Les yeux rivés sur mes écrans Bloomberg par François CONSTANT

Ella Delmas, avec son deuxième roman « Les yeux rivés sur mes écrans Bloomberg », sait manifestement de quoi elle parle. Moi pas, vraiment pas ! Je ne connaissais rien à la Finance en ouvrant ce livre, je n’en connais guère plus après. Pourtant l’autrice ne ménage pas sa peine pour nous immerger dans ce monde technique des péripéties des quinze dernières années du monde boursier. Peut-être en fait-elle trop ? Pour le lecteur inculte dans ce domaine, l’abondance de précisions apporte la confusion. Toutes les informations, pourtant bien données, se mélangent. L’esprit du novice n’a pas le temps d’opérer le tri et d’imprimer. L’afflux de détails noie chacun dans une énorme toile d’araignée conceptuelle. Je m’y suis senti prisonnier.
Et c’est peut-être cela, à mes yeux, une des forces du livre, il prend avec lui le lecteur qui, même s’il ne comprend pas tout, reçoit toutes ces informations comme les éléments constituant un décor. Il ressent alors l’emprise du milieu, l’ambiance oppressante de ce monde dans lequel Alice, jeune diplômée, a l’ambition de faire son trou malgré le côté ultra macho de ce monde de la Bourse et des marchés financiers.
La jeune femme va expérimenter le combat que doivent mener une paire de talons, une silhouette et une coiffure féminine pour s’imposer dans ce milieu où d’aucuns préféreraient leur assigner la posture de pourvoyeuse en cafés ou photocopies. Elle va se battre, perdre des batailles, subir des trahisons, se relever, combattre à nouveau et s’imposer. A elle-même, enfin trouver qui elle est, et au milieu.
Ella Delmas le sait et l’assume, on sent très nettement la thèse défendue par l’autrice et le roman s’apparente parfois davantage au témoignage appuyé qu’à une fiction. Mais ce livre a le mérite d’exister et se justifie par l’urgence de ce combat féministe, dans le sens noble du terme, qu’il est plus que temps de mener dans ce milieu professionnel, comme dans tant d’autres par ailleurs.
J’ai aimé l’analyse des caractères, même ou parce qu’ils sont typés. Le lecteur se reconnaît, en creux ou bosses, dans ce récit et il ne peut que se poser la question : « suis-je moi aussi comme cela ? »
Une invitation à réfléchir, à se grandir dans nos cercles sociaux sans toutefois écraser les autres ? Le lecteur qui abordera de la sorte ce roman « Les yeux rivés sur mes écrans Bloomberg », même en ne connaissant rien à la Finance, ne sera pas déçu. Ella Delmas permet un pas de plus pour un peu plus d’équité.
N’hésitez pas, tentez l’expérience !

Créée

le 23 juil. 2020

Critique lue 53 fois

2 j'aime

Critique lue 53 fois

2

Du même critique

Charlotte
François_CONSTANT
8

Critique de Charlotte par François CONSTANT

La chevauchée tragique de la Mort qui pousse à vivre. La Mort qui s’approche, s’accroche, fait peur, étouffe, éloigne, rapproche. La Mort qui force Charlotte Salomon, juive allemande, à devenir sa...

le 20 nov. 2014

18 j'aime

4

L'Amour et les forêts
François_CONSTANT
8

Critique de L'Amour et les forêts par François CONSTANT

À travers « L’AMOUR ET LES FORÊTS », paru chez Gallimard en 2014, je découvre l’auteur Éric REINHART. Belle découverte ! Bénédicte Ombredanne est une lectrice de cet auteur. Ayant apprécié son...

le 27 févr. 2015

17 j'aime

4

L'Art de perdre
François_CONSTANT
8

Critique de L'Art de perdre par François CONSTANT

« L’art de perdre » écrit par Alice ZENITER est la troublante histoire du silence de deux nations conduisant à la perte de paroles, donc de mémoire, de trois générations, celles d’Ali, Hamid et...

le 7 nov. 2017

14 j'aime