Lu sur le conseil d'un professeur de français qui y voyait le pinacle du roman français (un peu avant que “La Princesse de Clèves” ne devienne, par un hasard politique, la métonymie de la culture surannée qu'il est parfois bon de défendre). Un des aspects remarquables de la Princesse de Clèves – d'après mes souvenirs –, c'est à quel point ce vieux roman (quelques 350 ans) ressemble déjà à notre roman moderne. Bien sûr, le style est surannée, l'extrême économie des descriptions ne correspond plus forcément à notre goût éduqué par le réalisme. Le roman se meut par ailleurs dans une abstraction quasiment parfaite, où tout est réglé par syllogisme sentimental. Sans doute est-il un peu difficile pour le lecteur moderne d'apprécier à sa juste valeur ce flottement parfait, qui lui rappellera peut-être celui des tragédies raciniennes. Néanmoins, la Princesse de Clèves reste un important jalon de notre histoire littéraire, et étonnamment lisible de surcroît – il serait dommage de se priver. Une citation pour la route : “La blancheur de son teint et ses cheveux blonds lui donnaient un éclat que l'on n'a jamais vu qu'à elle ; tous ses traits étaient réguliers, et son visage et sa personne étaient pleins de grâce et de charmes.” (ce sera tout ce qu'on apprendra sur la princesse)