Pour une fois je m’attendais à un bon livre prix Goncourt car par plusieurs critiques lues du dernier livre de Jean-Paul Dubois j’avais été alerté de la qualité potentielle, notamment sur le site de Pierre Assouline, ou des critiques connexes comme le critique gastronomique Gilles Pudlowski qui était très enthousiaste. Je l’achète le jour même du fameux déjeuner chez Drouant et le commence quelques jours après. Assez vite j’ai pris peur même si je garde très souvent une lueur d’espoir jusqu’à la fin, les dix dernières pages pouvant, certes rarement, sauver un livre.


Donc me voici à contre-courant lui attribuant une note de 4 alors qu’il est au moment de l’écriture sur le site à une moyenne assez exceptionnelle de 7,4. Je ne mets pas 4 pour faire l’original et le malin, j’ai laissé tomber depuis longtemps la recherche d’une quelconque gloire. J’avoue que devant l’enthousiasme général je me suis dit, non je vais mettre la moyenne sinon je vais passer pour quoi. Et puis les dernières pages ont été aussi décevantes que les premières et que celles qui lient ces deux parties, c’est-à-dire inintéressantes au possible. Ce n’est pas un livre mauvais mais il me fait l’impression d’un vin qu’on débouche, qui ne sent pas grand-chose devant lequel on est dubitatif et puis qui une fois en bouche n’en dit guère plus. On se dit qu’il n’est pas infecte, qu’on peut le boire sans tomber malade, mais bon qu’à choisir on ne va pas y revenir et qu’on ne le conseillerait à personne.


Jean-Paul Dubois est sans doute un auteur important qui a fait par le passé de très bons livres et qui mérite une distinction. Je n’ai lu de lui que « Vous plaisantez Monsieur Tanner » qui était vraiment drôle. Ici ce livre n’est pas drôle. Il ne s’y passe vraiment pas grand-chose. La construction du livre est là pour tenter de cacher la platitude du propos. Car oui c’est vraiment plat. Je m’y suis profondément ennuyé et la fin fut laborieuse à lire car je réalisai que rien n’allait sauver ce roman à mes yeux. J’ai conscience que mon jugement n’est pas partagé. Souvent quand j’ai envie de m’insurger j’en trouve toujours quelques-uns qui rejoignent mon propos. Ici ça ne semble pas certain.
Alors pourquoi ? Ça se passe dans une prison sans qu’on y apprenne rien de bien original. Dans ce cas on pourrait espérer un peu d’humour pour faire passer le tout, je n’en ai pas trouvé. Voir son large co-box déféquer avec force soupirs et parler de Harley doit-il faire rire ? Pourtant le pipi-caca je suis assez fan, mais là est-ce le style, le manque de légèreté mais la mayonnaise ne prend pas. On sait dès le début que le héros est en prison pour quelque chose, mais on comprend aussi vite que ce n’est pas gravissime. Le seul suspens qui plane légèrement est sans doute la disparition de sa femme et de sa chienne mais hélas le personnage de l’épouse n’est brossé qu’en surface et ne prends pas corps (en tout cas pour moi). On parle d’histoires, d’ascendance et du périple d’un oncle qui a traversé le continent, mais franchement on s’en fiche.
Et puis concernant la fameuse scène qui a conduit notre fils de pasteur en prison, ça ne s’emballe pas, c’est plat. Alors voilà, j’aurais aimé adorer ce livre, me dire qu’il y a eu un bon Goncourt et comme je ne les lis pas si souvent, me dire que c’est une valeur sûre qui justifie les ventes miraculeuses et arrêter de passer pour un snob en disant que le dernier Goncourt que j’ai aimé est « A l’ombre des jeunes filles en fleur ».


Pour résumer, ce livre est peut-être un bon livre pour certains mais alors pour qui. Pour les gens qui lisent sans lire peut-être, ceux devant qui passent les caractères et qui pensent à autre chose et pouf qui réalisent que leur station de métro est là et qu’ils doivent s’extirper de la masse tel je rêvais de m’évader de cette lecture terne. Peut-être un bon livre pour ceux qui ne comprennent pas grand-chose ou pour ceux qui veulent ne rien découvrir de l’âme humaine.
Ou peut-être est-ce moi qui suis devenu insensible à une certaine subtilité, qui cherche des choses plus claires. Et pourtant les livres chiants où il ne se passe pas grand-chose je pensais quand même en être un amateur, mais il faut le talent de la plume, une beauté et une intelligence dans le traitement. Est-ce le livre de la lassitude pour l’auteur, le livre pour manger ou celui pour ne heurter personne et s’assurer que le côté insipide sera gage de succès et de prix littéraire.


Question complexe à laquelle je ne sais répondre que par un mot : déception.

PhilippeLou
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le 2 déc. 2019

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Philippe Lou

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