J'ai lu ce roman pour la faculté, il s'agissait de mon premier Giono.


Le style de Giono est assez particulier, intensément poétique au point d'être parfois assez abstrait, voir nébuleux. J'aime beaucoup le roman, j'apprécie la poésie mais je ne suis pas forcément fan d'un mélange trop homogène à ce niveau, c'est pourquoi je n'ai pas spécialement apprécié le style de Giono en dépit de son originalité et de sa maîtrise. Bien que ce roman est plutôt court, sa lecture m'a semblé extrêmement longue, ce qui n'est généralement pas bon signe.


J'avais été pourtant séduit par le cadre, et le récit de la traque de M.V m'avait également beaucoup plu dans l'atmosphère anxiogène qui se construisait dans le village, d'autant que j'apprécie clairement la "littérature des terroirs", en témoigne mon affection pour Jules Barbey d'Aurevilly. Mais arrivé au milieu du roman, l'action me donnait l'impression de s'essouffler complètement, et je me suis surpris à m'ennuyer, alors que je n'ai généralement aucun problème avec les romans "lents". J'ai néanmoins poursuivi la lecture, jusqu'aux dernières pages. Et là, tout s'est éclairé d'un seul coup. Assez pour me laisser une excellente impression finale.


Un roi sans divertissement, titre emprunté à une maxime du philosophe français Pascal, traite de la question de la fascination pour le mal, un thème que j'affectionne beaucoup. A travers le personnage de Langlois, il questionne notre rapport, parfois jouissif, à la cruauté. Le meurtre de MV sème les graines d'une monstruosité ordinaire chez Langlois, une monstruosité qui le pousse à se rendre chez la veuve de celui qu'il tua pour observer son portrait pendant des heures, une monstruosité qui le pousse à demander à ce qu'on égorge, gratuitement, une oie pour voir couler le sang sur la neige blanche. La fin tragique de Langlois illustre le combat des individus pour faire taire leur monstre intérieur, le monstre que Langlois, durant toute la nouvelle, tente de combattre dans la vallée ; MV, puis la bête. La contemplation du sang devient, dans ces paysages durs des montagnes, le seul divertissement possible. Il serait vain de faire une analyse complète, le mieux est toujours de lire, et ce roman vaut le coup d'oeil.


Un excellent roman donc, à mettre entre toutes les mains. Certains n'apprécieront pas la lenteur du récit, les digressions et le style ; c'est plutôt mon cas. Mais sa thématique vaut quelques heures de votre temps croyez-moi

Bassorah
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le 28 mars 2021

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Bassorah

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