Tracey et moi
Je n'ai pas lu L'amie prodigieuse d' Elena Ferrante auquel on compare volontiers cet opus mais dès sa sortie Sourires de loup m' emporta par la virtuosité et l' énergie mises par Zadie Smith. Je la...
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le 27 mai 2020
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Je n'ai pas lu L'amie prodigieuse d' Elena Ferrante auquel on compare volontiers cet opus mais dès sa sortie Sourires de loup m' emporta par la virtuosité et l' énergie mises par Zadie Smith.
Je la retrouve ici en partie seulement; tant le roman est divisé en deux pans que l'auteur a tenté de mêler pour donner plus de liant et réarranger l' histoire à la sauce de sa narratrice.
L'enfance de ces deux gamines liées par la danse est raconté avec cette jubilation qui vous donne des ailes, c'était vraiment swing time dans cette banlieue pauvre de Londres, avant que l' âge adulte chargé de son fardeau en désillusions ne fasse redescendre sur terre la narratrice qui de l'ombre de Tracey devint celle d' Aimee. Cette fatalité ne m' a sauté aux yeux que tardivement, comme la façon similaire dont les deux liens se "défont". Et puis au milieu il y a cette zone grise où la gamine devenu adolescente perd son innocence.
L'ironie de Zadie qui était sa marque de fabrique est ici portée pour la première fois, c'est risqué, par la narratrice elle-même.
Cela produit un effet puissant d'auto-analyse presque destructeur, pour mieux renaître après le roman ?
Le récit est sans concession sur ce qui anime les personnages et leur influence ou non sur les autres. Ce subtil décalage entre ce que nous croyons, notre subjectivité et celle des autres. Il surligne les illusions que se fabriquent les personnages pour mieux les déchirer à coup de phrases taillées en biseau. Là où des auteurs lèvent subtilement le voile, Smith ne fait pas dans la dentelle pour aller chercher avec les dents s'il le faut le petit bout de viande pour mettre l'os à nu. Pas facile quand c'est sur soi-même que l'on pratique....Cela peut rendre désagréable la lecture ou produire un effet déceptif sur le lecteur. Elle nous renvoie à nous-mêmes au final, que nous le voulions ou non. Il y a du Madame Bovary chez la narratrice qui pleine d' attentes a laissé échapper les opportunités à cause de la haute idée qu 'elle se faisait de la Vie mais pas d'elle-même...
L'accouchement ne se fait pas sans mal, la narratrice renâcle à livrer ses blessures, de ce que l'on garde pour soi tant on a peur du jugement. "Maintenant on sait qui tu es vraiment", comme si les réseaux sociaux pouvaient délivrer cette vérité si complexe et souvent si obscure aux principaux intéressés eux-mêmes.
Tracey incarne cette inépuisable capacité à mentir pour ne pas perdre la face, et en miroir la narratrice celle de se mentir à soi-même, incapacité à grandir exacerbée dans la société des années 80, où nous étions les Rois, nous les enfants de la cassette et du vhs et ceux de Dorothée, "allo allo monsieur l'ordinateur, Goldorak..."
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le 27 mai 2020
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