Bouleversant. Démesuré.

Ce sont les deux mots qui me restent à l’esprit une fois ce petit livre terminé. Bouleversant, pour le témoignage et démesuré, pour l’amour qu’on peut y lire.

Evidemment qu’on a un peu de mal à se figurer un amour absolu, inconditionnel et brûlant comme celui-ci. Et pourtant Zweig nous le dépeint si merveilleusement, le texte coule tout seul.
Il coule, comme la douleur de cette inconnue, ses joies qui se font rares, ses déceptions qui n’en sont que plus mortifiantes. C’est étourdissant.

Et toujours cet amour, omniprésent, dans chaque phrase. Rien ne nous écarte de la passion fulgurante de cette femme dont les premiers mots, avant de nous annoncer l’amour, nous annoncent une mort. Funeste présage.

Sous la forme d’une lettre, c’est une vie qui est contée, une vie caractérisée par la force du sentiment, par son absoluité même. Il n’y a pas de demi-mesure dans cette nouvelle, jamais, et la puissance du sentiment rend cette pauvre fillette –puis femme- esclave jusqu’à la fin de ces jours, d’un homme qui nous semble ô combien cruel de n’avoir pas su remarquer ce trésor comme il aurait dû, un homme qui oublie toujours et qui semble repousser le souvenir d’un vague coup de main.

Et pourtant de son point de vue, tout semble devenir acceptable de sa part, tant elle est aveuglée par son amour. Elle ne lui reproche rien, et jamais la rancœur ne se lit dans son discours. Jamais elle ne quitte sa passion ni la douleur qui va avec et l'amère rengaine des débuts de paragraphe « Mon enfant est mort » nous ramène durement à la réalité de sa situation.

Et la prise de conscience de ce romancier est, finalement, bien mince. J’aurais voulu le secouer, cet écrivain.
ManouNyu
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le 8 févr. 2013

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ManouNyu

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