Paul Hansen, détenu dans un pénitencier de Montréal, nous raconte son histoire, de ses origines (à travers la vie de ses parents) jusqu'au moment qui l'a amené à être incarcéré aux côtés de Patrick Horton, membre des Hell's Angels au caractère impulsif malgré une étonnante douceur.
On va dés lors parcourir ce passé dont dont les évènements s'enchainent quelque peu sans queue ni tête, agrémenté de moments présents servant à amener un peu d'humour dans un récit qui dégage beaucoup de nostalgie voir de mélancolie.
Le fil conducteur n'est que chronologique et tout ce qui arrive semble être le produit d'un certain chaos, d'un hasard tantôt bienveillant tantôt cruel ; et pourtant ces évènements définissent la vie de ce personnage, la construisent et l'amènent là où il en est lorsqu'il nous raconte tout cela ; ce même si la raison de l'incarcération n'est finalement que secondaire, presque mineure par rapport au reste. Le récit n'est pas construit pour nous amener à une grande révélation sur ce motif, mais bien pour nous faire ressentir les mêmes émotions qui ont traversées le personnage.
Jean-Paul Dubois nous parle de l'obsession des gens (sur les Harley, leur travail, la rigueur, la mort...) et de l'effet dévastateur que cela peut avoir sur leur vie (c'est flagrant avec le personnage du père) mais aussi de la puissance des sentiments, de l'amour et de la bienveillance. C'est un livre humaniste qui tend parfois à la critique de la société moderne même si cela reste en surface, un peu superficiel diront certains.
L'écriture du prix Goncourt 2019 est d'une simplicité extrême, les phrases sont courtes et vont à l'essentiel, sans aucune fioritures de style ; le ton se veut parfois humoristique mais devient un peu lourd par instant par la répétition. Difficile de trouver un trésor de littérature dans ces quelques pages mais une justesse bienvenue pour emmener une histoire à son terme sans incommoder le lecteur, sans trop le décevoir.
Au final Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon est un roman touchant, qui n'a peut-être pas l'aura d'un chef d'œuvre dont la qualité mériterait un prix littéraire prestigieux (mais là on remettrait plutôt en cause l'intérêt de ces fameux prix littéraires) ; mais j'ai aimé son humilité justement, à travers sa volonté de nous raconter une histoire sans teneur précise, sans grandes phrases pompeuses, mais touchante tout au long de ces remémorations.
Et c'est déjà très bien.