« Riders of the Purple Sage » est un roman de western écrit par Zane Grey – apparemment considéré comme l’un des plus éminents auteurs du genre – publié en 1912.


À la frontière sud de l’Utah s’érige le petit village de Cottonwoods où vit une petite communauté de Mormons. Les maisons où résident les habitants, les terres où ils travaillent et l’eau ambrée de la source qui permet la vie dans ce petit coin aride de l’Amérique appartiennent à Jane Withersteen, riche héritière qui vit seule dans le plus grand ranch de la région.


Célibataire et approchant les trente ans, Jane Withersteen est mal vue par les autorités religieuses – masculines, bien entendu – de sa communauté, qui considèrent que son devoir lui commande de devenir l’épouse (ou l’une des épouses) d’un Mormon. Son immense générosité pour tous, y compris les plus pauvres, et son amitié pour les Gentils, assimilés à des vagabonds et des parasites par les Mormons, lui est également particulièrement reprochée.


Ces tensions atteignent un point d’orgue le jour où le prélat Tull rend une visite à demeure Withersteen avec ses hommes de main, dans le but d’expulser Bern Venters, un Gentil travaillant comme cow-boy pour Jane Withersteen, hors de Cottonwoods et de l’Utah. L’empoignade menace de se transformer en lynchage lorsque Venters refuse net d’obéir à l’injonction de Tull. Au moment critique survient Lassiter, un cavalier mystérieux, tout de noir vêtu, dont la seule mention du nom suffit à faire fuir Tull et ses voyous.


L’histoire est centrée sur quatre personnages que l’on suit par groupes de deux. À la différence de nombre de westerns, « Riders of the Purple Sage » s’attache plus à développer en détail ses protagonistes, leurs caractères, leurs motivations et leur évolution, qu’à proposer de l’action et des gunfights incessants. Chacun des personnages principaux possède une personnalité unique et un rôle vital dans l’aventure contée.


Ecrit en 1912, le roman critique de façon très frontale les coutumes de la communauté religieuse Mormone, ciblant en particulier la polygamie qui y avait cours. Si, en théorie, celle-ci avait été rendue illégale dès 1862, la pratique avait continué de manière sporadique jusqu’à la fin des années 1890. Il s’agit donc, à l’époque où le livre est publié, d’un phénomène encore récent.
L’arc consacré à la religion Mormone met en scène Jane Withersteen, Tull et Lassiter. La première, dévote et profondément attachée à la mémoire de son père, pionnier Mormon et fondateur du village, est tiraillée entre son désir de liberté, sa volonté sincère de faire le bien autour d’elle – ce qu’elle estime être l’enjeu premier de sa foi – et son devoir d’obéissances aux autorités de son église. Sa foi sera ébranlée par les épreuves subies. Tull incarne l’antagoniste principal, sorte de mal auquel il est impossible d’échapper et qu’il faudra affronter. Lassiter, quant à lui, est un antihéros, meurtrier qui ne s’en cache pas mais paradoxalement bon et généreux. Le culte Mormon, largement égratigné par Lassiter et les actions entièrement néfastes de Tull et de l’évêque, n’est racheté qu’en partie par Jane.


Si la critique religieuse est importante, elle ne dépasse jamais les enjeux du livre et ne se fait pas aux dépends de l’histoire. Il s’agit aussi d’une grande aventure dans le plus pur style du western, avec de grandes étendues de champs de sauge pourpre à perte de vue, des canyons de roche ocre, de vallées vertes et argentées… Un nom pour chaque chose : des chevaux de Jane Withersteen, ses étalons arabes noirs et ses alezans puissants à chacune des vallées secrètes découvertes par Bern Venters. C’est là que réside le talent immense de Zane Grey : ses descriptions sont vivantes, vibrantes de couleurs magnifiques, font voyager et rêver parmi les paysages fantastiques de l’Utah… (Pour ceux qui ne connaissent pas encore, je vous invite à Googler des lieux tels Bryce Canyon, Arches National Park, Antelope Canyon… et vous verrez à quoi cela ressemble).


« Riders of the Purple Sage » constitue un fabuleux voyage dans l’ouest américain de la fin du XIXe siècle, avec ses grandes étendues et ses personnages, tous hauts en couleur. L’équilibre est parfait entre l’aventure, l’exploration, les quelques échauffourées, particulièrement nerveuses, et les discussions entre les différents protagonistes. S’inscrivant dans la lignée des grandes histoires de western portées à l’écran, le roman de Zane Grey compose un récit puissant et passionnant de bout en bout : un vrai chef d’œuvre.

Aramis
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le 23 août 2017

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