Marica Barbier est tout sauf une jeune femme comme les autres. Excessivement laide et mal dans sa peau, elle répond à l'annonce d'un photographe à la quarantaine bedonnante, Joachim Kellermann, qui souhaite prendre des clichés de gens avec des particularités physiques déconcertantes ; en bref, il souhaite des gens moches, difformes, horribles. Entre eux va s'installer une fascination morbide, un amour inconditionnel déroutant et malsain qui débouchera sur autant de magnétisme que de haine.

C'est le deuxième roman de la très jeune Anne-Sophie Brasme après "Respire", sorti alors qu'elle n'avait que 17 ans. On y découvre une Marica très pessimiste, antipathique et fataliste dans un roman qui alterne deux points de vue différents : le sien et celui du photographe, Joachim. Si, page après page, on observe un style déjà très affirmé, un vocabulaire étoffé et un cynisme déjà parfaitement maîtrisé, Le Carnaval des monstres manque cruellement de consistance et d'humanité. Le côté désenchanté plaît mais ne rebondit jamais pour nous emmener plus loin, on reste dans un univers déshumanisé où les deux protagonistes n'ont plus foi en rien - et surtout pas en eux-mêmes. L'intérêt que nous portons pour leur petite personne devient très relatif.

Il y a beaucoup de Nothomb chez Anne-Sophie Brasme. Cet amour fascinant qui tourne à l’obsession, à la rage, aux pulsions charnelles et mortelles. L'auteur étale la laideur et la fait dégouliner à toutes les sauces, des sentiments corrompus jusqu'à la moelle au dessèchement physique, tout y passe pour présenter et représenter la misère totale des personnages qui s'admirent autant qu'ils se détestent. Le livre me rappelle celui de Amélie Nothomb, Attentat, où un homme de mode, d'une laideur absolue, tombe sous le charme d'un canon de beauté. Leur relation est vouée à l'échec mais tout le processus d'attraction charnelle, quasiment bestiale est le même.

Une fresque désemparée et morbide qui égratigne sans aucune nuance notre vie sur Terre. L'oeuvre manque toutefois de second degré et de désinvolture. La redondance du récit est écrasante et les aphorismes trop nombreux ; on frôle l'encéphalogramme plat à plusieurs moments.

Créée

le 7 janv. 2015

Critique lue 423 fois

13 j'aime

4 commentaires

EvyNadler

Écrit par

Critique lue 423 fois

13
4

D'autres avis sur Le Carnaval des monstres

Le Carnaval des monstres
CabonDina
6

Critique de Le Carnaval des monstres par CabonDina

Le monstre n’est pas toujours celui qu’on croit. Voilà caricaturée la morale du roman. Traquant la part d’humanité dans la laideur tant physique que morale, Anne Sophie-Brasme nous emmène dans un...

le 24 juil. 2012

Du même critique

Her
EvyNadler
8

Mauvaise foi

Bon déjà je tiens à préciser que je voulais mettre 5 dès le début. Avant même la première minute. Enfin dès le début quoi du coup. Oui je sais, c'est pas digne d'un critique, c'est pas digne d'un...

le 22 juil. 2014

232 j'aime

21

Eternal Sunshine of the Spotless Mind
EvyNadler
10

Un petit bijou de vie plein de poésie...

Jim Carrey prouve une fois de plus qu'il n'est pas qu'un trublion. C'est surtout un immense acteur avec une palette d'émotions immense. Kate Winslet, elle, livre ici une de ses plus belles partitions...

le 24 avr. 2014

164 j'aime

12

Juste la fin du monde
EvyNadler
8

FAQ Xavier Dolan - Comprendre et apprécier Juste la fin du monde

Parce que je n'arrive pas spécialement à remettre toutes mes idées en place, parce que je n'arrive parfois pas à séparer le négatif du positif dans ce film, et surtout parce que je n'ai aucune idée...

le 22 sept. 2016

133 j'aime

12