Phèdre
7.4
Phèdre

livre de Platon (-370)

« Quel discours serait plus terrible que celui-là ? »

À première lecture, le Phèdre est, pour rester poli, obscur. Le dialogue semble boursouflé – le mythe d'Orythie ? des cigales ? toutes ces métaphores grivoises ? – et complètement incohérent : mais de quoi parle-t-il ?


Et pourtant : le Phèdre est une construction d'une finesse extrême et, bâti suivant un plan précis, progresse le long d'une logique implacable. Rien n'est superflu, tout est nécessaire, et en particulier Phèdre lui-même, cette cruciale potiche.


S'il apparaît scindé en deux parties distinctes, il constitue pourtant un tout indissociable : sans les discours introductifs, la seconde partie serait bien vide, puisque Socrate, contre le discours de Lysias et son propre premier discours, mensonger et stupide, met en scène son idéal de parole, répondant à deux exigences fondamentales. D'une part, une construction organique, partant du tout, le divisant jusqu'à ne plus pouvoir le faire, définir ces espèces et les étudier ; d'autre part, le nécessaire objectif de la recherche du vrai – si les sophistes ont raison dans leur connaissance de l'âme et dans leur codification de la parole discursive, ils ont tort de ne voir dans la parole qu'un jeu ou, pire, un levier efficace sur les foules.
C'est, bien au-delà des déductions sur le statut de la parole, toute une éthique du philosophe qui apparaît : hors des préoccupations sociales et matérielles – l'amoureux fou, les cigales – et pourtant profondément plongé dedans – Socrate est un homme de la cité – ; le philosophe est fou, condamné à l'incompréhension, mais cela ne le concerne pas, parce que ses préoccupations sont supérieures.


Le Phèdre est une œuvre en tous points remarquable.

Penro
10
Écrit par

Créée

le 12 avr. 2013

Critique lue 876 fois

10 j'aime

Penro

Écrit par

Critique lue 876 fois

10

D'autres avis sur Phèdre

Phèdre
Moizi
4

Vive l'illettrisme !

J'avais tenté de lire la République l'an dernier ou il y a deux ans, je ne sais plus et j'ai dû lire un tiers avant de commencer un autre bouquin et de le laisser, comme je le fais souvent, en...

le 3 déc. 2014

7 j'aime

11

Phèdre
Aphimorv
5

j'ai tout essayé rien n'y fait !

C'est bien vrai que 7 c'est la note qu'on met quand on sait pas trop quoi mettre mais qu'on a plutôt aimé. J'ai lu le Phèdre parce que j'aide à organiser une rencontre entre un prof de philo et un...

le 8 janv. 2013

6 j'aime

Du même critique

Hypérion
Penro
9

Critique de Hypérion par Penro

Ce sont sept pèlerins qui ne se connaissent ni d'Ève, ni d'Adam, nés sur des planètes différentes, issus de cultures diverses, rassemblés sur Hypérion, la planète des Confins, au milieu d'un conflit...

le 4 févr. 2011

24 j'aime

4

Phèdre
Penro
10

« Quel discours serait plus terrible que celui-là ? »

À première lecture, le Phèdre est, pour rester poli, obscur. Le dialogue semble boursouflé – le mythe d'Orythie ? des cigales ? toutes ces métaphores grivoises ? – et complètement incohérent : mais...

le 12 avr. 2013

10 j'aime

L'Héritage
Penro
4

Et pourtant, ça aurait pu marcher...

Dans la mesure où il s'agit de l'élément final d'une série de romans dont la qualité pourra raisonnablement être remise en question, L'Héritage surprend : ça aurait pu être pire encore. Je...

le 1 nov. 2012

9 j'aime

2