Ce court roman est assez sympa, et on peut comprendre qu'il ait ainsi gagné le prix Goncourt des lycéens. Il s'agit en effet d'un roman sur la vie d'un gamin franco-burundien, qui raconte ses petites aventures dans la rue de Bujumbura où il habite avec son père français.(sa mère d'origine rwandaise sera un personnage crucial sur la fin.) C'est une enfance assez douce, et très protégée que vit le jeune Gaby, mais hélas nous sommes en 1993, quand commence à bouillir dans son pays, comme au Rwanda voisin, l'horrible marmite du génocide...
Je ne suis pas sûr que "Petit pays" soit complètement à la hauteur de son propos. Alors que le livre commence par une intro qui montre l'intrusion de l'ethnicité dans les débats des enfants, Gael Faye va rapidement abandonner cette menace pour nous décrire en détail le quotidien de Gaby. C'est plaisant ce petit récit, mais c'est aussi un peu plat. On sent frémir l'Histoire aux franges du récit mais de manière très subtile et pendant les trois quarts du livre, le récit ronronne un peu.
C'est dans le dernier tiers que la violence du monde des adultes fait son entrée avec ses coups d'état, ses milices, ses jeux dangereux , etc... Curieusement le livre reste là aussi un peu en marge, les enfants étant protégés par la frontière d'une part, et par leur double nationalité (et donc aussi leur métissage) d'autre part. Une horreur sans nom se déchaîne soudain dans le pays voisin, dont on apprendra des bribes insensées par le récit de la mère des enfants, une histoire tout bonnement atroce, que le narrateur lui-même peine à entendre. On demandera au jeune Gaby de finalement "choisir son camp" (ignoble exigence de toute guerre civile)...
J'ai donc trouvé ce récit un peu déséquilibré entre la longue exposition d'une nostalgie et la courte catastrophe qui anéantit cette enfance.On sent que le livre hésite entre roman de jeunesse (l'auteur nous parle de "l'enfant et la rivière" de Bosco, nul doute une inspiration) et témoignage (et là Faye nous cite "Le journal d'Anne Franck, bien entendu...). Difficile de ne pas sortir navré / choqué de ce petit livre qui expose assez clairement la stupidité de la nature humaine. On regrettera sans doute que l'auteur n'ait pas plus franchement fictionalisé ou au contraire documenté son propos sur le conflit ethnique. Mais il en ressort certes le pouvoir effrayant de l'Absurdité.
SI je ne suis pas convaincu par ce livre au point de le recommander, il m' a donné envie (si c'est le bon mot...) de lire enfin le fameux "Une saison de machettes" de Jean Hatzfeld, qui traîne sur mes étagères...