Je suis entrée dans le livre en terrain conquis, assez sûre de ce que j'allais y trouver. Et j'ai été complètement décontenancée par le style de Victor Hugo. Ne connaissant de lui que ses poèmes, rien ne m’avais préparée à cela. Victor Hugo mélange les genres avec brio.


Certains passages sont ironiques, voire de véritables farces. C'est le cas de la fête des fous où l'auteur se moque des protagonistes tout en jouant avec délice avec la langue. Certaines phrases sont assez piquantes et ironiques comme celle-ci à la fin du roman :


Phoebus de Chateaupers aussi fit une fin tragique, il se maria.


Mais il y a aussi du tragique car la fatalité, souvent citée, emprisonne les personnages. Ils se débattent contre elles sans pouvoir y échapper. Frollon en est le parfait exemple. C'est un personnage complexe et tiraillé entre ses croyances et ses désirs terrestres. Mais il est incapable de se dominer et reste le jouet de la fatalité. Victor Hugo s'interroge sur les destinées humaines à travers ses personnages.


L'auteur se permet beaucoup de digressions dans l'histoire. Les descriptions de Notre Dame et de Paris sont impressionnantes de précisions et de détails. C'est un travail documenté et proche d'un historien. Cela répond au goût de l'époque pour le roman historique et pour le Moyen Âge. Ce passage est aussi une manière d'affirmer ses convictions en faveur de la protection du patrimoine architectural, sujet sur lequel il s'est déjà exprimé dans des articles auparavant. Victor Hugo consacre aussi une partie à la réflexion autour du progrès. Il explique la révolution de l'imprimerie sur la société et les modes de pensée. Il montre l'importance des changements induit par le livre qui va jusqu'à "tuer" l’architecture, ancien mode principal d'expression.


Les personnages sont contrastés et personne n'est épargné. Esméralda, belle et sûre d'elle, devient mièvre et ridicule face à Phoebus. Ce dernier, sous ces apparences de fiancé parfait, aime jurer, boire et courir les filles. Même Quasimodo a sa part d'ombre et n'est pas seulement une victime. Victor Hugo montre les failles et les vices de ses personnages de manière assez crue. Il y a aussi Gringoire, le poète raté en quête de petits succès que nous retrouvons régulièrement dans le récit. mais le personnage le plus fascinant reste Frollon.


Le roman est aussi imprégné des combats politiques de Victor Hugo. On a déjà parlé de celui en faveur de la protection du patrimoine mais on trouve une dénonciation de la peine de mort et une réflexion sur le pouvoir.


Ce fut une lecture immersive et passionnante qui m'a permis de réellement connaitre cette grande histoire.

Anaïs_Alexandre
9

Créée

le 2 août 2017

Critique lue 221 fois

1 j'aime

3 commentaires

Critique lue 221 fois

1
3

D'autres avis sur Notre-Dame de Paris

Notre-Dame de Paris
Vincent-Ruozzi
9

Le temps des cathédrales

Lorsque l'on pense à Notre-Dame, au bossu ou à Esmeralda, l’œuvre qui nous vient bien souvent en premier à l'esprit n'est pas le livre de Victor Hugo, mais Le Bossu de Notre-Dame, long-métrage...

le 30 déc. 2017

47 j'aime

17

Notre-Dame de Paris
-Marc-
7

Mémoire de nos pères

Je suis resté sidéré pendant plus d'une heure hier, devant les images inconcevables de Notre Dame de Paris en feu. Je me suis demandé depuis pourquoi j'étais si touché par cet évènement. Ce n'est...

le 16 avr. 2019

32 j'aime

40

Notre-Dame de Paris
DjeeVanCleef
8

La maison de Marie

"...il y avait une grande flamme qui montait..." (Victor Hugo) Les Gilets Jaunes, quelle belle bande d’enculés ! Mais t’as vu ce qu’ils ont fait ? Non contents d’enfumer nos chers ronds-points avec...

le 16 avr. 2019

32 j'aime

15

Du même critique

Pastorale américaine
Anaïs_Alexandre
9

Critique de Pastorale américaine par Anaïs Alexandre

L'histoire nous est racontée par Nathan Zuckerman. Il s'agit d'un narrateur récurrent des romans de Philip Roth, un écrivain solitaire et observateur de ses condisciples. Celui-ci retrouve Seymour...

le 13 mai 2018

9 j'aime

1

Va et poste une sentinelle
Anaïs_Alexandre
10

"Je t'ai tuée, Scout. Il le fallait !"

Comme beaucoup je garde un souvenir impérissable de ma lecture de Ne tirer pas sur l'oiseau moqueur. Le personnage de Scout fait partie de ceux qui m'accompagnent encore et se rappelle à moi...

le 19 oct. 2015

7 j'aime

Steak Machine
Anaïs_Alexandre
9

"Les abattoirs créent des handicapés."

Geoffrey Le Guilcher est journaliste indépendant et s'est intéressé aux abattoirs suite aux vidéos publiées par l'association L214. Face à ces actes de maltraitance animal, il s'est demandé qui...

le 7 févr. 2017

6 j'aime