Le comte de Fontaine est un royaliste pur et dur. Un homme fidèle à ses convictions qui a été en grand danger durant la révolution (il a participé au financement de la guerre de Vendée) et qui a ensuite refusé son aide à l’empereur. A la Restauration, monsieur le comte se rend à la cours et obtient enfin quelques privilèges. Mais bien pâlots en regard de ses investissements passés à la défense de la couronne.
Quelque peu déçu, l’homme accompagne le roi en exil durant les cent jours : puisque que son combat sur le terrain ne lui a pas rapporté, monsieur se dit avec perspicacité qu’être aux côtés des puissants en fuite sera peut-être plus rémunérateur. Et le calcul fut bon. Durant l’exile, le roi apprit à reconnaître la valeur de l’homme et au retour en France, les remercîments lui tombèrent dessus, généreux et bienfaisants comme une bonne pluie sur un sol assoiffé.
Le roi fit en sorte que les cinq premiers de ses six enfants firent un beau mariage. Malheureusement pour la petite dernière – Emilie – la souveraine bienveillance s’était quelque peu émoussée. L’enfant gâtée, chérie de toute la famille, se trouva ainsi défavorisée au grand dam de son père. Circonstance d’autant plus regrettable que l’enfant avait une haute opinion d’elle-même. Jamais soupirant n’était assez bien pour elle : trop gros, pas assez beau, pas assez riche, pas assez noble, trop peu cultivé, trop fat ou pas assez ambitieux, ennuyeux… Elle exécrait les banquiers et autres financiers. Mais voulait un fils de pair de France. Elle se montrait si difficile qu’à vingt ans mademoiselle n’était toujours pas mariée, que les prétendants se faisaient de moins en moins nombreux malgré sa grande beauté et sa fortune et que son père lui déclara se laver les mains de son mariage impossible et qu’il lui donnerait son consentement quand elle aurait trouvé chaussure à son pied.
Le lecteur s’attendait à voir Emilie prendre le voile quand elle aperçut au bal de Sceaux un bel inconnu qui lui tapa immédiatement dans l’œil. La belle n’eut de cesse de retrouver le bel inconnu, d’apprendre son nom, de vérifier sa noblesse dont elle ne doutait pas, de le séduire et de se faire épouser.
Tout se passa pour le mieux grâce à l’aide de son grand-oncle, vieillard sympathique, ancien marin et homme de ressources. Jusqu’à ce qu’Emilie découvre que le jeune homme (Maximilien Longueville – et on note au passage l’absence de particule) n’était qu’un simple marchand d’étoffe. Pourtant, elle l’aimait de toutes ses forces. Mais ses préjugés furent les plus forts. Elle tourna le dos à son amoureux au grand cœur qui, en fin de compte, était fort riche, vicomte et pair de France.
Par sa bêtise aveugle, mademoiselle manqua le plus beau parti de Paris, celui dont elle avait toujours rêvé. Elle se consola (en partie du moins) en épousant son vieil oncle : riche, noble et titré, mais un tantinet décati.
Un texte superbe, parfois drôle, souvent grinçant.
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le 5 juin 2013

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