L'Horloge sans aiguilles... Le titre intrigue. Mais de quoi parle donc ce livre ? Si cela parle évidemment du temps, de la vie et de la mort. Cela parle également des questions sociales, des angoisses intimes, des remises en question, de la bêtise humaine et de l'injustice. Tout cela dans un contexte de ségrégation raciale en Amérique dans les années 50.

Non seulement mélancolique, la mort est sans cesse mise en avant donc si jamais vous souffrez de thanatophobie, prenez garde à ne pas sombrer dans toutes ces horribles et magnifiques évocations de terreur face à la fin prochaine. La première ligne annonçant déjà la couleur : " La mort est toujours la même, mais chacun meurt à sa façon." C'est une ambiance auquel il va falloir vous habituer, car au fil des pages, le tableau devient de plus en plus sombre. Cela devient même oppressant / étouffant.

Mais ne vous en faites pas ! Carson Mc Cullers possède une plume très singulière, et ce n'est pas rien de le dire, par cette qualité, elle fait d'un sujet banal quelque chose de beau et de profond. Là est son plus grand talent, il faut dire que c'est une excellente portraitiste. D'un petit rien elle fait un tout. D'une simple personne qui pourrait sembler éteinte, elle le transforme en quelque chose de vivant et de consistant. Les sentiments sont très nuancés et variés ce qui permet de nous attacher à chacun tant ils semblent manquer de repères.

Comme indiqué dans le titre de ma critique, L'Horloge sans aiguilles est partagé entre cruauté (personnes abattues sans raison, propos raciales, rejet...) et tendresse. (Espoir paternel, sentiments indicibles, compassion, confessions...) Ce qui est très intéressant car l'auteur exploite un monde contrasté à travers beaucoup de relations zig zag. Tout n'est que montée et redescente au fil des chapitres ce qui fait qu'on bascule avec les personnages.

Personnages qui sont d'ailleurs très bien exploités par leur profil psychologique et marginaux. D'ailleurs, j'aimerai en dire plus à ce sujet, mais j'ai bien peur de vous gâcher tout l'intérêt de la découverte. Mais vous remarquerez peut-être tout comme moi qu'ils sont tous liés par un refus / rejet de la réalité et surtout qu'ils souffrent d'une affreuse incapacité à communiquer entre eux... (Notamment à cause d'un point de vue politique et social) Que leurs caractères sont tous très différents, mais qu'ils ont chacun un degré de souffrance incommensurable à supporter...

L'un des protagonistes en faisant l'aveu :

"Pourquoi mens-tu ? demanda Jester

- Je ne mens pas vraiment, mais, quelquefois, j’invente des aventures qui auraient très bien pu m’arriver et je les raconte à des zigotos d’abrutis comme toi. Une bonne partie de ma vie, j’ai dû inventer des histoires parce que la réalité était trop dure à avaler. "

Si j'insiste autant sur la diversité et le contraste de ce roman, le juge Fox Clane en rajoute une couche puisqu'il est un ancien membre du Ku Klux Klan. Mais toujours réactionnaire et regrette l'abolition de l'esclavage. Et décide pourtant d'embaucher (pour ne pas dire adopter) un orphelin noir.

Je terminerai sur cet avis en faisant part de ma stupeur face au manque de popularité de ce livre. Il gagne à sortir de l'ombre et j'y verrais même aisément une adaptation cinématographique. Tout ça pour dire que je vous le conseille vivement, chaudement et chaleureusement, tout ce que vous voulez ! Mais lisez-le ! Et attaquez même "Le coeur est un chasseur solitaire" ou bien encore "La ballade du café triste" du même auteur. ;)

[ Si toutes les étoiles ne sont pas accordées, il se trouve tout simplement que je n'ai pas spécialement aimé la fin trop brusque ce qui m'a valu un arrière goût de frustration face à toute la fascination que j'avais bien pu ressentir. ]

[ [ Et un immense merci à Maeva pour m'avoir offert ce livre. ] ]
lachambrelitteraire
8

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Créée

le 12 sept. 2014

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