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« Negro are pushing too far !! […] Un travail ! Une place dans le bus ! Ou au restaurant ! C’est déjà leur faire grand honneur ! Mais dans l’eau ! Dans nos vestiaires ! A poil ! Leur peau ! Leurs microbes ! Veulent pas coucher avec nos femmes pendant qu’on y est ? »

St Louis, juin 1949. Un adjoint au maire déclare : « Légalement, rien n’empêche un noir qui veut nager d’entrer dans une piscine. » Le lendemain des noirs ont accès pour la première fois aux bassins municipaux. Un « événement » qui va déclencher la colère d’une partie de la population blanche et engendrer des émeutes urbaines. Le maire de St Louis déclarera quelques temps plus tard que cette décision d’accepter les noirs dans les piscines était légalement juste mais inapplicable.

Louisiane, août 2010. Six adolescents se noient dans une rivière. Six adolescents noirs. Aux États-Unis, 60% des enfants afro-américains ne savent pas nager. L’héritage de l’esclavage, de la ségrégation et de la pauvreté a inconsciemment poussé les noirs à intérioriser l’idée que l’eau n’était pas faite pour eux. Ce constat sonne pour Mary Lee comme une douloureuse évidence. Elle a assisté aux émeutes de 1949 et elle est la grand-mère de trois des noyés. Présente le jour du drame au bord de la rivière, elle n’oubliera jamais : « Je suis entrée dans l’eau. Vos cris, les enfants. Vos lèvres cherchant l’air, vos mains tendues vers le ciel. J’ai avancé. J’ai marché dans l’eau, avec vous. Je ne pouvais rien, je le savais, j’allais avec vous. Il y a toujours un fleuve qui sépare les vivants des morts, c’était celui-là, la rivière rouge, le moment était venu pour moi de le traverser. »

Un texte puissant, habilement construit. La voix de chacun des protagonistes résonne avec force, et vous serre les tripes. Les temps ont changé, parait-il, mais dans l’Amérique d’Obama, certaines barrières ne sont pas prêtes de tomber. La démonstration faite par Judith Perrignon en est la preuve limpide.
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le 18 nov. 2013

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