu comme un "behind the scene" ou une nouvelle "version longue inédite"

Le roman cependant, à la différence du film, laisse planer le doute quant aux origines du mal dont souffre Reagan : réelle possession ou maladie énigmatique?
Le doute persiste.

William Peter Blatty aurait pu, de cet énième combat manichéen, tirer une critique des comportement humains, jugeant le Bien et le Mal, l’Eglise et la Science. Mais au final, il n’en est rien. L’auteur veut nous divertir, nous effrayer tout simplement, et il réussit son pari.
N’y chercher donc, ni réflexion philosophique ou effet de style littéraire, mais simplement ce petit frisson qui parcourt l’échine, et la satisfaction, en fermant le livre, d’avoir passer un moment diaboliquement bon !
elmatador
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le 24 sept. 2013

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