Leemet est un jeune garçon estonien. Même s’il est né au village (là où se sont établis les paysans christianisés par les hommes de fer et les moines), à la mort de son père, sa mère l’a ramené avec sa sœur dans la forêt. Dans la forêt vivent les vrais estoniens, ceux qui connaissent encore la langue des serpents. Tous les animaux et tous les humains connaissaient cette langue, mais désormais, seule une poignée d’humain la connaît encore. Leemet est d’ailleurs l’un des derniers à la parler parfaitement. Quant aux animaux, ils la comprennent seulement, ce qui suffit d’ailleurs à les faire obéir. On peut ainsi traire et chevaucher les loups et demander aux cerfs et chevreuils de se sacrifier pour pouvoir manger.
Mais dans le village, ces pratiques sont bien sûre décriées, oubliées, remplacées par le culte de Jésus, du pain et du vin.
Leemet est donc le dernier, malédiction qui le suivra toute sa vie, puisqu’il sera le dernier sur de nombreux points. Sa meilleure amie est une vipère royale, Ints, surtout depuis que son ami d’enfance est allé vivre au village.
Ce roman, un bon pavé qui se dévore tout seul, est vraiment très bien mené. Tout du long on rit, que se soit des traits d’humour ou des situations cocasses. Pourtant, ce roman n’est pas franchement drôles, on voit là une civilisation qui s’éteint, la lutte des anciens contre les modernes. Et même si cette lente annihilation des anciennes valeurs, parfois étranges qu’on s’est habitué à fréquenter depuis le début du roman (les ours qui flirtent avec les jolies filles, des être encore plus anciens qui élèvent des poux, la légende de la Salamandre, le terrier des serpents avec la pierre sucrée…), est inéluctable, on est toujours entraîné vers l’avant.
Les explications au début du roman, sur la situation (l’Estonie est un pays christianisé très tardivement) et celles de la fin (sur le pamphlet contre la société, puisqu’évidemment la lutte des traditions contre la modernité est toujours d’actualité) sont vraiment très intéressantes.