Il y a une presque éternité que cet ami me rassurait sur ce quai de gare en m’affirmant qu’il était normal que je ne parvienne pas à déterminer pourquoi telle poésie me plaisait et telle autre m’indifférait. Il me disait que la poésie était comme de la musique ; qu’il était compliqué de dire pourquoi un son nous procurait des sentiments et un autre non.
Je suis encore convaincue par cette réflexion. Pourtant, elle a ses limites. Quand je lis Anna Akhmatova, le son est rêche à mon oreille. Cependant, je peux affirmer que j’aime cette poésie.
Elle me donne l’impression de revivre des instants de vie. Elle m’émeut par cette manière de dire tout et son contraire ; comme un échantillon d’humanité.
De toute manière, il y a bien quelque chose de plus dans la poésie d’akhmatova pour avoir réussi à s’exporter au delà de la langue russe : le traducteur explique lui même que le rythme de sa poésie est intraduisible.



Il me semble que la personne qui m’a offert ce livre a pris le soin de m’indiquer la raison de ma future appréciation. Elle m’a écrit : que ce recueil t’accompagne comme il m’accompagne et que ces poèmes toujours te rappellent que personne n’a le droit de « tuer ton oiseau blanc ».
Si de la bouche de Paul Eluard s’envole des colombes, l’oiseau blanc d’Anna Akhmatova est un cygne ; peut être pour Tchaikovsky, pour cette Russie auquel elle est restée fidèle toute sa vie et dont elle affirme : « laver le sang de ses mains, arracher de son cœur la honte noire, couvrir d’un nom nouveau la douleur des défaites et des offenses ».
Je crois que le cygne blanc de sa poésie veut nous rappeler la beauté des choses. Il est en chacun de nous pour nous émerveiller des arbres et des fleurs, des insomnies qui n’appartiennent qu’à nos nuits et des sentiments que nous décidons de vivre.
Ainsi, même si l’oiseau blanc d’Anna Akhmatova n’est pas une colombe, il est tout de même liberté.



« Je n’aimais guère la voix des hommes,
Mais je comprenais celle du vent,
J’aimais la bardane et l’ortie,
Et plus que tout le saule d’argent.
En reconnaissance il a vécu
Avec moi toujours, ses branches en pleurs
Semaient des rêves sur mes insomnies »

Jojolapino
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le 7 août 2020

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Jojolapino

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