Marche ou rêve
La Horde du Contrevent a fait de Damasio l'un des auteurs de science-fiction les plus influents de sa génération, rendant ses lettres de noblesse à un genre encore considéré comme mineur. Dès les premières pages du récit, le lecteur est confronté à une polyphonie narrative, ce subtil dispositif nous libère d'une vision unique du monde, pour nous en proposer au contraire une pluralité. Liberté du lecteur, liberté des personnages sont des thèmes centraux de ce livre. A ce titre, la manière dont nous sont présentés les différents protagonistes est pleine de sens. Loin de les définir d'abord par leur appartenance au groupe, l'auteur les présente au lecteur comme des individus (le terme prend ici tout son sens) aux caractères particuliers appartenant ensuite à un groupe. L'individualité n'efface pas la communauté et réciproquement, la somme des individualités est ici égale au groupe.
En filigrane des idéaux politiques du citoyen engagé succèdent alors les idéaux poétiques de l'écrivain. Dès les premières lignes, on sent l'épure stylistique et le plaisir d'inventer une langue, à nouveau monde, nouveau langage semble dire en creux l'auteur. L'idée d'une pagination inversée est excellente, la fin du livre sonnant comme un début. Véritable ode au dépassement de soi, à l'action collective, cet ouvrage dépasse finalement son histoire, son genre, pour amener le lecteur à se questionner sur les différentes potentialités de la littérature. L'automne arrive, le vent se lève !