"La reine des damnés", c'est l'exemple parfait des méfaits de la surenchère scénaristique tapageuse dans la construction d'un univers fantastique. Avec la nouvelle autosuffisante "Entretien avec un vampire" Anne Rice proposait une nouvelle approche agréable du mythe du vampire un peu engoncé dans les préceptes posés par Bram Stoker, réduisant à peau de chagrin la frontière entre le monstre et l'humain persistant en lui. Peut être dépassée par son succès, la voilà qui enchaine sur le volume plus conséquent et grandiloquent "Lestat le Vampire", reprenant les ingrédients de son premier succès tout en y incorporant ça et là quelques éléments pouvant constituer les brides d'une mythologie globale.

Afin de conclure son histoire, là voilà qui s'est échinée à proposer un feu d'artifice final, "La Reine des damnés", qui a vite pris l'air d'un protubérant pétard mouillé. Raconter la vie et les alternoiements d'un être (mort-)vivant sur plusieurs siècles, Anne Rice sait faire. Avec un style un peu lourd et mélodramatique, qui n'empêche cependant pas se plonger dans l'histoire et c'est bien là l'essentiel. Mettre en place toute une cosmogonie expliquant l'apparition puis la décadence d'une race démoniaque en multipliant les destinées de personnages et intrigues parallèles millénaires, c'est une autre paire de manche. Anne Rice échoue lamentablement à donner un ton de véracité à son histoire, et l'esprit chagrin que je suis rechigne à lire les derniers reliquats du vampire de Stoker voler en éclats (SPOILER -- vas y que le vampire survit en plein jour, devient une sorte de supervampire omnipotent, vole, brille d'un halo évanescent, abrite un démon dans son sang qui "fait de minuscules piqures" aux humains, etc FIN DES SPOILERS).

Je n'ai personnellement pas cru un seul instant à l'univers développé par Anne Rice. Trop simple et trop compliqué à la fois pour résister à l'analyse (oui, on peut analyser la vraisemblance d'un univers fantastique, c'est même mon occupation préférée).

Le diablus ex machina final m'a personnellement achevé, tombant comme une perruque dans le potage.

L'effort d'Anne Rice est louable, mais le résultat est à mon sens excessivement décevant. Ensuite ça se lit sans difficulté dans le métro ou à la plage, et on est obligé de le lire quand on a fini "Lestat le Vampire". Mais à choisir, je vous recommanderai plutôt de vous limiter à "Entretien avec un vampire".
Hypérion
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le 11 avr. 2012

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