J’ai beaucoup apprécié la lecture de ce roman même si au final je suis un peu déçu par le côté implicite. Il m’a été plus facile à apprécier que L’Etranger ou L’écume des jours parce que l’intrigue principale est plus prenante. Mais là où ces deux derniers se rattrapaient sur un côté implicite qui m’avait beaucoup plu, Le Portrait de Dorian Gray pêche pas ses questionnement que je ne trouve pas très intéressants. Ou du moins pas assez développés pour l’être.


La lecture m’a beaucoup plu parce que j’aime beaucoup les questionnements philosophiques, les aphorismes et les mots d’esprits. Ce roman, non seulement en offre à la pelle, mais possède un personnage qui incarne cet esprit. Lord Henry est pour moi le personnage principal. C’est sa présence qui rend le roman passionnant. Lorsqu’il n’est pas là, c’est l’ombre de sa présence qui est intéressante. Malheureusement, malgré la flamboyance littéraire du personnage, son cynisme sonne creux et grotesque. Il est pourtant plaisant de se retrouver une fois sur deux sur un aphorisme passionnant et une fois sur deux sur un aphorisme grotesque parce qu’il arrive parfois que l’on doute et que l’on ait du mal à trancher.


Là où je trouve que le roman est faible c’est dans le fond. Comme 99% des romans, on retrouve la société bourgeoise – aristocratique – mondaine (à cocher selon l’époque d’écriture) et sa vie déconnecté du monde réel de 99% des gens. Cette frange de la société est surreprésentée en littérature (comme dans tous les arts et les médias d’ailleurs). Les questionnements qui en sont issus sont donc beaucoup moins intéressants car ce sont ceux des classes exploitantes.


« Qui veut retrouver sa jeunesse n’a qu’à reprendre ses folies. Car la jeunesse est dans le péché »
Réduire la jeunesse au péché est tellement grotesque. C’est peut être du à l’époque ou encore à la vie mondaine des exploiteurs. Je ne trouve pas ça très intéressant alors que le sujet du foisonnement de tentatives de la jeunesse promettait d’être palpitant.


« Peut-on vivre sans conscience ? »
Ce thème central ne me semble pas intéressant, du moins pas dans la façon dont il a été traité. Le traitement ne me correspond pas car selon moi, la vie mondaine des 3 personnages principaux (et de l’auteur lui-même) est une vie sans conscience d’être la classe exploitante, qui plus est coupée du monde. Encore un sujet riche mais bâclé.


Cela débouche sur le questionnement final : « Peut-on vivre sans se tromper soi-même ? Pour vivre mieux vivons aveugle ? ». Dans le cas présent, le questionnement est presque inutile alors qu’il aurait pu être fécond dans une autre histoire.


Peut-on vivre sa vie comme une œuvre d’art ? Encore un questionnement qui sonne plus juste avec les éléments du roman et qui est du coup assez intéressant. Même si je regrette les œuvres d’arts dépourvues de consciences.


Oscar Wilde pose beaucoup de question et ne souhaite pas donner trop d’élément qui pourrait trahir ses propres réponses. Soit. Mais le contexte du roman fait que ces questionnements ne sont pas très féconds alors qu’ils auraient pu l’être.


Malgré tous ces défauts, j’ai beaucoup apprécié la lecture car il est rare de voir des personnages aussi charismatiques et leurs idées, leurs manières de s’exprimer sont très plaisantes à lire. Malgré les défauts majeurs, les questionnements et aphorismes regorgent et on peut facilement s’arrêter toutes les dix pages sur un thème que notre cerveau n’arrivait pas à formuler. Et c’est toujours un plaisir.


C’est un excellent roman qui serait pour moi un chef d’œuvre s’il n’empestait pas de l’esprit bourgeois venant polluer ses questionnements.

Foolly
8
Écrit par

Créée

le 7 juin 2018

Critique lue 333 fois

1 j'aime

Foolly

Écrit par

Critique lue 333 fois

1

D'autres avis sur Le Portrait de Dorian Gray

Le Portrait de Dorian Gray
Nananah
4

Critique de Le Portrait de Dorian Gray par Nananah

Ma note est un peu sévère. J'aurais peut-être pu me laisser tenter à lui mettre un 5. Mais la quasi-unanimité sur ce livre me donne envie de bien marquer ma déception suite à la lecture de ce...

le 3 août 2012

77 j'aime

22

Le Portrait de Dorian Gray
SanFelice
10

L'art, les conversations et la débauche

Voilà un livre déroutant. Il n'est jamais là où on l'attend. On a l'habitude de le présenter comme un roman fantastique, alors que le surnaturel y est très peu présent ; il n'intervient qu'à partir...

le 11 mars 2012

70 j'aime

10

Le Portrait de Dorian Gray
Vincent-Ruozzi
9

Âme damnée

Le Portrait de Dorian Gray est une œuvre qui fascine. La magie liée au soupçon de fantastique apporté par l’auteur, Oscar Wilde, est une sorte d’ombre envoutante qui plane sur la vie de son héros,...

le 5 nov. 2016

57 j'aime

7

Du même critique

La Prochaine Fois que tu mordras la poussière
Foolly
5

Critique de La Prochaine Fois que tu mordras la poussière par Foolly

Impression bizarre en fin de lecture. J'en ressors avec un petit goût amer. Un malaise. Peut-être que je n'étais pas dans une humeur à lire ce genre de texte. Même si c'est parfois très joli, j'étais...

le 29 sept. 2023

9 j'aime

1

Radio Metronom
Foolly
4

Critique de Radio Metronom par Foolly

Je suis très frustré quand je regarde ce type de film. Le thème de l'envie de liberté est très intéressant. Que ce soit des libertés politiques ou juste de pouvoir écouter tous les genre de musique...

le 6 janv. 2023

8 j'aime

QALF
Foolly
2

Putes, putes, putes, argent, argent, drogue et glock

C’est quand même décevant de devoir écouter toutes ces paroles médiocres pour trouver des punshlines amusantes ou intéressantes : J’sais pas pourquoi t’as peur de vieillir La mort, c’est...

le 24 sept. 2020

8 j'aime

8