La latence c’est le mot exact pour illustrer ce que le lecteur pourra ressentir en parcourant Né d’aucune femme. Une ambiance menaçante, caniculaire. Mais l’orage tant attendu est bien moins explosif que ce à quoi je m’attendais, l’effet de surprise retombe comme un soufflé.


Rose est vendue comme bonne par son père. Elle atterrit dans une demeure où résident le maître de forge ainsi qu’Edmond (jardinier et palefrenier) et la Vieille. Comme dans le conte de Perrault, une pièce de la maisonnée lui est strictement interdite. Elle découvrira rapidement que ses maîtres sont effectivement aussi talentueux dans l’horreur que Barbe Bleue.


L’histoire de Rose est contée au travers de plusieurs voix : celles de son père et de sa mère, d’Edmond et d’elle-même par les pages de son journal. J’ai pris plaisir seulement à la lecture des carnets de Rose sans cependant accrocher une seule seconde aux modes de narration utilisés par le père et Edmond notamment. Je volais sur les lignes sans voir les mots. En bref, je me suis ennuyée sévère dès lors que Bouysse faisait parler ces protagonistes. Edmond parle de manière imagée, sous forme de poème. Le tout est très ponctué mais sans respiration. Le père tourne inlassablement autour de sa culpabilité, ça en devient pénible. La mère de Rose donne un peu de relief mais apparaît trop peu.


Tout cela n’enlève rien à la profondeur du roman ni d’ailleurs à la qualité de l’écriture de Bouysse. Si le dialogue intérieur d’Edmond est présenté en tirets c’est que l’auteur avait ses raisons. Mais, moi lectrice, je n’en ai pas compris les raisons et je me suis ennuyée, j’ai été particulièrement dissipée par la moindre mouche tout au long de cette lecture. Il y a effectivement une atmosphère, un ton, un témoignage de femme, plusieurs visions. Mais c’est long, oppressant. On y trouve l’écho du My absolute darling de Gabriel Tallent mais de manière trop attendue pour être redoutée.


Ce que Bouysse parvient en revanche à faire avec autant de talent que Tallent (Uhuhu) c’est bien à diviser nettement les coups de coeur des coups de gueule. Qui sait, ça sera peut être votre coup de coeur.

Dadou-lit
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le 22 juil. 2019

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