C'est le cinquième Michel Bussi pour moi, (après avoir lu « Un avion sans elle », « ne lâche pas ma main », que j'avais moins aimé, puis « les Nymphéas noirs » que j'avais adoré, suivi de « Maman à tort » et sans omettre « N'oublier jamais ») et je reste toujours autant convaincue du grand talent de cet auteur !


Le livre est construit en deux parties qui alternent le passé et le présent, 1989 et 2016. Tout se passe en Corse, sur la presqu'ile de Revellata, près de Calvi, un petit coin de paradis, miraculeusement préservée jusqu'à ce jour du bétonnage systématique des côtes (grand débat sur la préservation du littoral). Ces terres appartiennent toutes ou presque à une seule famille : les Idrissi avec Ceasare, le patriarche, en tête de proue. On apprécie au passage la petite carte bien utile, fournie en début de roman.


En 1989, donc, Clothilde Idrissi a quinze ans, elle passe ses vacances en compagnie de ses parents sur la terre familiale au camping des Euproctes tenu par la famille Spinello – le père. Durant cet été-là, elle tient un journal intime à la couverture bleue dans le secret de la grotte aux veaux marins qu'elle affectionne particulièrement ou partout ailleurs, comme sur la plage où elle fait semblant de lire «les liaisons dangereuses»; elle s'adresse à un lecteur « inconnu » et où elle y raconte ses états d'âme, les copains, son frère de 3 ans son ainé et leurs « quatre cents coups » d'ados, son coup de coeur pour Natale qui est plus âgé qu'elle et qui est plutôt attiré par sa mère. On y trouve des références très marqué au « Grand Bleu » ou à la « Mano Negra » qui nous transporte vers le passé entre souvenirs cocasses et nostalgie. Et puis une soirée pas comme les autres, après un repas en famille chez le Papé Cassanu, elle est brusquement obligée de partir afin de rejoindre la voiture familiale pour se rendre à un concert de polyphonie Corse. Dans la précipitation elle laisse son journal sur le banc de la cour chez ses grands-parents. Juste après, sur la route sinueuse de Petra Coda, où les lacets et les virages en épingles à cheveu s'enchainent, c'est l'accident qui coutera la vie à son père (le fils de Cassanu), sa mère (« l'étrangère » venue du continent pour voler l'enfant du pays) et Nicolas, son frère de 18 ans. Elle s'en sort par miracle mais reste psychologiquement marquée par ce drame.


En 2016, vingt-sept ans après la tragédie, Clothilde revient pour la première fois en vacances en Corse, comme un pèlerinage, en compagnie de son mari, Franck et de sa fille, Valentine, adolescente sans histoires qui semble s'ennuyer ferme. Comme en 1989, elle séjournera au Camping des Euproctes, toujours tenue par la famille Spinello – Cervone, le fils. Et là, tout semble partir en vrille, elle reçoit des messages bizarres, des évènements étranges surviennent auxquels elle ne trouve qu'une explication : sa mère serait toujours vivante alors qu'elle était bien dans cette Fuego rouge avec elle lors de cet horrible accident ?…. le doute s'installe, tenace. Petit à petit, alors que son mari est enclin à la prendre pour une folle, tant les évènements semblent la désigner comme telle, elle va démêler les écheveaux de la vérité (car il y en plusieurs), lentement avec chacun des protagonistes, là où la fierté Corse, la jalousie et le désir de vengeance les a tous emmenés.


L'écriture coule bien, légère, les chapitres sont assez courts et bien rythmés, il n'y a pas de temps morts, la lecture est agréable et le suspense bien entretenu. Les descriptions des paysages Corse nous enchantent et nous donnent envie d'aller les découvrir. Et puis, au fur et à mesure de l'histoire on découvre la personnalité de chacun des personnages, certains très attachants avec leurs caractères bien trempés, d'autres carrément antipathiques mais tous révèleront aussi leur part d'ombres finalement, leurs aspirations, et leurs motivations profondes. On découvrira aussi l'ampleur de l'omerta en vigueur en Corse, de l'esprit de clan qui y règne fortement et il sera même question parfois de vendetta, tout comme dans le « Colomba » de Prosper Mérimée dont pourtant Michel Bussi se moque un peu en y faisant une référence pas très flatteuse.


En fait, juste un mot me vient à l'esprit: Woauhhh !! Pour moi « la mayonnaise » à très bien prise et je dois dire que l'auteur m'a bien menée par le bout du nez presque jusqu'à la fin, même si on peut parfois dire qu'il a usé de « clichés » et de ficelles un peu grosses. Pourtant le puzzle s'imbrique parfaitement ou presque, les « tiroirs » s'ouvrent sur un nouveau rebondissement à chaque fois, chaque personnage à une raison d'en vouloir à l'autre et représente un « coupable » potentiel. D'aucuns trouveront le rythme trop lent, moi, je pense plutôt qu'il prend le temps d'installer l'histoire. On voudrait savoir lire plus vite afin de connaitre la suite plus rapidement et on ne peut lâcher le bouquin tant l'intrigue est menée de main de maître tout du long. Car il y a plusieurs type de lecture, celle où l'on prend son temps, où l'on savoure les descriptions même si parfois elles sont un peu longuettes, on appelle quelques fois cela pompeusement « Littérature », là où les rebondissements ne sont pas les moteurs de l'histoire et puis les romans dit « addictifs » où l'on saute littéralement des phrases pour lire la suite. le style n'a alors plus vraiment d'importance car l'histoire a pris le pas. Et Bussi, pour ce roman, c'est à la fois un peu des deux !


Mais il est vrai aussi que le final du final, le dernier rebondissement est un peu trop capilotracté à mon goût et que certains détails semblent peu plausibles ou sont un peu trop facilement éludés, mais on pardonne ! On pardonne tout, car cette histoire nous embarque totalement dans un cadre idyllique entre maquis et mer turquoise et nous passionne avec des personnages tous plus mystérieux les uns que les autres. Bref, j'ai beaucoup aimé ! J'attends donc impatiemment le suivant…

KrysAline
8
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le 10 oct. 2017

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Krys Aline

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