Voici l’un des ouvrages le plus PASSIONNANT qu’il m’ait été donné de lire !
Mais, avant toutes choses je voudrais mettre les pendules à l’heure.
Ici, il sera question de millions d’années… on ne se rend pas compte de ce que cela représente, dans l’échelle du temps, c’est énorme et c’est peu de chose ! Une excellente image est celle évoquée par le “calendrier cosmique” qui figure dans l’admirable ouvrage Sommes-nous seuls dans l’univers (de Jean Heidmann ; Nicolas Prantzos ; Hubert Reeves ; Alfred Vidal-Madjar) :
On se représente très bien ce qu’est une année : Alors imaginons que maintenant, nous soyons le 31 décembre à 24h00. Plaçons le Big-Bang originel (vieux de 13,8 milliards d’années) au 1er janvier de la même année, à 0h00 : Fin janvier se forme notre galaxie que nous nommons la voie lactée. Le 31 août c’est au tour de la terre et du soleil. Le 6 septembre apparaissent les plus vieux minéraux connus. Le 13 septembre c’est au tour de la vie biologique d’apparaitre avec les plus vieilles traces de vie connues. Puis dans la nuit du 25 au 26 décembre ce sont les mammifères et les dinosaures (ces derniers disparaissent le 30 décembre). Si Jésus a existé, il est né le 31 décembre à 23h59 et 56 s (il y a 4,6 secondes !). Quant aux premières pierres taillées dont il est question ici, vieilles de 3,3 millions d’années, il faut les situer au 31 décembre aux environs de 22 heures (38 minutes représentent 1 million d’années) ! Vertigineux, non ?


La lecture d’un roman est très instructive sur le comportement de nos contemporains, suivant l’imagination, le talent et l’inspiration de l’auteur. Mais un livre comme celui-ci permet d’appréhender l’humanité, dans son ensemble et dans sa diversité, au travers de nos ancêtres, grâce à la sagacité des archéologues et des progrès de la science. Et si leurs capacités à découvrir et interpréter les indices nous remplissent d’admiration, nous pouvons tout autant l’être pour ces humains que nous pensions si “primitifs”.
Avant d’aller chasser le renne, le bison ou le mammouth en compagnie de nos ancêtres, nous allons devoir chasser un certain nombre d’idées reçues qui hantent l’imagerie populaire. Et pour cela, laissons-nous guider par Nicolas Teyssandier, préhistorien, chercheur au CNRS, spécialiste des équipements en pierres taillées et de l’émergence d’Homo sapiens.
De même que la notion de temps nous joue des tours, lorsqu’on parle de premières migrations, de distances parcourues par les Homo erectus, puis les Homo sapiens qui quittent l’Afrique pour gagner l’Europe ou le fin-fond de l’Asie, on s’imagine un long exode de hordes hirsutes, vêtues de peaux de bêtes, dans le blizzard et la neige, parcourant les steppes à la recherche de nourriture et d’un lieu plus accueillant. La théorie (Out of Afrika) qui défend une origine africaine unique pour les Homo sapiens dans le monde, précise qu’« Il y a environ 150 000 ans des Homo sapiens sortis d’Afrique ont colonisé les autres continents, supplantant au fur et à mesure les populations d’hominidés qu’ils rencontraient. » Mais comme le rappelle l’auteur, il faut bien réaliser que cette migration s’est réalisée sur plus de 100 000 ans, soit plus de 4 000 générations. Et, si chaque génération se déplace de 50 km par rapport à la précédente, en 100 000 ans ils auraient parcouru 200 000 km ! Énorme, non ? Et pourtant, cela ne représente qu’un déplacement moyen de 5 km par an, de quoi changer régulièrement de lieu de chasse et de cueillette, au bout de 100 000 ans ils auraient fait cinq fois le tour de la terre ?! Non, ce qui est beaucoup plus extraordinaire c’est le peuplement de l’Australie par Homo sapiens, car l’île était vierge de présence humaine et a été colonisée il y a environ 60 000 ans… par voie maritime ! Avec des distances entre îles pouvant atteindre 100 km, c’est-à-dire qu’ils partaient à l’aventure sans savoir s’il y avait une terre devant eux…
Vous voulez savoir comment Néandertal ou Sapiens chassait ? S’ils enterraient leurs défunts ? Leurs rapports avec la mythologie, leurs Dieux, leur spiritualité ? Leur Art : peintures, sculptures ?... Lisez ces pages, chacune est une découverte, à la lumière des avancées scientifiques les plus récentes, comme l’hypothèse suivante sur la disparition de Néandertal :
Homo Sapiens et Néandertal ont vécus à la même époque, se sont croisés et parfois se sont mêlés. Notre ADN, aujourd’hui atteste la présence de 1 à 4 % de gènes néandertaliens. On a découvert, en Roumanie, des fossiles datés d’environ 38 000 ans d’un Homo sapiens dont le taux de gènes néandertalien avoisinait les 10 %, ce qui suppose que son ancêtre néandertalien vivait 4 à 6 générations avant lui ! Mais pourquoi les Néandertaliens se sont-ils éteints et ont cédés la place aux Homo sapiens ?
Leurs habitudes de vie étaient différentes, semble-t-il. Il apparait que « les Néandertaliens exploitent très majoritairement l’environnement minéral immédiat ou proche qu’ils occupent. Leur technologie, certes complexe sur le plan des connaissances et savoir-faire engagés, s’adapte au contexte local ou régional […] si la région n’offre que des roches de qualité médiocre sur le plan de leur aptitude à la taille, ils vont s’en contenter. » Et ainsi ils vivaient en petits groupes très ancrés régionalement, ayant peu de contact ou d’échange à longue distance. À l’inverse, Homo sapiens est beaucoup plus exigeant, au Paléolithique récent, et requiert des matériaux de bonne qualité que l’on ne trouve que sur certains gisements nécessitant de grands déplacements pouvant atteindre plusieurs centaines de kilomètres. Ainsi, « des outils quasi-finis ou prêts à l’emploi seront ainsi transportés, parfois sur des distances atteignant 300 à 400 km. Ces groupes de nomades vivaient au contact les uns des autres et dans certains cas, on peut envisager le fait que certains équipements étaient obtenus au gré d’échanges entre les groupes. […] D’autres indices vont dans ce sens, comme par exemple la circulation sur de très longues distances de coquillages marins […] transformés en parures corporelles. »
Et alors ?...
Alors, ce serait l’une des raisons de l’extinction de l’un et du développement de l’autre car lors des déplacements de Sapiens, ils ne faisaient pas qu’échanger des pierres ou des coquillages, à l’occasion des contacts avec d’autres groupes, ils avaient, avant l’heure, inventé les sites de rencontres et le mélange des gènes qui va avec !

Philou33
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le 2 juil. 2019

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