Après m'avoir emporté dans ton Voyage au bout de la nuit, voilà désormais que je t'accompagne dans ta mort à crédit mon cher Louis Ferdinand.
Une mort qui prend la forme d'un long cri d'agonie, d'une déroutante farce humaine, d'une abracadabrantesque aventure. Tu nous déranges, tu nous fais rire, tu nous énerves, tu nous exaspère car tu nous rappelle que nous ne sommes que des Hommes.
Tes premières phrases font partis de celles que jamais on oublie, de celles qui sonnent comme un avertissement, de celles qui nous rappellent qu'un jour nous aussi nous y passerons.


"Nous voici encore seuls. Tout cela est si lent, si lourd, si triste...Bientôt je serais vieux. Et ce sera enfin fini."


Ton Histoire, c'est celle d'un gamin dont personne ne veut réellement, d'un gamin plein de rêves mais qui finit par être confronté à la médiocrité de ses pairs, à sa propre médiocrité parfois. C'est l'Histoire d'un gamin qui en attendant trop des autres finit par en être dégoutté. C'est l'Histoire d'un gamin qui haït les Hommes par trop plein d'Amour pour eux. C'est l'Histoire d'un espoir qui finit toujours par être désespéré.


"Ce que je voulais, c'était partir et le plus tôt possible et plus entendre personne causer. L'essentiel, c'est pas de savoir si on a tort ou raison. Ça n'a vraiment pas d'importance...Ce qu'il faut, c'est décourager le monde qu'il s'occupe de vous...Le reste, c'est du vice."


Ton Histoire, tu l'appuie sur des descriptions, parfois poétiques, parfois très sombres, mais souvent extrêmement drôles. On retiendra celle de ton père, fulminant sur son éternel malheur, celle de ton voyage en Ferry pour l'Angleterre, celle de Courtial et de ses magouilles, celle d'un de tes seul véritable rayon d'espoir, celle de ton Oncle et enfin celle du pays de nos amis d'outre-manche.


"Elle faisait des bulles comme un crapaud...La pluie d'Angleterre c'est un océan suspendu...On se noie peu à peu"


D'espérance en désespérance, de malheurs en malheurs, tu vis Louis Ferdinand. Tu vis et tu nous rappelle à quel point nous sommes médiocres, petits, insignifiants mais aussi à quel point nous pouvons être grand et porteur d'espoir. Au fond, tu nous aimes, tu nous aimes à en mourir et tu meurs du trop grand crédit d'espoir que tu nous as abandonné. Du trop grand espoir que tu as aussi placé en toi.
Mais peut-on se reprocher de n'être que des Hommes?

Kerke
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le 28 oct. 2015

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Kerke

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