Face à l'ampleur de cette intégrale de Lovecraft (dont ceci n'est que le premier tome !) et comme je sais que je ne vais pas pouvoir m'empêcher de la décortiquer, je vous propose une présentation quelque peu originale: une critique au fur et à mesure de ma lecture ! D'une part, cela vous évitera de vous taper un pavé indigeste de plusieurs milliers de mots d'un seul coup, du moins si vous prenez le train en marche, et d'autre part cette façon de faire est plus motivante pour moi aussi. Alors commençons le voyage, si vous le voulez bien !


Ce premier tome de la collection "bouquins" de Laffont rassemble directement le coeur de l'oeuvre de l'écrivain de Providence: le Mythe de Cthulhu ! Sont donc présentées, de façon chronologique, les 19 nouvelles et le court roman qui s'intéressent aux Grands Anciens, au Necronomicon et à toute la mythologie indiciblehideuseabominable qui fit entrer Lovecraft dans la légende. La deuxième section nous propose une bonne partie des récits pondus par les auteurs contemporains et amis de Lovecraft ayant permis d'étoffer encore un peu plus l'univers malade qui nous passionne. La troisième partie, ensuite, dévoile les tous premiers récits inédits de Lovecraft dont le plus ancien fut rédigé à l'âge de 6 ans ! Enfin, l'ultime section présente une série d'articles d'H.P. basés de près ou de loin sur l'art de l'écriture.



1) Le Mythe de Cthulhu




Dagon (1917):



Une nouvelle un peu trop courte pour vraiment frapper l'esprit mais qui possède déjà toute la structure des oeuvres suivantes de Lovecraft: un homme à moitié fou se déclare perdu et fait le récit d'une découverte (bâtiment/livre/monstre, biffez la mention inutile) lui ayant apporté une révélation cosmique qu'il aurait préféré ignoré jusqu'à la Fin des Temps. Simple mais efficace.





Nyarlathotep (1920):



Très courte aussi, incroyablement foutraque et pourtant très originale. Elaborée davantage comme un poème en prose que comme une nouvelle, cette oeuvre ne suit pas un récit très cohérent et doit plutôt être considérée comme une vision eschatologique d'une noirceur totale. Fascinant.





La Cité sans Nom (1921):



Le héros de cette histoire se met en quête d'une civilisation disparue. Sa découverte ferait passer le Temple Maudit d'Indiana Jones pour une sympathique attraction de Disneyland (heu... ce qu'il est, d'ailleurs). Tout amateur d'aventures archéologiques sous LSD appréciera l'aventure comme il se doit. Dommage seulement que la conclusion soit moyennement crédible... Première mention d'Abdul Alhazred, le poète fou et des célèbre vers:


"N'est pas mort ce qui a jamais dort
Et au long des siècles peut mourir même la mort"





Le Molosse (1922):



Nouvelle à l'ambiance particulièrement macabre où des pilleurs de tombes sont hantés par des bruits et une présence lugubre après avoir dérobé un médaillon dans un antique cercueil en Hollande. Malheureusement, la créature dévoilée à la fin est un peu ridicule et laisse le lecteur dans une perplexité déçue. Première mention faite du Necronomicon, dont Alhazred, à présent décrit comme un démonologue, est bien tenu pour l'auteur.





Azathoth (1922):



J'ai beaucoup de mal à comprendre le lien de cette minuscule nouvelle avec le cycle de Cthulhu, et pour cause: il s'agit d'un fragment inachevé. Mais ce n'est pas grave: plus encore qu'avec "Nyarlathotep", Lovecraft nous livre un véritable poème en prose. D'une beauté stupéfiante, cette oeuvre nous permet de connaitre une facette étonnante de l'auteur de Providence, d'une grande sensibilité et d'une mélancolie extrême. Un joyau, assurément, qui interroge le lien de l'Homme moderne, désillusionné, avec le mystère insondable du cosmos.





Le Festival (1923):



Excellente nouvelle, particulièrement anxiogène ! Le descendant d'une très ancienne famille est convié dans une petite ville de pêcheurs, Kingsport, pour assister à une cérémonie qui a lieu une fois tous les 100 ans, aux alentours de Noël. Problème: à son arrivée, Kingsport est plongée dans l'obscurité et le silence. En outre, les rares personnes qu'il rencontre ne prononcent pas un mot et semblent porter des masques de cire imitant des visages humains... Lovecraft, en très grande forme, pose une ambiance suffocante qui plonge à chaque seconde davantage dans les ténèbres d'une ville qui a subi un curieux changement de réalité. Le mystère est passionnant et m' a littéralement hypnotisé par ses descriptions fantastiques et morbides. Vivement le prochain festival, dans 7 ans !!





Le descendant (1926):



Nouvelle frustration puisqu'il s'agit d'une histoire inachevée et que rien dans le recueil ne nous prévient de cet état de fait ! L'oeuvre est pourtant à découvrir puisqu'elle nous expose, avec une certaine poésie, la psychologie-type du héros lovecraftien, peut-être très proche de celle de l'auteur lui-même: en quête d'absolu dans un monde terne et sans saveur. Au-delà de cet aspect prométhéen, le thème du rêve prend beaucoup d'importance depuis la nouvelle "Azathoth", nous préparant sans doute au cycle de Randolph Carter. Enfin, l'un des deux personnages de la nouvelle pourrait bien être le héros de "La Cité sans Nom" et nous renseignerait dès lors sur le sort d'un héros de Lovecraft quand il ne se fait pas déchiqueter ou dévorer par quelque démon surgi des abîmes de la folie...





L'Appel de Cthulhu (1926):



Pièce maitresse de toute l'oeuvre de Lovecraft, cette nouvelle soutient l'ensemble de la mythologie de l'auteur de Providence en nous présentant enfin dans les détails le culte de Cthulhu. La menace, jusqu'ici insidieuse, devient cosmique et s'étend au monde entier, où des adeptes de tous horizons vénèrent le grand poulpe et ses petits copains dégueulasses appelés Grands Anciens. S'il est impossible de faire l'impasse sur cette nouvelle, il faut tout de même admettre qu'elle possède de nombreuses faiblesses. D'un style volontairement plus documentaire qu'à l'accoutumée, Lovecraft peine à maintenir l'attention sur de nombreuses pages dépourvues d'atmosphère ténébreuse et qui se contentent d'accumuler les faits. Quant à la fin, où le grand Cthulhu en personne fait une remarquable apparition, elle est expédiée si rapidement et de manière si artificielle que je n'arrive toujours pas à comprendre que si peu de lecteurs s'en retrouvent choqués ! Stylistiquement un peu aride donc, mais un grand moment de la littérature fantastique qui s'est définitivement implanté dans la culture moderne (télévision, musique, jeu vidéo,...).





L'étrange maison haute dans la brume (1926):



Un texte un peu différent de la production habituelle de Lovecraft. Tout d'abord, cette nouvelle n'est pas écrite à la première personne ! Loin d'être anodine, cette particularité offre un subtil changement de perspective puisqu'on ne sait pas du tout, pour une fois, ce qui va arriver au personnage (en effet, le premier paragraphe n'est pas un truc du style « Je suis perdu, mais j'écris rapidement ce témoignage pour que vous ne commettiez pas les mêmes erreurs que moi », effet de style habituel chez Howard). De plus, le fantastique qui est mis en branle ici est assez éloigné du macabre habituel et offre plutôt des lambeaux de rêves et de poésie douce-amère qui constituent une respiration intéressante dans le mythe de Cthulhu, même si la conclusion n'a pas la force évocatrice des plus grandes oeuvres du Maitre.





Histoire du Necronomicon (1927):



Soi-disant daté de 1936 selon cette intégrale, quelques petites recherches m'ont bien confirmé qu'il s'agissait d'un texte plus ancien, écrit par Lovecraft peu de temps après « L'appel de Cthulhu ». Alors conscient du mythe qu'il était en train d'élaborer, l'auteur eut l'idée de graver dans le marbre l'histoire de sa brillante invention littéraire, le Necronomicon, afin d'éviter de se contredire dans les prochaines oeuvres où il invoquerait les versets maudits d'Abdul Alahzred. Il s'agit donc d'un document de travail né au faite de sa carrière et destiné à son utilisation personnelle et non pas à une éventuelle publication. Si on ne peut être qu'alléché à l'idée de parfaire ses connaissances à la source, on doit malheureusement vite déchanter: en quelques paragraphes, Lovecraft n'a le temps que d’esquisser l'histoire millénaire de son livre maudit, et de réserver les innombrables anecdotes que l'on devine dans les oubliettes des fantasmes littéraires. Nous avons là un résumé purement fonctionnel, aussi important que frustrant. Cependant, l'érudition qui transpire de ce petit essai est telle qu'il n'est pas étonnant que le mélange entre réalité et fiction a pris, et continue de prendre, tant de lecteurs à ce facétieux piège.





La couleur tombée du ciel (1927):



Gros morceau que cette « couleur » abominable, immense réussite à lire à tout prix ! La montée progressive de l'horreur est équilibrée à la perfection entre descriptions évanescentes et comportements déments qui instillent un véritable malaise à la lecture. L'un des ingrédients de cette réussite tient en ce que les personnages principaux n'ont rien à voir avec ces héros lovecraftiens habituels, désabusés, las de la monotonie de la vie et qui courent à leur perte en réveillant des choses sinistres propres à les distraire quelque peu. Non, ici, c'est une pauvre famille de paysans, qui craint et respecte Dieu, qui se retrouve prisonnière d'un processus de dégradation psychique et physique proprement épouvantable. Sans aucune morale ou repère judéo-chrétien, le lecteur assiste à un dévoilement de perversion cosmique irrésistible et hypnotique. Le rythme, haletant, nous fait tourner les nombreuses pages sans effet de lassitude jusqu'à une conclusion parfaitement lucide sur la faiblesse du genre humain face aux forces occultes de l'univers.





L'affaire Charles Dexter Ward (1927):



Unique (court) roman de Lovecraft, manifestement plus à l'aise avec le format « nouvelle »: franchement, il y a du bon et du moins bon. Tout d’abord, les détails pleuvent sur le récit comme l'alcool dans une soirée universitaire: obsédé par la volonté de crédibiliser son intrigue, Lovecraft s'est de toute évidence particulièrement documenté, notamment pour la première partie qui se passe au XVIIIème siècle et nous présente le sombre personnage de Joseph Curwen. La deuxième partie, ensuite, se déroule au présent et nous raconte la manière dont le jeune Charles Ward, descendant de Curwen, s'y est pris pour découvrir les secrets de son ancêtre. Ici aussi, le lecteur est allègrement bombardé de détails qui ne nous cachent rien de cette très longue et minutieuse enquête. Enfin, la troisième partie est consacrée à... l'enquête, oui encore, du médecin de Ward qui cherche à découvrir la raison pour laquelle ce dernier semble avoir brusquement plongé dans la folie. Je ne spoile rien, cette information est dévoilée dès les premières lignes du roman, dans un effet de style désormais bien connu de l'auteur de Providence.


Tout ceci pour dire que la volonté de bien faire de Lovecraft est si évidente qu'elle en devient exagérée: le récit est régulièrement ralenti par une multiplication de précisions qui dévoilent certes toute l'érudition de l'auteur (comment ne pas être impressionné par sa description de Providence, sa propre ville transférée avec réalisme dans son univers romanesque ?) mais qui finissent par lasser par leur lourdeur et leur répétitivité le plus patient des lecteurs. Surtout que, suprême défaut de cette oeuvre, le suspens qu'on était en droit d'attendre d'un tel récit est désamorcé pratiquement dès le début ! En effet, une citation dévoilant la clé de tout le mystère figure en en-tête du roman et répond directement à toutes les questions posées dans le prologue (et qui peuvent se résumer par « Mais pourquoi Charles est-il devenu fou ? »). Et si jamais on n'avait pas encore compris à ce moment, la citation revient dans le texte un peu plus tard d'une façon qui ne laisse plus aucun doute quant au noeud de l'intrigue. Pcchh, le ballon de l'horreur se dégonfle ! Dès lors, la tentative de Lovecraft de disséminer d'autres indices extrêmement peu subtils environ à chaque paragraphe devient aussi tragique que vaine. Pire, elle finira par énerver à peu près n'importe quel lecteur qui dispose forcément de dix coups d'avance sur le médecin enquêteur, pauvre hère plein de bonne volonté et d'intelligence qui ne comprend pourtant le fin mot de l'histoire qu'après avoir été presque noyé sous les évidences. Vraiment insupportable !


Malgré toutes ces maladresses, « L'Affaire Charles Dexter Ward » a quelque chose de fascinant qui ne s'explique pas. Une espèce de cohérence innommable avec le reste de l'oeuvre de Lovecraft, un parfum miasmatique aussi écœurant qu'hypnotique et une vague terreur, quelque chose qui ne se situe pas mais qui habite ce texte, habillant ses mots d'une aura capiteuse qui nous donne envie de retourner encore et encore dans cet univers plein de macabres promesses. C'est la magie de Lovecraft, inhérente même à ses travaux qu'il jugeait les moins réussis (peu satisfait de cette histoire, il ne fit effectivement pas beaucoup d'efforts pour la faire publier de son vivant ): faire partie d'un tout cosmique qui nous dévore, tels les esprits vampiriques des nuits de démence des premières heures de l'humanité.





L'abomination de Dunwich (1928):



Où l'on explore davantage, bien qu'elle reste très mystérieuse, l'identité du Grand Ancien Yog-Sothoth, apparu à l'origine dans "L'Affaire Charles Dexter Ward" en tant que possible maitre des sorciers. Pour la première fois depuis ma lecture de cette intégrale, j'ai eu une franche impression de redite en constatant les ficelles utilisées par Lovecraft. Cette nouvelle se présente quasiment comme un mix de "La couleur tombée du ciel" (une menace inconnue plane sur une maison de paysans...), en moins réussi, et de certains éléments de "Dexter Ward" (sorcellerie, la menace pour le monde, la formule magique bien pratique...). Bien que l'histoire reste intéressante, j'ai vraiment déploré le style un peu faiblard de l'ensemble, sans véritable envolées d'adjectifs ni d'éléments de tension palpable. Aucune facette de l'intrigue ne surprendra les habitués de Lovecraft, bien que le déroulement se suive plaisamment et qu'on se retrouve tout de même face à de la bonne came fantastique.





Celui qui chuchotait dans les ténèbres (1930):



Une des plus grandes réussites de Lovecraft, à mon humble avis ! Tous les ingrédients habituels répondent présent mais poussés à leur plus haut degré d'accomplissement: l'homme curieux qui découvre des secrets interdits, l'échange épistolaire où le funeste témoin plonge lentement vers la folie, un folklore réel revu à travers le prisme du Mythe de Cthulhu, des créatures jamais vues si ce n'est via des traces, des sons, des indices malsains... et une fin géniale, peut-être la meilleure de Lovecraft, qui réalise enfin pleinement l'union entre les terreurs cosmiques et une science-fiction terrifiante, nauséeuse, d'une imagination proprement stupéfiante ! Un sentiment de malaise et de fascination mêlés m'a rapidement envahi pour ne plus me lâcher jusqu'à la fin. Une nouvelle littéralement dévorée, ce qui ne ressemble pourtant pas à ma façon de lire habituelle (j'aime prendre mon temps pour m'imprégner et analyser le style). Même si l'on peut en partie deviner comment tout cela va se terminer et pester contre l'aveuglement du personnage principal face à l'évidence, le cheminement est si bien construit, l'ambiance si parfaitement glauque et nos attentes finales si subtilement déviées qu'on ne peut en ressortir que vidés, manipulés par la verve horrifique du plus grand auteur de fantastique de tous les temps.





Les Montagnes hallucinées (1931):



Nouvelle fondamentale dans la mythologie de Lovecraft... et malheureusement d'une lourdeur presque rédhibitoire. Comme c'était déjà le cas avec "L'Appel de Cthulhu", l'écrivain se révèle incapable de concilier une structure informationnelle avec un véritable plaisir de lecture. Si, en plus, je vous informe que la nouvelle est presque aussi longue que "L'Affaire Charles Dexter Ward" et que c'est bien dommage, puisque Howard ne maitrise guère le format long, vous comprendrez aisément qu'on se retrouve face à un texte délicat: vous ne pouvez pas faire l'impasse dessus... mais vous risquez les affres d'un ennui abyssal. Indispensable à la lecture parce que le Mythe de Cthulhu fait un énoooorme bond en avant: cette fois, les protagonistes de l'histoire découvrent carrément qui sont les Anciens et toutes les créatures dégueulasses qui hantaient les nouvelles précédentes (et auxquelles il est fait de subtiles allusions, surtout à "Celui qui chuchotait dans les Ténèbres"). Mais cette passionnante explication historique se fait... via le déchiffrement de kilomètres de gravures par deux scientifiques héros de l'histoire. En effet, en pleine exploration du continent Antarctique, des universitaires d'Arkham ont découvert une cité datant de plusieurs millions d'années et dans laquelle se trouvent les secrets de nos origines... et de nos créateurs, peut-être bien toujours dans les environs.


Quel dommage qu'une idée de départ aussi excellente s'enlise dans une description d'une méticulosité telle qu'elle en devient pratiquement illisible ! Plus maniaque qu'un Tolkien en manque de pipe, Lovecraft fait littéralement exploser son impressionnante érudition pour nous proposer un récit que l'on jurerait parfois être un véritable document d'exploration. La somme des détails est ébouriffante et étonnante (comment l'auteur pouvait-il en savoir autant sur la manière de mener des expéditions scientifiques en Antarctique dans les années 30 ??) mais ce qui aurait du démultiplier l'immersion finit au contraire par faire sortir le lecteur de la narration. Quelques excellentes pages sont noyées dans des kilomètres de stagnation descriptive plus efficace qu'un bon somnifère.


Lire cette histoire une fois est une obligation, ne serait-ce que pour assister à la véritable naissance du conte d'épouvante matérialiste qui parvient à nous faire douter: Lovecraft a-t-il bien écrit du fantastique ou bien était-ce un genre de science -fiction depuis le début ? Un mélange des genres qui tient du génie. Relire "Les Montagnes hallucinées", par contre, est de la pure folie. Regardez plutôt une énieme fois "The Thing" de John Carpenter qui en est une brillante adapation, avec un sens de la narration autrement plus maitrisé.





Le cauchemar d'Innsmouth (1931):



Une très bonne exploration de ville maudite. J'adore ça, les cités obscures, vieillottes, perdues au milieu de nulle part avec des habitants un poil dégénérés qui semblent cacher une antique dévotion aux ténèbres. Miam ! De plus, la plume de tonton Howard ne tombe pas dans ses vilains travers de « L'Affaire Charles Dexter Ward » ou des «  Montagnes hallucinées »: pas de descriptions kilométriques qui vampirisent la narration mais un bel équilibre entre le passé d'Innsmouth conté de manière vivante par des personnages pour le moins loquaces et une action étonnamment intense. Après avoir installé une ambiance particulièrement délétère, Lovecraft surprend en effet avec une traque menée de main de maitre, digne des meilleurs thrillers horrifiques. Alors, n'hésitez plus: venez vous perdre dans les petites ruelles suffocantes, admirer le Récif du Diable et les églises dédiées au Culte de Dagon avant de venir trouver un repos, peut-être éternel, dans le charmant hôtel Gilman... Hahahahahaha !





La maison de la sorcière (1932):



Alors là, je ne comprends pas: cette nouvelle serait considérée par les spécialistes de Lovecraft comme une de ses plus mauvaises. C'est une blague ? Elle est géniale ! D'abord, elle n'est pas écrite à la première personne comme la majorité des œuvres de Howard, ce que j'ai vécu comme une bouffé d'air frais. Ensuite, et surtout, elle a l'incroyable originalité de mélanger les mathématiques à l'occultisme ! Oui, vous avez bien lu... Le héros n'est pas un archéologue ou un amateur de vieilleries ésotériques mais un étudiant passionné de physique quantique et d'équations riemanniennes, ce qui l'amène à s'intéresser à une sorcière du XVIIè siècle reconnue pour avoir possédé un savoir géométrique qui dépasse les connaissances scientifiques actuelles... Outre le fait de complètement moderniser le mythe de la sorcière et de la maison hantée en même temps, Lovecraft se paie le luxe de mélanger à nouveau science-fiction et horreur psycho-cosmique de la plus belle des manières. C'est effectivement l'occasion pour l'auteur de Providence de nous offrir de superbes descriptions de voyages interdimensionnels; un véritable défi à l'imagination ! Bourrée de références au mythe de Cthulhu (c'est une nouvelle de fin de carrière) et dotée d'une ambiance écrasante, cette histoire est placée assez haut dans mon panthéon fantastique malgré mon léger agacement à l'endroit du scepticisme typique du héros lovecraftien, souvent à côté de la plaque quant à l'origine des bizarreries qu'il doit affronter alors même que les preuves surnaturelles pleuvent sur lui par dizaines...





Le monstre sur le seuil (1933):



Un pur et simple auto-plagiat de « l'Affaire Charles Dexter Ward », en toutefois plus concentré, ce qui nous épargne les interminables litanies descriptives du roman. J'appellerais ça de la charité chrétienne si l'expression n'était pas une insulte indicible lorsque l'on parle de Lovecraft. Rappelons que ce dernier, insatisfait de « Dexter Ward », avait renoncé à le publier. Il n'y avait donc pas de honte à reprendre grosso-modo la structure de ce dernier pour proposer quelques années plus tard une nouvelle plus intense et globalement mieux équilibrée. Le personnage d'Edward Derby est assez intéressant - comme tous les personnages avec lesquels Lovecraft partage sa psychologie, la seule qu'il semble capable de comprendre vraiment- mais hélas relativement mal exploité pendant une grande partie de l'histoire...


Il est aussi amusant de constater l'incapacité totale de l'auteur à parler des femmes: soit il s'agit de "monstres", soit il n'a strictement rien à en dire. Ainsi, bien que marié et père d'un enfant, Daniel Upton est presque totalement décrit comme... un célibataire ! Charmant ! Enfin, mention spéciale à la première phrase de la nouvelle, percutante, ainsi qu'à la conclusion, vraiment bien vue et délicieusement dégueulasse ! Sans s'élever au niveau des meilleures œuvres de l'écrivain, le résultat est cependant tout à fait honorable et il y a un réel plaisir de voir les références au mythe de Cthulhu se multiplier, même si aucune nouveauté ne vient enrichir ce dernier. Le fameux (fameuse ?) Shub-Niggurath, le Bouc (la Chèvre ?) aux mille chevreaux reste toujours aussi évanescent(e) depuis sa première apparition dans "l'Abomination de Dunwich". Mais est-ce un mal, après tout... ?





Dans l'abîme du Temps (1935):



Nouvelle tardive dans l’œuvre de Lovecraft, « Dans l'abîme du temps » ne se prive pas de distiller quantités de clins d’œil au Mythe, pour le plus grand plaisir du connaisseur. Cette fois, nous faisons connaissance avec la Grand Race, peut-être bien les entités les plus « bienveillantes » de tout l'univers de H.P. Affamées de découvertes, ces dernières explorent l'Espace et le Temps afin de mettre à jour une gigantesque bibliothèque ayant pour but de sauvegarder la totalité des connaissances universelles. Clairement pas des petites bites...


Seul souci, ces étranges voyages temporels réclament de procéder à un changement corporel auquel va pouvoir goûter le valeureux héros bodybuildé de cette histoire (en fait un énième rat de bibliothèque tout maigrichon comme les affectionne Lovecraft...) Cette première partie est à mon sens la plus intéressante puisqu'elle nous permet de découvrir petit à petit tout une civilisation préhistorique comme si on y était ! On rencontre même la Grand Race au temps de sa splendeur, ensemble d'entités coniques aussi moches que fascinantes. Les descriptions sont saisissantes et l'imagination de l'auteur sait varier les plaisirs en nous parlant de splendeur, d'ordre, d'intelligence et de végétation tropicale. On en aurait voulu plus ! Hélas, la deuxième partie, est un peu plus morne...


On revient effectivement à une exploration archéologique qui est pour moi le point faible du style lovecraftien depuis « Les Montagnes hallucinées », c'est à dire qu'on se retrouve face à un rapport aussi réalistement décrit qu’assommant. Les descriptions couvrent des pages entières, bardées de détails qui finissent par desservir l'atmosphère de terreur que l'on est en droit d'attendre, au point de faire oublier au lecteur la menace pourtant toujours toute proche. A mille lieue des descriptions de temples des récits d'Howard (auteur de Conan), flamboyantes et excitantes, l'exploration australienne de « l'abîme du temps » retombe à plat et offre une conclusion qui fait beaucoup de bruit pour pas grand chose... Reste toutefois une excellente première partie qui nourrira bien davantage l'imagination du lecteur amoureux de cauchemars alambiqués.





Celui qui hantait les ténèbres (1935):



La dernière nouvelle du Cycle de Cthulhu est l'occasion de (re)découvrir une facette très sympathique de Lovecraft, trop souvent passée sous silence. Ami et « conseiller » littéraire du jeune écrivain Robert Bloch (celui qui a écrit « Psychose »), qu'il a guidé durant de longues années notamment en réécrivant gratuitement certains passages de ses textes, Lovecraft a accepté d'apparaitre en tant que victime dans l'une des oeuvres de son jeune ami. Pince-sans-rire, l'homme de Providence lui renvoie la politesse avec « Celui qui hantait les ténèbres », où un certain Robert Blake va en prendre plein la gueule grâce à une émanation de Nyarlathotep, le « chaos rampant ». Ha c'est sûr, il est taquin Lolo...


Le résultat de cette plaisanterie partagée est un texte vachement bien pensé, où l'une des pires crevures des Grands Anciens vient titiller de pauvres humains dans un cadre extrêmement banal... et donc d'autant plus flippant lorsque la couche de normalité s'effrite. Ce glissement s'opère sur Providence, la ville de résidence de Lovecraft. On sent le malin plaisir que l'auteur prend à pervertir son cadre de vie, à rendre malade l'intime tout en injectant une certaine dose de poésie. Jamais le laid n'avait paru si beau, si nostalgique depuis Poe. Le déchainement final du surnaturel en devient presque superflu. La véritable victime finale n'est pas seulement le pauvre Robert... mais la ville elle-même. Toutes nos villes.




Conclusion Partie I



Le mythe de Cthulhu est sans conteste un grand moment de littérature. Lovecraft invente une mythologie de l'indicible qui, par définition, est-elle même en partie vague et nébuleuse. Quelle est la vraie nature des Grands Anciens ? Par quel coup du sort ont-ils été emprisonnés ? Quelle est la véritable hiérarchie qui les caractérise ? Si les continuateurs du mythe ont apporté des réponses à ces questions, l'auteur originel a volontairement laissé des gouffres d'ombre nécessaires pour gratter indéfiniment la conscience du lecteur.


Loin d'être un pur artifice littéraire, cette mythologie supporte une véritable vision philosophique sur la place occupée par l'Homme dans l'Univers. Le penchant pessimiste d'une conception lucide des forces qui gouvernent au-delà de toute compréhension. Si le fond est donc toujours à la hauteur, la forme se veut parfois aride (et pas seulement à cause de la traduction), scorie inévitable de la volonté de rationaliser la peur en empruntant beaucoup au vocabulaire et à l'objectivité scientifiques. Paradoxalement, cette rationalisation se mélange allègrement à de purs passages de rêves et de folie qui, à mon sens, sonnent indéniablement plus vrais et touchent bien plus profondément mon âme. On ne se refait pas...



2) Légendes du Mythe de Cthulhu



Voyons à présent les pastiches des amis et autres continuateurs de Lovecraft. De très nombreux écrivains n'ont en effet pas résisté à la tentation d'agrandir le Mythe, avec plus ou moins de succes...





Les Mangeuses d'Espace, par Frank Belknap Long (1928)



Cette collection de pastiches commence très fort avec ce véritable bijou auquel je ne m'attendais pas ! Il faut dire que si Frank B. Long est à peu près un inconnu de nos jours, il fut pourtant un ami intime de la famille de Lovecraft et, surtout, le PREMIER auteur à reprendre le « Mythe de Cthulhu » pour l'agrandir. Et c'est avec cette illustre nouvelle que le mouvement fut amorcé.


Dérangeante, superbement écrite et tout simplement fascinante, « Les Mangeuses d'espace » n'est pourtant pas dépourvue d'incohérences si on s'en tient à la stricte logique narrative. Mais on s'en fout, ici, bordel ! Respectueux de son héritage, Long parvient malgré tout à s'en détacher juste assez pour apporter son propre point de vue sur le Mythe, ce que nombre de continuateurs ne parviendront pas à faire. Jamais la description d'un bras, par exemple, n'avait été aussi glauque avant cette nouvelle ! Je préfère ne rien dévoiler de plus pour ne pas vous gâcher la surprise, mais je vous garantis qu'on ne s'ennuie pas une seconde, l'histoire ne s'encombrant pas d'un long démarrage comme Lovecraft les affectionnait parfois. Malgré la conclusion, un poil décevante, l'ambiance est délicieusement délétère de bout en bout et l'on ressort de cette lecture avec la véritable impression d'avoir traversé un cauchemar... jusque dans les quelques incohérences qui participent étrangement à cette sensation de malaise !





Les Chiens de Tindalos, par Frank Belknap Long (1929)



Retour direct de mon ami Frank, qui nous livre comme par hasard une nouvelle pièce épique ! Changement de style, c'est à l'exploration onirique d'une dimension mathématique à laquelle nous sommes conviés. Digne héritier de l'excellent « La Maison de la Sorcière » de Lovecraft, « Les Chiens de Tindalos » est plus condensé, voire même très court, mais à nouveau particulièrement riche en sensations fortes. La conclusion est, cette fois, à la hauteur de ce qui précède et les nouvelles créatures proposées par Long ont une place de choix dans le panthéon de Lovecraft (ce dernier les mentionna d'ailleurs dans « Celui qui chuchotait dans les Ténèbres »). Une histoire qui vous fera craindre les angles de vos murs...





Talion, par Clark Ashton Smith (1931)



Poète, peintre, sculpteur et romancier, Smith est un nom reconnu dans le domaine du fantastique américain, injustement méconnu chez nous. Je dois l'avouer, j'attendais depuis longtemps l'occasion de pouvoir lire son oeuvre littéraire. Cette première approche ne m'a que d'autant plus déçu.


C'est une histoire à la Lovecraft basique pour l'ambiance. L'horreur dévoilée est un peu grossière, en plus d'être prévisible. Smith se lance dans une histoire de sorcier qui ne décolle jamais, malgré le rôle joué par le Necronomicon. Sans ce dernier, on aurait même pu se demander ce que cette nouvelle faisait ici.





La Pierre Noire, par Robert E. Howard (1931)



Autre auteur dont j'attendais impatiemment les pastiches, pour m'être régalé de ses histoires de Conan le Cimmérien, immense succès du pulp Weird Tales dans lequel officiait aussi Lovecraft. Les histoires de Conan n'hésitent d'ailleurs pas à lorgner de temps à autres vers les délires cosmiques de l'auteur de Providence, avec beaucoup de talent qui plus est. Si vous n'avez pas encore fait connaissance avec le barbare, je vous invite chaleureusement à vous procurer ses bouquins... Croyez-moi, ça n'a pas grand chose à voir avec les versions cinéma !


De fait, « La Pierre Noire » s'en sort largement mieux que « Talion », sans pour autant atteindre les cimes de Frank Long. L'histoire est dans la droite lignée de ce que propose Lovecraft, mais en un peu plus direct, plus violent. On suit l'enquête littéraire d'un passionné d'occultisme qui va assister à un horrible rituel dans un trou perdu en Hongrie. Le début est très documenté, comme le ferait Lovecraft, sans être lourd ou confus ce qui, je dois bien l'avouer, m'a fait découvrir une nouvelle facette d'Howard. Ce dernier excelle à installer assez rapidement une ambiance lourde et crédible qui culmine dans une scène qui propose quelque chose qui n'appartient qu'à lui, quelque chose de... barbare, au point d'en être malsain. Une lecture que je ne regrette pas !





La Chose ailée sur le toit, par Robert E. Howard (1932)



Je ne serai pas aussi laudatif avec cette très courte nouvelle, d'une écrasante banalité. Un type va profaner un tombeau et va se faire tirer les oreilles pour cet acte impie. Voilà, c'est à peu près tout. Sur le même schéma, « Le Molosse » de Lovecraft instillait une ambiance paranoïaque véritablement stressante. Rien de tout cela ici, malheureusement. Le récit préfère courir vers sa conclusion sans offrir le moindre intérêt à son lecteur.





L'Héritier des Ténèbres, par Clark Ashton Smith (1932)



Comme tout le monde lui dit qu'il est brillant, tonton Lolo en premier lieu, Smith s'est surement décidé à faire mieux que son moyen « Talion » en commençant cette sombre histoire. Mouais, c'est pas encore ça !


Comme on comprend dès les premières pages la nature de la menace, on ne fait qu'attendre tout au long du récit que celle-ci éclate enfin. Et quand ça arrive, et bien on ne peut pas dire que ce soit bien impressionnant. Bon d'accord, je me suis méchamment endurci à présent, et il en faut beaucoup pour effrayer mon imposante virilité (qu'est-ce que je raconte pas comme conneries quand j'écris à 01H00 du matin quand même) mais là, je crois que même ma grand-mère pourrait lire cette histoire avant d'aller se coucher sans avoir la moindre difficulté à s'endormir. Un peu comme pour la « Chose ailée », en fait. Du pastiche sans grand génie, même si ça se laisse lire... M'aurait-on menti sur Smith ?





Le Feu d'Asshurbanipal, par Robert E. Howard (1936)



De l'originalité bienvenue ! On sort ici complètement du schéma lovecraftien habituel pour quelque chose de typiquement howardien. Pour tout vous dire, j'avais parfois presque l'impression de lire une nouvelle de Conan. Récit d'aventures à l'ancienne (à la Indiana Jones, si vous préférez), les héros de ce « Feu d'Asshurbanipal » ont de grosses burnes et comptent bien nous les montrer ! C'est pourquoi, lorsque, mourant de soif dans le désert et traqués par des berbères sanguinaires, ils découvrent la cité maudite qu'ils étaient partis chercher, nos deux lascars décident qu'ils n'ont strictement plus rien à perdre... C'est sympa comme tout, avec une fin qu'on voit venir à des kilomètres mais qui propose la dose d'horreur qu'on est en droit d'attendre dans cette collection de pastiches. C'est malheureusement le dernier de Howard qui se suicida d'une balle dans la tête la même année...





Ubbo-Sathla, par Clark Ashton Smith (1933)



Hé ben voilà, quand il le veut vraiment, il y a arrive, Smith ! Ubbo-Sathla est une très bonne nouvelle, rêveuse, mystique même, dans la veine de ce que faisait tonton Lolo au début de sa carrière (« Azathot », particulièrement). Remonter le cours du temps pour retrouver la sagesse des origines est une très mauvaise idée qui sera ironiquement récompensée...





Le Visiteur venu des étoiles, par Robert Bloch (1935)



Voilà la fameuse nouvelle où Bloch (auteur de « Psychose » entre autres) tua Lovecraft qui, pour se venger, tua Bloch dans « Celui qui hantait  les ténèbres ». Tout cela dans un esprit de taquinerie, bien entendu. Au-delà de ce petit jeu littéraire amusant, la nouvelle est assez insignifiante. Son seul intérêt (en fait, c'est un mini-spoil mais bon, vous perdez pas grand chose) est vraiment de lire la mise à mort assez sadique de Lovecraft. Qu'est-ce que je me suis bidonné en lisant cette scène ! Le reste, hé bien... curiosité, livre maudit, invocation, bla-bla-bla...





Epouvante à Salem, par Henry Kuttner (1937)



Un autre écrivain que je ne connaissais absolument pas. Malheureusement, on n'aura pas la même agréable surprise qu'avec Long. Cette nouvelle est un peu faiblarde. Le personnage principal est en quelque sorte victime d'une maison hantée et fait partie de ces héros d'horreur un peu horripilants qui préfèrent continuer à s'enfoncer plutôt que de fuir. Lovecraft a très souvent utilisé cette ficelle mais elle est ici exploitée sans réel génie. La menace est trop banale pour installer une réelle ambiance. Il n'y a que le fait que le héros est écrivain, et la façon dont c'est utilisé dans l'histoire, que j'ai trouvé un peu rafraichissant (comme dans la nouvelle précédente, d'ailleurs). Le reste est trop vite torché pour rester dans les mémoires.





Au-delà du seuil, par August Derleth (1941)



Aïe ! Derleth... J'en avais entendu des persiflages sur ce pauvre homme ! Il est celui sans qui Lovecraft serait aujourd'hui tombé dans l'oubli le plus total, puisqu'il s'est évertué à le publier après sa mort. Pour cela, les fans le portent aux nues. Mais il est aussi celui qui a voulu hiérarchiser le mythe de Cthulhu – pire ! il a voulu lui donner une cohérence imaginée de toute pièce en faisant des Anciens des êtres maléfiques qui veulent du mal aux Hommes, là où Lovecraft faisait souvent comprendre que Cthulhu et ses copains ne sont ni bons ni mauvais mais plutôt des forces aveugles et indifférentes au sort des humains. Et pour ça, les fans détestent Derleth.


Seulement, autant être franc, rien de tout ceci ne ressort dans la nouvelle qui nous occupe. Agréable, quoique peut-être trop respectueux de son héritage, « Au-delà du seuil » hurle à chaque instant qu'il se veut la continuité du maitre de Providence, qu'il cite aussi implicitement qu'explicitement. Ca alourdit parfois le tout, mais le boulot est fait correctement. On passe un moment de perplexité agréable dans une énième maison en proie à des forces étrangères, mais il y a cette fois un vrai mystère qui retient l'attention du lecteur. Je m'attendais franchement à pire.





L'Habitant de l'Ombre, par August Derleth (1944)



Du coup, je vais presque avoir honte d'avouer que j'ai carrément apprécié cette seconde nouvelle de Derleth. On est encore totalement dans l'hommage, voire dans la repompe, mais c'est tout simplement bien fait. Si ce n'est le choix du vocabulaire, moins pléthorique que celui du créateur de Cthulhu, on pourrait facilement croire qu'on lit quelque chose écrit de la main même de Lovecraft ! Deux personnages affrontent une menace qui ressemble assez fortement à celle de « Au-delà du seuil » qui, du coup, passe pour un simple brouillon. L'ambiance est ici excellente et la tension monte crescendo comme il se doit. J'ai eu mon attention accaparée du début à la fin, jusqu'à l'apparition d'une créature particulièrement appréciée par les fans de Lovecraft. Je préfère vous laisser la surprise, cette très bonne histoire le mérite amplement !



L'ombre du clocher, par Robert Bloch (1950)



Conclusion du jeu littéraire entre Bloch et Lovecraft, cette nouvelle fait aussi office d’hommage posthume du premier au second. "L'ombre du clocher" est la suite directe de "Celui qui hantait les ténèbres", dernière contribution de Lovecraft à son Mythe de Cthulhu. Bloch met donc en scène un personnage qui enquête sur sa propre mort (celle de Bloch, ici renommé Blake) et je dois dire que l'auteur se débrouille vraiment très bien cette fois. Les années ont passé, Lovecraft commence à devenir une légende et on sent l'envie sincère de Bloch de redonner un nouveau souffle à ce fascinant univers littéraire.


L'enquête se suit avec plaisir, sans noyer le lecteur sous des tonnes de descriptions et la conclusion met intelligemment en scène un grand personnage du Mythe (mais est-ce vraiment lui... ?). On sent véritablement la menace cosmique franchir un nouveau pas et devenir plus moderne, peut-être même plus subtile. De quoi donner de l'inspiration pour les futurs continuateurs, parfois un peu trop sclérosés par leur héritage...



Manuscrit trouvé dans une maison abandonnée, par Robert Bloch (1951)



Bloch est décidément en très grande forme puisqu'il nous livre l'un des meilleurs pastiches de ce recueil ! Fait rare, le héros est un enfant. Peut-être qu'il s'exprime un peu trop bien pour son âge mais ça ne l'empêche pas d'être très vite attachant, au point où je me suis sentis concerné par son sort. La forêt "hantée"qui entoure la maison de notre jeune ami est délicieusement flippante, grâce à une ambiance paranoïaque admirablement décrite. La nouvelle sait être spectaculaire en restant toujours assez psychologique pour déranger le lecteur. Un excellent travail qui conclut brillamment les participations de Bloch dans le recueil !



On rôde dans le cimetière, par J. Vernon Shea (1969)



Atmosphère de film de série B pour cette nouvelle qui traite justement de ce genre de cinéma. Harrod, le "héros", n'hésite pas à se servir d'un cimetière manifestement possédé par une présence indescriptible pour assouvir sa passion de films d'horreur. Le cimetière est traité comme un personnage à part entière et la relation entre ce dernier et Harrod est intrigante et assez originale. La fin m'a semblé par contre un peu trop explicite et le comportement d'Harrod réussit à devenir agaçant à force d'idioties. Le vent d'originalité est toutefois le bienvenu, avec l'entrée définitive du Mythe dans la modernité.



Sueurs froides, par J. Ramsey Campbell (1969)



Je suppose que cette histoire se voulait un hommage à la littérature d'horreur et à ses représentants les plus excessifs. L'idée est intéressante mais un peu gâchée par un personnage principal particulièrement antipathique sans que cela ne soit par ailleurs justifié (parce qu'il aime les histoires d'horreur ? Bonjour le cliché...). Ha oui, précisons aussi qu'il passe la plupart du temps d'action de la nouvelle à faire des balades trépidantes dans les rues enneigées de sa ville... On voit assez rapidement où l'auteur veut en venir mais, avant d'y arriver justement, on trouve le temps un peu long. La librairie maudite aurait tout de même pu être mieux exploitée même si les derniers paragraphes sont assez sympathiques.



La Cité soeur, par Brian Lumley (1969)



Un jeune homme enquête sur la mort de ses parents et va découvrir qui, ou ce qu'il est vraiment... Pas vraiment d'ambiance horrifique dans ces pages, sans pour autant que ça en soit vraiment ennuyeux. Il y a quelque chose d'old school assez agréable. L'auteur s'attache à son modèle sans jamais parvenir à trouver l'essence du maitre. Un travail agréable mais très vite oublié faute d'un quelconque moment marquant, si ce n'est la description fragmentaire du mode de vie d'une race qui présente une certaine particularité: pour une fois, ce n'est pas elle qui est hostile à l'Homme, c'est l'Homme qui risque de la détruire sans même s'en rendre compte...



Le Rempart de béton, par Brian Lumley (1969)



Très moyen. Si vous cherchez une quelconque originalité, passez votre chemin. Un jeune gars rend visite à son oncle devenu fou après que l'une de ses fouilles archéologiques a mal tourné... Une quasi copie carbone d'Au delà du Seuil de Derleth. Des thèmes tellement rabâchés qu'il n'y a plus une goutte de jus pour émoustiller le lecteur de cette intégrale. Sinon, évidemment, le style est propre et pas désagréable à suivre et un fan de tonton Lolo peut quand même passer un bon petit moment – à condition d'être très résistant à la répétitivité et d'accepter le fait de connaitre la fin de l'histoire dès la première page. L'ennemi présenté est quand même sympathique (c'est l'ancêtre du film Tremors !) et sauve la nouvelle de l'oubli total...



Ceux des Profondeurs, par James Wade (1969)



Ca fait quand même du bien de revenir à un auteur qui a les cojones de s'éloigner assez drastiquement de la sacro-sainte formule des pastiches ! Cette nouvelle n'est pas foncièrement extraordinaire, mais elle est tellement différente de tout ce qu'on a lu avant qu'elle marque quand même un peu l'esprit du lecteur – le mien en tout cas. Ici l'ennemi est... le dauphin ! Le cadre scientifique océanographique crédible mêlé de culture hippie semble s'inspirer du célèbre psychonaute John Lilly. Malheureusement, point de voyage indicible sous LSD (mais ça ouvre de superbes perspectives pour qui penserait à unir Lovecraft et drogues enthéogènes) mais des personnages plus travaillés qu'à l'accoutumée, une atmosphère dépaysante et de subtils rappels du Mythe qui s'insèrent très bien dans le tout. Rien d'extraordinaire, je le répète, mais je pense que la nouvelle vaut le coup d'oeil et me donne envie de m'intéresser à l'oeuvre de l'écrivain, également compositeur et journaliste.



Le retour des Lloigors, par Colin Wilson (1969)



Nous terminons (enfin !) cette longue suite de pastiches par un gros morceau. Je n'ai pas toujours été convaincu par les tentatives de Lovecraft de transformer certaines de ses histoires en enquêtes. A mon humble avis, c'est dans ces moments-là que l'auteur de providence révélait son écriture la plus lourde et maladroite. Wilson n'a pas ce problème. Sa prose est d'une redoutable efficacité et l'on tourne les nombreuses pages avec plaisir. La menace, tentaculaire, tient en haleine et sait ménager de vrais moments d'intensité et de malaise. Enfin, le héros est agréable et l'idée de mêler le célèbre manuscrit de Voynich aux affres du Necronomicon est bien vu – Lovecraft lui-même n'hésitait jamais à mêler inventions littéraires et ouvrages réels. Une façon idéale de terminer cette très longue rétrospective de pastiches !



Conclusion Partie II



Bien sûr, les hommages à Lovecraft ne sont pas arrêtés en 1969 ! Des tas d'auteurs ont poursuivi, avec plus ou moins de bonheur, l'expansion du Mythe, tels Stephen King et Alan Moore pour ne pas les citer. Cette édition intégrale a tout de même le mérite de proposer un très vaste choix de pastiches, dont certains qui n'avaient jamais été traduits en français auparavant.


Le choix des auteurs a beau être hétéroclite, je ne peux pourtant m'empêcher de remarquer à quel point il semble difficile pour eux de trouver leur propre voix au sein du Mythe. Beaucoup de ficelles de Lovecraft sont utilisées et réutilisées jusqu'à plus soif, exposant de manière embarrassante ses faiblesses d'écrivain. D'un autre côté, certaines nouvelles parviennent vraiment à proposer d'autres points de vue et à enrichir la mythologie de Lovecraft. Lire ce genre de pastiches est ainsi à double tranchant: ils peuvent nous lasser de ce genre d'histoires comme ils peuvent éveiller un nouvel intérêt pour des possibilités narratives jusqu'ici dissimulées. Les quelques nouvelles dont j'ai chanté les louanges dans mes critiques font indéniablement partie de cette seconde catégorie et sont à lire si vous vous sentez dans votre élément avec le matériau de base. La plupart des autres, moins indispensables, pourront vous faire passer de bons petits moments glauques à défaut de rester gravés dans votre mémoire...



3) Premiers contes



La partie la plus succincte de cet énorme recueil - à peine trente pages perdues dans 1200 feuillets ! - et aussi la moins essentielle, excepté pour les acharnés qui voudront découvrir Lovecraft avant Lovecraft. Cinq récits de jeunesse donc... D'enfance, devrais-je plutôt dire ! La plus ancienne, La petite Bouteille de verre, fut écrite à l'âge de 6 ans ! Le vocabulaire me semble déjà étonnamment riche pour un bout de chou de cet âge. Signe précurseur du génie ou générosité de la traduction ? Impossible à dire, bien sûr, sans l'original... L'histoire à proprement parler, elle, n'a évidemment aucun intérêt.


Le Mystère du Cimetière fut écrit deux ou trois ans plus tard et est découpé en plusieurs minuscules chapitres. Le scénario, bien que sommaire, est déjà un peu plus élaboré.


Passons rapidement Le Vaisseau mystérieux, vraiment trop anecdotique, pour nous arrêter aux deux nouvelles plus tardives. La Bête de la Caverne, écrite à l'âge de 15 ans, se pare d'un style bien plus maitrisé. L'ambiance claustrophobe est bien restituée et l'on sent déjà poindre les atmosphères futures du maitre. Le thème n'est pas en reste, une histoire d'humanité dégénérescente qui suit bien le credo de l'auteur. La plus belle réussite de jeunesse, selon moi.


Enfin, L'Alchimiste signe le passage à l'âge adulte de Lolo. La plupart de ses ficelles sont déjà présentes (elles l'étaient déjà dans La Bête de la Caverne) mais l'histoire de vengeance à travers les générations n'est pas des plus palpitantes et la fin est clairement ratée ("Hahaha ! Je suis le grand méchant et ma révélation finale avait été devinée par tous les lecteurs depuis plusieurs pages ! Mais pas par le héros abruti... Tremblez maintenant !")


De véritables documents d'archive, qui réjouiront les plus passionnés, mais dont la moitié est difficilement lisible... On ne pouvait cependant en faire l'impasse dans une intégrale. Howard a écrit d'autres nouvelles dans sa prime jeunesse mais les a détruites, les jugeant trop mauvaises pour passer à la postérité. Sur ce coup, je lui fais entièrement confiance...



4) L'art d'écrire selon Lovecraft



Beaucoup plus intéressants sont ces documents pratiquement introuvables dans d'autres recueils: des articles de Lovecraft pour divers magazines et des notes personnelles pour son taf d'écrivain.


En marge des Mythes de Cthulhu nous propose du matériel de travail pour sa fantastique nouvelle Le Cauchemar d'Innsmouth, comprenant entres autres une première version du début de l'histoire. Je trouve toujours intéressant de se plonger au coeur du processus créatif, même si cette lecture pourra sembler un peu indigeste pour certains. On a aussi droit à des notes très sibyllines pour Dans l'abîme du Temps et à une lettre de Lovecraft qui doit détromper l'un de ses lecteurs sur l'authenticité du Necronomicon. Vraiment savoureux !


Suit Le Livre de Raison, le plus intriguant des "bonus" de cette section. Howard y explique d'abord comment il s'y prend pour la construction d'une histoire fantastique. Nul besoin d'être soi-même écrivain pour apprécier ces quelques lignes. Après ça, on entre directement dans le cerveau de l'auteur par le biais d'idées inspiratrices, de morceaux de cauchemars, de choses lues, etc, que Lovecraft couchait sur papier dans ses cahiers afin de pouvoir y revenir puiser de l'inspiration à l'envi. Encore une fois, la lecture pourra paraitre un peu monotone. Mais je trouve que l'effort en vaut la peine pour tenter de saisir quelques purs fragments de créativité, parfois réellement utilisés pour bâtir quelques célèbres nouvelles. Voici un extrait de ce à quoi ressemble la lecture de ces "aphorismes de l'horreur", comme je les appelle:


" Une maison et un jardin - anciens - associations. La scène prend un aspect étrange.
Un bruit hideux dans l'obscurité.
Un pont et des eaux noires limoneuses. Fungi - Le Canal.
Morts qui marchent - apparemment vivants, mais...
Des portes qu'on trouve mystérieusement ouvertes ou fermées, etc.- Provoque la terreur.
"


On termine notre voyage avec les articles. Vous êtes toujours éveillés ? Alors on y va...


Quelques commentaires sur la fiction interplanétaire est un papier de 1935 écrit pour The Californian. Lovecraft y expose, contre toute attente, le dégoût qu'il ressent pour la plupart des récifs de pulps de science-fiction ! Il y dénonce les clichés, le manque de vraisemblance, scénaristique et scientifique, les personnages au courage absurde, etc. Mais il ne se limite pas à faire son grincheux: il donne tout un tas de conseils pour rendre à ces histoires merveilleuses la cohérence qu'elles méritent. Un exemple particulièrement brillant: il lui semble peu probable que les extraterrestres rencontrés sur d'autres planètes ressemblent tant physiquement que socialement aux êtres humains et invite en conséquence les auteurs à recréer de toutes pièces des contextes nouveaux... Une ode au souci du détail qui caractérise les plus grands écrivains de littérature de genre, à l'instar d'un certain J.R.R. Tolkien...


Quelques origines du Royaume des fées, ensuite, est un essai de 1932 sur les trois provenances supposées des créatures féeriques modernes (lutins, farfadets, fées...). Lovecraft relaie une hypothèse de l'époque qui voulait que nos ancêtres aryens aient combattu... des peuples de nains autochtones. Difficile de ne pas sourire face à cette vision archaïque de l'Histoire, mais Lovecraft montre tout de même une érudition et un sérieux plutôt impressionnant. C'est ainsi, par exemple, que j'ai appris l'existence des erdställe, d'étranges grottes dont même les archéologues d'aujourd'hui ne se préoccupent guère...


Lord Dunsany et son oeuvre est une petite biographie écrite en 1922. Lovecraft profite donc de cette tribune pour rendre hommage à celui dont les contes mythologiques ont largement contribué à la naissance du mythe de Cthullhu. Plus intéressant encore, l'auteur de Providence glisse dans la seconde partie de son article son credo philosophique: le nihilisme consiste à rejeter toutes les anciennes valeurs qui se retrouvent spoliées de leur sens par le matérialisme scientifique... Mais le nihilisme ultime consiste à rejeter même ce nihilisme et donc à revenir vers ces valeurs de beauté, tout en sachant qu'elles sont dépourvues de sens, pour la simple jouissance des plaisirs qu'elles procurent... D'un point de vue littéraire, Lovecraft prône donc un retour lucide vers la geste mythologique, à l'instar de Dunsany, ou encore de son propre Mythe.


On passe rapidement sur les lettres envoyées aux rédacteurs de The All-Story Weekly et de Weird Tales (bien qu'elles soient intéressantes et nous en apprennent davantage sur l'exigence littéraire de Lovecraft) ainsi que sur la courte critique positive de Ebène, livre de son ami Clark Ashton Smith, pour s'attarder sur L'épidémie du vers libre. Il s'agit d'une diatribe écrite en 1918 pour Le Conservative dont la verve moqueuse est rapidement identifiable. En effet, Lolo ne supporte pas les pseudo-nihilistes dont je parlais plus haut et qui renient toute règle poétique au profit de la pure expression personnelle. Soudain, Howard s'emporte et écrit: "... une horde bigarrée de rhapsodes hystériques et à demi fous dont le principe fondamental est de décrire leurs humeurs du moment et leurs expériences de psychopathes en phrases informes et dénuées de sens, telles qu'elles leur viennent à l'esprit ou au stylo durant leur crise d'inspiration (ou d'épilepsie)." Inutile de dire que je n'ai jamais autant ri en lisant une critique littéraire !


Après un Ce qui doit se dire en vers fort didactique, Howard fait la nouvelle démonstration de son immense savoir en brossant un tableau impressionnant de La Littérature de Rome. Son savoir en la matière n'est pas très éloigné d'un véritable spécialiste et donnera des idées de lectures à certains.


Sur les Traces de Poe est un hommage de 1934 pour son idole littéraire publiée dans The Californian. Hélas, le résultat est très décevant et particulièrement pénible à lire puisqu'il se contente de décrire la totalité des nombreuses habitations du poète... Un essai dont on se serait volontiers passé lorsque l'on sait que les articles de Lovecraft étaient trop nombreux pour tous figurer dans cette intégrale !


Toujours dans l'hommage, Howard frôle la déclaration d'amour avec Winifred Virginia Jackson: une poétesse différente. Bien qu'inconnue, Lovecraft l'élève à des sommets de délicatesse insoupçonnée. Une véritable étrangeté qui n'a pas frappé que moi puisqu'on prête une romance passagère aux deux écrivains, ce qui vient encore écorner un peu plus l'image austère habituelle que l'on se fait de Lovecraft, et c'est tant mieux !


In Memoriam : Henry St. Clair Whitehead et Robert Ervin Howard: 1906-1936 sont des nécrologies de deux auteur de Weird Tales. Si le premier m'est inconnu, le second a une forte résonance puisqu'il n'est autre que le créateur, entre autres, des excellents récits de Conan le Cimmérien (que je vous invite à lire si ce n'est déjà fait... ha, il semblerait que je me répète).


Enfin, cette interminable critique se termine pourtant sur Suggestions pour un guide du Lecteur. Je n'ai rien à en dire de plus qui ne figure déjà dans cette liste qui connait un joli succès: http://www.senscritique.com/liste/Suggestions_de_lecture_par_H_P_Lovecraft/142296 Au vu des excellents goûts littéraires de Lovecraft, rien de plus normal !



Conclusion Générale



Il n'y a pas à tortiller du cul: si vous êtes un fan de Lovecraft, il vous faut ce recueil. Le rapport qualité/prix est imbattable avec 1230 pages proposées à 30 euros. Vous constituer l'intégrale de Lovecraft avec les livres de poche sera bien plus onéreux et prise de tête, de nombreux doublons étant impossible à éviter. Sans parler de tout le matériel inédit que vous ne retrouverez nulle part ailleurs... Si par contre vous découvrez seulement l'auteur de Providence, tentez plutôt votre chance avec un ou deux livres de poche susmentionnés, histoire de ne pas être déçu. Effectivement, malgré tout le bien que l'on peut en penser, les récits de Lovecraft peuvent paraitre assez répétitifs à certains lecteurs et vous vous retrouveriez avec une somme de récits, de pastiches et d'articles un peu embarrassante.


Le seul point négatif que j'aurai à soulever serait la traduction, inchangée depuis des décennies et qui contient son lot d'approximations et même d'erreurs. Heureusement, rien de bien frappant ici, le style un brin archaïque servant plutôt bien les histoires ténébreuses de Lovecraft. Pour les lecteurs intéressés par un rafraichissement salvateur, je ne peux trop conseiller de jeter un oeil sur la nouvelle traduction de David Camus, mais c'est une autre histoire...


Merci d'avoir tout lu (on peut toujours rêver) et à bientôt pour un deuxième tome qui me bouffera une nouvelle année de ma vie...

Créée

le 31 mars 2013

Modifiée

le 30 janv. 2014

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Amrit

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