5 petites anecdotes très embarrassantes quand on lit un livre porno.

Mon tout premier livre pornographique, et je n'ai pas été déçu du résultat. Mélanie (la féministe ci-contre) est un adorable petit bout de femme, qui saura ranimer vos listes avec des dizaines de citations équestres. Quitte à commencer par du porno, autant y aller les quatre fers en l'air. Il y aura des fautes dans cette critique, j'ai voulu tenter ce tout nouveau style pour vous perdre un peu. Et rien à voir avec la flemme de corriger, vous êtes vraiment insupportablement imbuvables.

1. La copine qui lit le roman avant toi.

Il était dans ma bibliothèque. J'ai une grande bibliothèque, beaucoup de livres, et la nana arrive à tomber dessus. La jument, me dit-elle, c'est bizarre comme livre. Je lui dis laisse, va plutôt faire la vaisselle - oui quand je suis stressé je parle mal à la femme, elle me dit non ça va aller, ça m'intrigue. Etant fait comme un rat, je prends le parti d'en rire, mdr lui dis-je, j'ai acheté ça pas cher sur internet, je voulais voir ce que ça faisait. Elle me lance un petit regard sans sourire, la personne me juge clairement comme la plus immonde des merdes machistes du 21ème siècle - et je ne peux lui donner tort. Elle était chez moi, elle a lu ça pendant deux jours et je n'ai jamais fait autant de regards en coin de ma vie. Pour observer ses réactions, déceler la moindre parcelle de lueur dans ses yeux. C'eut été le feu vert pour me dire, tu sais, Evy, c'est possible, toi et moi, la porte est entrouverte pour transformer ce rêve en réalité. Rien, nada, pas un début de prémices de quelque chose. A la fin du livre, elle me fait simplement : j'ai eu du mal à le finir. J'ai dit ah oui, quand même, tu me cherches. Elle m'a dit pourquoi, j'ai dit laisse tomber, Esparbec et moi on se comprend ma couillasse. Depuis, je tâtonne un peu dans la pénombre, je fais parfois des métaphores animales pour la pousser elle aussi à devenir une jument. Mais apparemment, pour le moment on coince un peu sur les modalités. On peut partir sur du missionnaire mais dans le noir truc de fou furieux, j'ai dit ok c'est un bon début, ça fait son petit bonhomme de chemin ou quoi.

2. Quand on me demande ce que je lis actuellement.

Cette question est insupportable. Déjà parce que dans 95% des cas, la personne en face ne connait pas ce que je lis. Donc je suis obligé de dire le titre, donc la personne dit qu'elle ne connait pas (sans blague poto), donc elle me demande ça parle de quoi, donc je dis un truc du style "ça parle d'un couple qui se sépare", donc elle dit "ça a l'air intéressant" alors que non putain, c'est pas du tout intéressant dit comme ça, ne dis rien si c'est pour dire ça, et arrête de sourire putain, sois normal mec. Bref, les gens qui me demandaient ce que je lisais quand je lisais La Jument, je répondais tout simplement un titre au hasard : je me fais du Victor Hugo en ce moment, c'est vraiment pas mal. Lequel me demandait-t-on, ce à quoi je répondais qu'est-ce que ça peut te foutre, t'es vraiment misérable. Ce à quoi, par ce bon mot, reflet de ma culture étendue, la personne en face ne répondait plus rien. Il y avait bien toujours un ou deux marioles pour me demander ce que j'en pensais, mais je les balayais d'un revers de regard.

3. Quand tu es dans le bus et que tout le monde t'observe.

Evidemment, je ne suis pas complètement con, je ne montre pas la couverte avec Mélanie en mode fais-moi mal, fais-moi tellement mal que même Gaspar Noé il ferme le livre tellement ça va trop loin dans le jument game. J'avais ma sacoche, et je lisais le roman à l'intérieur. Mais c'est comme quand tu fais la langue de pute sur une personne et qu'elle apparaît derrière toi, tu as toujours l'impression qu'elle a tout entendu. Certains regards ne trompent pas : la petite jeune qui fait semblant de textoter (mais qui doit en réalité prendre des clichés de moi pour poster ça sur instagram avec un commentaire du style regardez ce boloss dans le bus, hashtag #choké), la vieille qui n'a rien d'autre à foutre que de te demander la place et qui te fait sursauter, car quand tu lèves ton putain de regard vers elle, tu l'imagines à quatre pattes par terre, dans une écurie miteuse, en train d'en demander plus, toujours plus la vieille pouliche. Puis tu as les collégiens, qui se foutent de ta gueule ouvertement (ils parlent de toute façon toujours sur moi quand j'ai le dos tourné, je le sais et je dis ça sans paranoïa c'est vrai, ils regardent et ils font des messes basses et ils rient parce que je suis moche je suis sûr putain ça me fout le seum comme disent mes gars sûrs). Enfin, d'accord, très bien tout le monde, je lis La Jument dans les transports en commun, mais je jure sur la tête de ma mère, même si c'est pas trop de circonstance, que c'est la première fois que ça m'arrive.

4. L'achat, c'est chaud ou c'est comment.

Au début, je faisais partie des gens qui achetaient des livres dans des librairies. Non mais carrément quoi, c'est so 2014. Puis j'ai découvert internet, Amazon, le site de momox, très bon site par ailleurs. (Pour tous les petits rageux littéraires du 75, je continue évidemment d'aller en librairie, c'est une mise en scène bordel) Je cherchais les rayons érotiques dans les grandes boutiques, pendant pas mal d'années. Il y a toujours un gros pervers assumé qui flâne dans ces rayons, et des nanas complètement décomplexées. Mais quand toi tu y vas, tu sais très bien que la Jument ça va pas passer. Tu sais très bien l'image que tu vas renvoyer de toi. J'ai vite abandonné l'idée d'acheter mon premier roman porno dans une librairie, et je suis allé sur internet. J'ai choisi le plus misogyne, histoire d'être encore plus beauf sur le senscritique game. C'est bien simple, quand j'ai refermé le livre je voulais faire un classement des filles les plus juments du site, classées en qualité de crinières. Là j'ai dit non. J'ai commandé le livre sur internet, et je n'avais qu'une peur, que sur l'emballage soit inscrit le truc. C'est con je sais, mais c'est comme lors de nos premiers sextoys, ils ont beau dire qu'on ne capte rien sur le colis, tu as toujours cette petite boule au ventre. Le livreur sait. Il sait sûrement à quoi correspond la société. Quand bien même, le mec qui emballe le cadeau sait; Tu lis un livre pornographique. Ca choque la petite bourgeoise fraîchement mère de famille que je suis. Je me sens salie. Il n'est plus question de classer les nichons des stars au cinéma dans une liste sur internet. C'est la vraie vie, la prochaine étape c'est la castration chimique et je n'ose même pas vous en révéler la cause bordel. Chloë Moretz et alors, Kick-Ass. Non mais moi c'est Kick-Ass 1 direct et alors, que vas-tu faire contre moi ?

5. Assumer sur SensCritique.

J'ai vu un autre gars sûr qui a lu la moitié de ce livre, et je le cite parce la délation ça allège le coeur, Kenshin. Ca m'a rassuré. Ca m'a réconforté. Je me suis dit, bon, si d'autres arrivent à avouer qu'ils ont lu ne serait-ce qu'une partie, publiquement, je pense être capable de le révéler à tout le monde. C'est aussi mon rôle sur cette plate-forme d'être un babtou solide et de dire "oui, j'y étais, j'ai vu, touché, senti, je l'ai fait". Aujourd'hui, je pose mes attributs sur la table et je l'affirme haut et fort, on peut aimer Jane Austen et vouloir découvrir comment une femme peut passer de maman tout à fait respectable en championne de sauts d'obstacles. J'assume parce que c'est aussi ce que les gens attendent de moi, ils attendent un volet sexy, culturel, intelligent, drôle de SensCritique, un truc un peu atypique et c'est ce que je propose depuis le départ. En réalité, je me suis quasiment senti obligé de lire ce livre pour pouvoir vous le raconter - mais il n'y a finalement rien à raconter, c'est une daubasse. Vous êtes les façonneurs, les maçons de mon coeur, j'écris pour vous, parfois je regarde, lis pour vous, pour vous offrir le meilleur des promesses que vous me fixez à ma place. Ce livre, je vous le dédis. La jument, je l'ai lu pour vous, rien que pour vous et je n'en ai tiré aucun plaisir. Je ne le ferai plus, car mon acte de bonté est désormais achevé, j'ai fait ma part du travail. A vous de perpétrer ce lien intime qui nous lie vous et moi, à votre tour d'en acheter un et de nous faire part de vos conclusions.

Julia Roberts ne disait-elle pas "mange, prie, aime" ? Donc automatiquement, voilà.