La Maison des feuilles par chevreuil

Je vais sans doute faire le rabat-joie, mais ce bouquin m'a déçu.
Pourtant je me considère comme bon public pour ce genre d'oeuvre originale, déjantée, ambitieuse, qu'on m'avait dit aussi singulière que la Horde du Contrevent. Peut-être avais-je nourrit trop d'attente, peut-être aussi que je déteste quand un auteur éprouve sciemment son lecteur à coup de pages soporifiques écrites dans un style de critique universitaire.

Heureusement, quand il veut, Danielewski écrit bien : il y a des fulgurances terrifiantes, des passages glaçants qui démontrent tout son talent d'écrivain et sa maitrise du genre horrifique, certaines angoisses m'ayant poursuivies dans mon sommeil. L'ombre de Borgès plane sur chaque page de ce livre-objet construit comme un labyrinthe : le niveau d'imbrication du récit est vertigineux, le compteur de mise en abyme s'affole.
La mise en page et la typographie nous aide cependant à y trouver notre chemin, les phrases se contorsionnent au rythme du récit, les mots transpercent littéralement les pages, devenant notre fil d'Arianne quand l'écriture décide de s'affranchir des lois fondamentales de la linéarité. On sent bien que Danielewski questionne en permanence notre rapport même à la lecture, à l'oeuvre et à ce qui l'entoure. On ne peut donc pas vraiment lui reprocher son manque d'ambition, raison suffisante pour en commencer la lecture.

Malgré tout cela j'ai failli abandonner à plusieurs reprises, perdu entre considérations psycho-mythologiques et critique académique rasoire, et j'ai été assez satisfait d'en venir à bout. Sur les 700 pages l'intérêt des différents chapitres est vraiment trop inégal, et l'ambition du récit ne vient pas compenser des longueurs évidentes. Bref, c'est un livre qui ne laisse pas indifférent : pour moi il aura surtout été éprouvant.

Ca m'aura au moins permis de comprendre et de rire à cette excellente parodie de xkcd : http://xkcd.com/472/

NB: ça mérite 6, mais je mets 5 pour apparaître dans le match des critiques. Oui, c'est de la pure malhonnêteté intellectuelle.