Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités



disait l'oncle de Peter Parker. Cette analyse peut être considérée comme une sorte de toile de fond du livre de Laurent Gaudé, La Mort du roi Tsongor. Dans une Afrique antique, le roi Tsongor a érigé l'empire le plus vaste que l'homme ait connu. Père de trois fils et d'une fille, il s'apprête à marier cette dernière à un jeune et grand seigneur appelé Kouame. Mais le jour des fiançailles, un autre prétendant se présente au roi Tsongor, amenant avec lui une armée plus grande encore que celle de Kouame. La guerre campe sur les collines surplombant la ville de Massaba, mais l'honorable roi est prêt à tous les sacrifices afin de sauver son royaume et ses sujets sur lesquels il veille depuis si longtemps.


Laurent Gaudé est un écrivain qui marquera certainement la littérature française du XXIe siècle. Jonglant constamment depuis vingt ans entre théâtre et littérature classique, il est aujourd'hui l'auteur de nombreuses pièces de théâtre et romans. La mort du roi Tsongor, écrit à tout juste 30 ans, est son deuxième roman. Son écriture, simple et efficace, est au service de la magnificence du récit. Il n'y a pas de recherche de pompeuses figures de style, recherche dans laquelle de nombreux écrivains s'abîment et souvent se perdent, oubliant le pouvoir intrinsèque du mot.


La guerre, dans toute son horreur et sa futilité, est au centre du récit. Tel Plutarque relatant le siège et le saccage de Thèbes par Alexandre le Grand ou Homère et la guerre de Troie , Gaudé est le chroniqueur d'une longue guerre, certes imaginaire, où les destins se jouent. Héros, anonymes, innocents ou bourreaux, tous feront face lors de cette guerre à leur destinée car il s'agit ici de ces guerres antiques, comme celles citées en amont, où les années défilent sur le champ de bataille.


Quel est l'héritage qu'un homme laisse à ses enfants ? Des souvenirs ? Des biens matériels ? De l'amour ? Ces questions que le roi se pose de son vivant, mais aussi dans la mort, trouvent écho dans notre société. Des questions existentielles pour lesquelles il est impossible d'apporter une réponse unique et universelle. Toute la complexité de l'humanité avec sa beauté, sa laideur, ses doutes et ses certitudes est abordée sans prétention par l'auteur.


Prix Goncourt des lycéens en 2002 et prix des libraires l'année suivante, La mort du roi Tsongor est un court roman épique d'environ deux cents pages, que le lecteur saura apprécier par sa fluidité et sa construction même si celles-ci sont un peu trop scolaires. Un conte qui pourrait se raconter le soir, auprès du feu.



Je suis le roi Tsongor, et j’ai sur mes joues et au creux de mes mains autant d’années que tu as de cheveux.



Ainsi parlait Tsongor, roi du royaume de Massaba.

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le 17 avr. 2019

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Vincent Ruozzi

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