Plus qu'un commentaire sur son œuvre, Retour au meilleur des mondes est un essai sur les dictatures du futur. Le texte est court ; c'est à la fois une qualité et un défaut. Une qualité, car on est toujours plus clément avec une œuvre courte (quand de surcroît elle est agréable à lire comme celle-ci) ; un défaut, car le texte fait pâle figure devant son ambition. Huxley en est conscient, en témoigne la préface, mais ambitionne tout de même de livrer une part de vérité. Malheureusement, Huxley dévoile dans ce livre son cruel manque d'habileté méthodologique. En résulte un discours certes instruit et éclairé, mais peu rigoureux. Anglo-saxon et résolument atlantiste, Huxley dévoile une conception politique parfois pauvre. Scientifiquement parlant la pertinence de son propos est (très) limité par l'état des connaissances de 1958. Là ou Le Meilleur des mondes, en prenant l'aspect d'une fable, revêtait un aspect prophétique, Retour au meilleur des mondes, en explicitant ses principes et en les appliquant à un futur proche (de surcroît connu par nous lecteurs contemporains), pert beaucoup en pertinence. Je ne me résoudrai pas à reprocher à un auteur de ne pas avoir réussi à prédire l'avenir tant l'exercice est périlleux, mais force est de constater qu'Huxley n'a su entrevoir ni le retour à l'équilibre démographique, ni la décolonisation, ni la chute des communismes, etc. Paradoxalement, c'est au travers de l'imprévu le plus fatal pour ses prédictions que ses thèses se sauvegardent. En effet, l'avènement du numérique à lui seul invalide la quasi-intégralité de ses prévisions, mais présente sur le fond le plus de point d'attache avec la vision huxleyenne de l'autoritarisme. Il à donc fallut attendre un demi-siècle pour voir l'avènement d'un espace numérique ou le paradigme huxleyen trouve une pertinence renouvelée.

Dans Retour au meilleur des mondes, Aldous Huxley ne décrit pas le monde qui est advenu, ni même un monde qui aurait pu advenir, mais un monde dont un homme de 1958 a pu craint l'avènement.

Lyman-Zerga
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le 13 juin 2025

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