les mots à la bouche
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Il m'a fallu regarder les églises romanes, écouter les chants grégoriens et lire l'Illiade, les tragédies d'Eschyle et celle de Sophocle pour pouvoir distinguer, de mon œil furieux et érémitique, cette marque, à présent évidente, d'un état de sainteté. Phèdre de Jean Racine fait partie de la seule œuvre de la littérature française qui puisse être mise à côté des grands chefs-d'oeuvre grecs.
Il m'a aussi fallu lire Hugo, Nerval, Musset pour comprendre que notre écrivain du Port Royal doit être tenu à l'écart de tout ce qu'on appelle "littérature" au sens que nous l'entendons aujourd'hui.
Une œuvre parfaitement belle que l'inspiration produit de manière pure et sainte, voilà comment je pourrais discerner Phèdre des autres écrits de nos contemporains français. Hormis pour les esthètes fringués de martingale, ce qui est beau ne suffit pas pour faire une œuvre géniale car le génie de la France réside que dans ce qui est pur, et seul les êtres purs peuvent faire des œuvres pures.
Phèdre est une tragédie du silence, une tragédie du regard, une tragédie où les mots, magnifiques et si bien arrangés soient-ils, se muent de manière pudique. Il arrive à Phèdre d'avoir une insurrection de clartés dans les profondeurs par-dessous les ondes, moirées d'oubli, d'un recueillement inaccessible, pour finalement mieux choir dans les bas-fond vertigineux de l'obscurité, comme un infidèle gallican qui ouvre les vétustes portes de sa chapelle pour s'adonner à l'autoclave irrévérencieux monde moderne !
Le bonheur, chers lecteurs, est fait pour les bestiaux, Racine le pure l'a bien compris ; Phèdre a renoncé depuis longtemps, mais, à défaut de bonheur, elle voudrait, au moins, la paix, cette inaccessible paix, que les anges de Noël ont, pourtant, annoncée sur terre. Hélas, il est plus facile de condamner que de comprendre.
Vint le 19ème siècle, époque où tous les poètes furent plus ou moins gens de lettres souillant honteusement la Poésie. Bien que nous eûmes des fulgurances, notre siècle est autant plus renfermé dans cette vision de la littérature schismatique et il n'est pas la peine de souligner que l'ergastule des pénitentiaires de l'Université aggrave, sur ces gens là, cette vision d'une littérature comme réceptacle de sentiments et non comme une offrande sainte que l'auteur assiège sur l'autel de l'absolu.
En clair, Phèdre de Racine est une véritable belle poésie. Celle qui dispose des vers où réside le désire d'égaler par l'arrangement des mots la beauté pure et divine, quelque chose qui habite de l'autre côté du ciel. C'est ce que Platon appelle "le lieu supra-céleste" dans l'ouvrage, comportant le même nom que celui de notre auteur français, Phèdre. Mais pour parvenir à discerner la belle poésie, le bien (sans vouloir faire tomber ma critique dans un manichéisme), il faut y voir en soi un absolu infini afin d'être cette âme prédestinée à boire à flots la beauté absolument pure à tout égards du monde. Celle qui est dans toute chose.
Phèdre de Jean Racine montre, dans une large mesure, l'horizon de tout cela.
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le 19 août 2019
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