Normal People
7.4
Normal People

livre de Sally Rooney (2018)

Le bandeau qui orne la couverture de Normal People et qui annonce un million d'exemplaires vendus peut servir de repoussoir à l'amateur de littérature exigeante (ou se croit tel). Qui plus est quand le livre est devenu matière à mini-série et que le premier roman de l'irlandaise Sally Rooney, Conversations entre amis, semblait, sans s'être donné la peine de le lire, du genre poids léger. Funeste erreur, mea maxima culpa, voici une auteure qui vous attrape par le col dès les premières lignes et ne vous lâche plus. Et d'abord, quel bonheur de lire un ouvrage qui ne cherche pas à imposer une construction tarabiscotée mais préfère progresser dans le temps, sur 4 ans, réservant les quelques flashbacks à l'intérieur même des différents chapitres, chacun séparé de plusieurs mois du précédent, entretenant un suspense constant. Le livre traite exclusivement des relations entre Connell et Marianne, lycéens puis étudiants, entre amitié, amour et rejet. Le livre est excitant parce qu'il exploite un thème universel, avec tous ses nombreux à-côtés, et riche d'une précision psychologique qui a quelque chose de presque effrayant. Les deux héros du livre sont loin d'être parfaits, soumis à un jeu social perpétuel et cruel pour lequel leurs armes ne sont guère affutées, les exposant à la dépression, voire à une dégradation de leur état mental. Marianne et Connell se sont trouvés mais ils se fuient sans arrêt, se frôlent, se touchent, s'éloignent, intimement convaincus qu'ils sont faits l'un pour l'autre mais pas assez mûrs ou trop peu sûrs d'eux-mêmes ou de l'autre pour avoir le courage de voir la réalité en face. Ce constant va-et-vient dessine une carte du tendre moderne et elle est infiniment complexe, rappelant, avec un éventail moins large, celle du formidable roman québecois La trajectoire des confettis. Par son style et par ses remarquables dialogues, Normal People fait aussi parfois penser à Philippe Djian, quand il est à son meilleur et nous déconcerte et nous séduit à la fois, par un côté direct et en même temps très travaillé et sophistiqué dans ses entrelacs. Un million d'exemplaires vendus, émois, émois, émois !

Cinephile-doux
8
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le 11 mars 2021

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Cinéphile doux

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